" Mon meilleur pote me manque, soirée pizza oblige "
ft. AARON & CLAY

La vie à deux oui c'est merveilleux sauf qu'on m'en a dépeint déjà les aspects les plus négatifs: manque d'intimité, prises de tête, plus de liberté etc. Alors pour éviter que cela ne nous arrive également, j'ai pris les devants et ai accepté l'invitation d'une soirée pizz' chez mon meilleur ami. Cela fait un bout de temps que je n'ai pas eu de nouvelle de lui et j'ose croire que sa vie soit aussi bien remplie que la mienne. Après tout, Aaron est un enseignant auprès de qui gravitent beaucoup d'étudiantes et à l'époque... Sa réputation n'était plus à refaire.

J'ai donc quitté le taff et répondu positivement à son texto avant de m'arrêter en chemin au drugstore du coin. Sans oublier de prévenir Anna d'un éventuel retard mais elle connait Aaron pour en avoir entendu longuement parlé, la pilule est plutôt donc bien passée. Un pack de Boston Lager, référence américaine dans le domaine, et je reprends la route direction Cambridge où m'attend Miller de pieds fermes. Le connaissant, il a lui aussi déjà tout prévu et c'est 20 min plus tard que je me présente à sa porte, bières à la main, et frappe, un dernier coup d'oeil à mon poignet. Non, je ne suis pas en retard, ni en avance non plus puisque juste avant de monter les marches, j'ai croisé du regard le pizzaiolo qui redémarrait.

" Mon meilleur pote me manque, soirée pizza oblige "
ft. AARON & CLAY

La porte s'ouvre et baigne son palier d'une clarté évanescente, presque aussitôt zébrée par l'ombre de sa silhouette qui se cale entre moi et la source lumineuse. Hey mon pote comme je suis, heureux de te revoir. Inutile de sortir de la pénombre pour entrevoir le sourire qu'il arbore en me proposant d'entrer, je le devine déjà sur ses traits puisque tel est aussi mon cas. J'imagine le nombre d'étudiantes qu'il a pu rencontrer et desquelles il va me vanter les exploits, un programme qui vaut à lui seul son pesant d'or. Le pas de la porte est passé et je me retrouve dans le couloir d'entrée, celui qui dessert le salon et la cuisine équipée. Et bien que cela fasse quelques mois que je n'y sois venu, rien n'a véritablement changé sauf peut-être lui, maintenant que je le regarde de plus près. Il a sur son visage la marque du gars qui a traversé quelque chose de singulier, ce même masque que j'ai pu apercevoir sur mon reflet lorsque le doute entre Annalynne et moi s'était installé. Mais cela me surprendrait qu'Aaron se soit si aisément laissé envahir par ce genre de sentiment.

Tu ne viens pas les mains vident on dirais, mais tu n'aurais pas du merci. " J't'en prie. " Il invite alors c'est la moindre des politesses que d'apporter quelque chose pour mon hôte et moi-même. Puis ce n'est pas du Saint-Emilion mais juste quelques bouteilles qui ne seront appréciées que pour leur fraicheur. L'odeur assez forte de la pâte chaude embaume déjà son logement ce qui n'est pas sans éveiller mon appétit, n'ayant rien ingurgité depuis... midi. " Pizza chorizo? " Comme celle que l'on prenait autrefois, lorsqu'on squattait les chambres du campus faute de pouvoir rentrer chez nous pour x raison. C'est instinctif, les pas s'enchainent vers le salon, humant à chaque mètre passé l'odeur de plus en plus entêtante et dépose le pack sur la table pour rapidement l'éventrer. " Alors quoi de neuf dans la vie du bon prof? "

" Mon meilleur pote me manque, soirée pizza oblige "
ft. AARON & CLAY

J'attends patiemment, quoique non pas trop finalement... Il ne lui faudra que quelques secondes pour partager le secret le plus étrange qu'il ne m'aura jamais confié jusqu'à ce jour. Quoi de neuf dans ma vie hum par ou commencer. Il a l'air gêné, la première fois que je le vois se gratter. L'aveu le démange fortement et il ne tarde pas à se confesser. Je vais te surprendre, mais je suis, tomber amoureux d'une fille, mais c'est compliqué entre nous. Encore?! Un vrai cœur d'artichaut celui-là. S'il n'avait été prof, on aurait pu le croire marin: une fille dans chaque port. Face à la surprise je suis resté figé, le regard médusé pour reprendre petit à petit contenance et presque un brin amusé une bouteille à la main. Aaron a toujours très bien su s'entourer, un trait de caractère que je lui ai toujours un peu envié. Avec le nombre d'étudiantes qu'il a ramenées chez lui, je le pensais immunisé. Il dit que c'est de l'amour mais en quoi cela diffère-t-il de ce qu'il a pu ressentir pour chacune d'entre elles? " Tu les as toutes aimées... " plus ou moins avant de les baiser. J'ai éclaté dans un rire décontracté, loin de vouloir me moquer de lui. Et toi quoi de neuf mon pote ? Attends une minute. Merde, je l'ai vexé? Non, il ne fait qu'aller chercher un décapsuleur qu'il me tend une fois revenu sur ses pas, " Merci " , et repart aussitôt s'assoir sur le sofa. Quant à moi, je perds petit à petit de mon sourire idiot lorsque je m'aperçois qu'il était sincère en me disant cela. " T'étais sérieux... " Peut-être un peu con sur le moment, je vais à pas mesurés le rejoindre et me poser de la même manière que lui pour, après un moment de silence, lui déclarer en fixant la télé. " Moi aussi ". Deux cons pris au même jeu...