La température extérieure n'était finalement pas si terrible. Alors en sortant de cours, je m'étais mis en tête de sortir un peu pour rattraper le footing que je n'avais pas fait au réveil ce matin là. Je m'étais donc hâter de rentrer chez moi, dans l'appartement où je vivais depuis deux ans. Rien qu'un allée-retour, le temps de déposer mes affaires, d'enfiler une tenue de sport avant de me rendre  jusqu'au parc histoire de faire un jogging. Une quinzaine de minutes après mon arrivé, me voilà donc parti.
Des écouteurs branchés dans mes oreilles, mon portable accroché à mon bras, je courrai à une allure relativement lente depuis une bonne vingtaine de minutes. Ce jardin public se remplissait progressivement à mesure que nous arrivions à la fin des horaires de bureau. Courir avait toujours été aussi bénéfique sur moi. Me dépenser en général quelque soit la manière d'ailleurs. Seulement je n'étais pas apaisé pour autant. En effet ce parc comme bien d'autre lieu à Cambridge ou à Boston me rappelais tellement ces moments que j'avais passé avec mon ex.
Appelons d'ailleurs cela le hasard - puisque le destin ne pouvait pas être si cruel - car voilà que mon regard se posait sur celle vers qui mes pensées dérivaient. Béquilles en main, je l'avais reconnu malgré la distance qui nous séparait encore, malgré le fait qu'elle soit de dos. Je la connaissais par coeur... Alors bien sur que je l'avais reconnu ! Je n'avais même pas hésité avant de m'arrêter près d'elle. Oui, il existait toujours ce fichu morceau de papier qui m'interdisait de m'approcher d'elle, mais soyons sérieux ! Ce n'était qu'un morceau de papier et d'autre part, je n'étais plus celui que j'avais pu être avec elle autrefois.
"Dana..." lançais-je alors en m'arrêtant près d'elle espérant ne pas l'avoir effrayé. "Salut." arrivais-je à prononcer ne sachant trop quoi lui dire une fois face à elle.

Les débuts d'une relation sont toujours aussi beau pour se finir toujours de manière aussi mélodramatique. Ou bien ma relation avec elle était-elle l'exception qui confirmait la règle. Le temps n'avait pas eu raison de mes regrets. J'avais passionnément et j'aimais encore cette jeune femme qui se tenait devant moi. Les sentiments qu'elles avaient pu éprouver pour moi eux en revanche, avant totalement disparu. Avaient-ils seulement existé ? Si je me posais encore cette question, c'était parce dans un sens, j'avais la sensation que tout était parti de là. Cette incertitude grandissante d'être aimé à la hauteur de l'amour que je lui portais. Cette anxiété au combien handicapante qui me susurrait sans cesse que loin de moi, Dana risquait de s'amouracher d'un autre. Et la pire de toutes les sensations, la colère que je ressentais lorsqu'elle rentrait tard. Si tard dans mon esprit torturé par la jalousie et la crainte de ne pas être aimé.
Dana était là, face à moi, ses croquis aux mains, je me souvenais ne pas me lasser une seconde de la regarder dessiner. Mon regard se pose finalement sur elle, j'y retrouve un mélange de crainte, de méfiance, d'hésitation... Elle avait peur. La culpabilité me traversait alors aussi vive et piquante qu'un poignard. J'écartais lentement les bras de mon corps, comme pour mettre mes mains en l'air à l'instar de ce que l'on aurait fait face à un homme armé puis pour toute réponse je haussais les épaules. "Je n'ai pas mérité mieux comme réaction c'est vrai... " avais-je répondu en pinçant légèrement mes lèvres non sans montrer ma déception. Je laissais aussi retomber mes bras. "Tu sais bien que je ne crois pas au hasard... Et tu sais aussi que je ne serai jamais passé devant toi... Et en plus avec ces béquilles. Je ne pouvais pas faire semblant de t'ignorer. Alors ce que je veux c'est prendre de tes nouvelles." poursuivais-je sur le même timbre. "Si tu n'y vois pas d'inconvénient bien sur." précisais-je avec précaution.

De très nombreuses émotions m'avaient traversées, une à une, me dévastant plus ou moins au passage. Je fronçais les sourcils par moment, baissais les yeux à d'autres. Pourquoi parlait-elle de hasard. Cela avait toujours été notre "truc" de dire que la destiné nous avait mené l'un à l'autre. Se pouvait-il qu'elle s'imagine finir ses jours seule ? A moins que le pire ne se soit produit et qu'un autre ne lui ai volé son coeur. Je serrai la mâchoire à cette idée l'écoutant toujours, me sortir ses paroles que j'espérais fausses. Non, elle ne pouvait pas en aimer un autre ! . Elle poursuivait toujours, il semblait que ses mots n'attendaient qu'une chose, être entendus. Elle semblait les avoir retenu depuis le jour de notre rupture et ce jusqu'à aujourd'hui. Puis vint l'indice tant espéré, ces quelques petits mots qui m'indiquèrent que si Dana m'avait aimé, ce n'était plus le cas à présent. Ces paroles me blessèrent profondément, mais que pouvais y faire... Ne l'avais-je pas mérité ? La rancoeur... songeais-je répétant silencieusement ses paroles. Là encore, je ne pouvais pas lui en vouloir. Je l'avais blessé. Et pas seulement moralement. J'avais baissé les yeux, songeur, un air chargé de culpabilité au visage. "Je suis désolé Dana. " avais-je finis par dire après sa tirade. " Ce n'était pas moi... Clairement pas ! Je ne sais pas ce qui m'a pris. Ca ne me ressemblait pas... Vraiment pas. Et ça ne me ressemble plus " poursuivais-je toujours prononçant les mêmes excuses que je lui avais sorti à de bien nombreuses reprises lorsque nous étions encore ensemble. " J'ai changé ! J'ai... Je t'assure que j'ai changé. J'aimerai vraiment que tu me crois sur ce coup là. Que tu me pardonnes. " Sans doute était-ce si important parce que je croyais ne pas pouvoir continuer d'avancer sans cela. Peut-être aussi parce qu'au fond de moi j'espérais pouvoir la récupérer.