Septembre… J’avais été tellement absorbé par la rentrée, par la reprise des cours, la frénésie de tout cela, de mon retour à Cambridge et puis surtout du clash avec Hippolyte qui m’avait mis à la porte, que j’en avais presque zappé le reste… L’espace d’un instant, les tracas du quotidiens l’avaient emporté sur ma nostalgie mais c’était sans compter sur le calendrier qui ce matin me rappela la funeste date anniversaire du jour… Trois ans. Trois ans qu’il était –parti- comme disent le gens, comme si ne pas dire tout bonnement qu’il était –mort- ça allait le rendre un peu plus vivant. Il était décédé, Arté n’était plus de ce monde et il avait laissé derrière lui ce vide immense qui en me levant aujourd’hui m’avait à nouveau englouti. Je passais ma matinée au garage, mais bon à rien et devant ma mine défaite, mon patron m’avait finalement libéré plus tôt. Une douche plus tard, et je tombais sur ce prospectus, là, traînant au milieu de ceux des clubs de la fac, sur une table au beau milieu de la salle commune de la MH. Un groupe de paroles sur le deuil ? Ok, c’était un signe non ? Je me surpris même à regarder aux alentours, pour repérer un potentiel étudiant qui l’aurait glissé là… Sauf que non, personne en vue, et puis surtout, ils étaient rares ceux à qui je parlais de ça, d’Arté, de sa mort et de mes sentiments vis à vis de tout cela. J’attrapai le papier, le détaillai avant de me lancer. Me levant, je quittai la MH, direction l’adresse indiquée. J’arrivais devant le bâtiment où avait lieu la fameuse réunion, je toquai, un peu nerveusement avant d’entrer dans la pièce où des chaises avaient été disposées en cercle et où quelques personnes étaient déjà arrivées. « C’est bien ici le groupe de parole ? Faut s’inscrire quelque part ou bien on peut juste venir écouter comme ça ?»   demandai-je en me tenant sur le pas de la porte, hésitant...

 Un deux trois, je respirai et poussai la porte, pas très assuré. Je n’entrais pas d’abord, restant dans l’encadrure, demandant un peu timidement à la petite blonde assise près de l’entrée les formalités pour rejoindre le groupe de parole. Elle eut un sourire et se leva pour s’approcher. Elle était surement celle chargée de l’accueil, parce qu’elle me salua et se chargea de répondre à mes questions : pas besoin de s’inscrire, juste entrer, s’installer, écouter… Et parler, aussi, que si l’on en avait envie. J’observais les chaises, les quelques personnes déjà assises, une lueur de doute dans les yeux. Mais l’image d’Arté et la date du jour étaient encore trop présents dans ma tête pour que je fasse demi tour. Mon regard se reporta sur la main tendue de la demoiselle, et après ces quelques secondes de réflexion, je la saisis. « Je m’appelle Denys au fait… » Je relâchai sa main après quelques pas dans la pièce avant de reprendre la parole un peu nerveusement : « C’est la première fois que je fais ça… J’suis pas sûr d’être à la place… » Pas sûr de trouver ici ce que je cherche aussi. Bref j’étais en plein doute. Et pourtant, j’étais étudiant en psy, j’avais fait déjà deux années d’étude dans ce domaine, je le savais que les groupes de parole étaient bénéfiques, que ce n’était plus à prouver que se confier et échanger était le meilleur moyen d’extérioriser ses démons internes. Mes prunelles détaillèrent les chaises libres sans pour autant aller m’y asseoir. C’était plus simple de rester un peu en aparté avec la blondinette pour le moment. D’ailleurs, c’est sur elle que mes yeux se fixèrent ensuite, la détaillant : « Vous êtes psychologue ou quelque chose du genre ? »