C'était le weekend et tu n'avais rien prévu de particulier. T'étais chez toi, fumant des joints de temps à autre. Tu repensais à Romy, là, sur ce lit. Tu repensais à vos plaisirs, tu te surprenais même à sourire. T'avais envie de sortir et de respirer, t'avais envie de voir la belle Oswald. Tu finissais par lui envoyer un message, vous devez vous retrouver au parc Back Bay Fens. Dans le fond, c'était un peu votre QG de l'époque et t'avais bien envie de retrouver cet endroit avec elle. T'embarquais quelques bières au passage dans un sac à dos, arrivé au parc tu venais escalader les grilles. T'aimais bien cet endroit, c'était apaisant, surtout la nuit parce que c'était vide avec une jolie vue sur Boston étoilé de ses lumières. Tu te dirigeais naturellement vers votre cabane, elle était légèrement excentré par rapport au reste. Tu t'installais sur les marches de devant, sortant une bière que t'ouvrais à l'aide de ton briquet et tu prenais une gorgée. Ça faisait du bien, puis dehors il faisait bon. T'attendais Romy avec impatience, parce que depuis qu'elle était partie de l'appart la dernière fois, tu ne l'avais pas encore pris le temps de la revoir. Tu repensais à votre moment, à vos instants de plaisirs, de désirs. Bon, même si après il y avait eu un léger imprévu qui incluait Zoey et Sabian, c'était un bon moment. Un excellent moment. Elle avait réussi à rendre sa présence sur Boston très intéressante, et ça te plaisait. C'était une routine que tu voulais bien accepter, de la voir dans ce parc à descendre quelques bières, de la voir dans ton lit le temps de quelques orgasmes. Ouais, t'avais le temps de la voir à tes côtés de manière récurante. Puis sans même t'en rendre compte, tu souriais. La perspective du retour de Romy te rendait heureux même si tu ne l'avouerais jamais réellement.

C'était difficile pour toi d'imaginer que Romy pouvait être autre chose qu'une amie. Une amie avec qui tu prenais du plaisir, une amie avec qui tu passais du bon temps. Elle était drôle, elle avait le sens de faire des soirées et le brun de folie qui t'amusait. Puis elle avait ce côté séductrice, ce côté sourire en coin et des baisers qui enflamment ta peau. Elle était l'amie qui avait le charnel au fond d'elle. Mais tout s'arrêtait là. N'est-ce pas ? Pourtant, t'avais rencontré cette femme à la soirée des mather, il y a de ça deux soirs. Elle était belle, la peau un peu mat et un regard qui t'invites à l'embrasser. Vous n'avez pas couché ensemble pour divers raisons, mais tu ne pouvais pas t'empêcher de la comparer à Romy. Romy l'incomparable, Romy l'indomptable. Romy, ta bonne amie. Ça n'avait aucun sens à tes yeux, parce que tu ne voudrais jamais voir ce qu'il pouvait se cacher derrière toutes tes pensées. Parce que dans le fond, tu n'avais jamais connu ça. Ça quoi ? L'amour ? Les relations ? Tu ne connaissais pas. La vérité c'est qu'à tes yeux, la famille, l'amitié et le sexe étaient les seules choses qui existent. Le reste n'étant que les fantômes de désirs utopique. Tu te sentais bien dans vos rapports, vous vous rendez service et tout était parfait. Parfait. T'entendais quelques pas, tu tournais la tête pour apercevoir la brune à travers la pénombre, légèrement éclairée. Elle se servait une bière, tu l'observais. Elle était belle, elle prenait une bière. C'était ça que t'aimais chez elle, toujours partante à boire ou à te suivre dans tes délires. C'était ça, Romy. "Tu sais que la bière sera toujours ma seule, ma plus belle, et mon unique femme." T'exagérais, avant il y avait bien ta jumelle, ta mère et ta beuh. Mais bon, c'était une position excellente dans le classement selon toi. Tu lui rendais son léger coup de coude, comme un enfant. "Pas trop dur le retour à Boston city bitch Oswald ?" Tu faisais référence à Harvard, bien évidemment. Boston étant une magnifique ville, seulement, tu ne pouvais pas en dire autant de l'université. Entre les pimbêches, les prout ma chère, les connards irrespectueux... et la liste ne finirait jamais. Ouais, t'adorais Harvard autant que tu le détestais. Puis les seules raisons pour que tu puisses aimer cette école, c'était pour le bonheur ainsi que le plaisir que ta soeur trouvait ici.

Tu buvais lentement ta bière qui n'était plus vraiment fraîche. Tu pouvais entendre les bruits d'une ville encore animée, une ville qui ne dort presque jamais. Parmi tout cela, il y avait encore quelques oiseaux éveillés. Vous faisiez partie de ces oiseaux, Romy et toi, les oiseaux de la nuit, ceux de l'ombre qu'on entend sans jamais les saisir. Vous faites parti de ceux qui peuvent s'épanouir dans la pénombre, c'était pour ça aussi que la plupart du temps, vous vous voyez le soir. C'était comme une relation qu'on entretient dans le secret, qu'on préfère vivre sous la lueur des lampadaires, le visage à moitié sombre. Peut-être parce que ça vous rend inatteignable, parce que la lune venait veiller sur vous, elle protégeait votre lien d'un oeil curieux. Tu regardais la brune lorsqu'elle te parlait de bonheur et d'enfants, c'était deux choses que tu n'associais pas du tout. Tu levais en sourcil surpris tout en souriant. Tu ne pouvais pas avoir de progéniture. Pourquoi ? Simplement parce que c'était une notion que tu ne comprenais pas. Pourquoi faire venir au monde un enfant qui n'a rien demandé, pour une vie de merde, dans un monde de merde qui tire à sa fin. Non, non tu ne souhaiterais jamais participer à la naissance d'un futur suicide. Parce que toi t'avais rien demandé, que dans le fond, tu savais que t'étais vraiment pas doué pour tout ça. Enfin, la vie, c'était pas quelque chose de fait pour toi. Alors si tu es une mauvaise graine, t'imaginais pas une seconde ce qu'une progéniture qui découlerait de toi pourrait être. Et puis il faudrait une femme, et ça, tu ne pensais pas non plus que ça arriverait un jour. Une femme, à toi, un couple, de l'amour. C'était pas des notions que tu comprenais. Non. Tu te contenteras d'être tonton, et dans le fond ce rôle te conviendrait amplement. Tu terminais ta bière sur le son des paroles de Romy. Son retour n'était pas aussi simple que tu pouvais le penser, d'ailleurs, elle non plus ne s'attendait pas à cela. "Il y aura toujours des cons pour te pointer du doigt, montrer tes erreurs. Mais tu t'en fous, tu les emmerdes tu vois." Tu savais pas trop qui ça impliquait, ni même ce qu'elle vivait, mais ça ne devait sûrement avoir aucune raison valable. Ouais, personne n'a le droit de juger ce qu'on choisit de faire. Dans le fond, ça ne te choquait pas vraiment que ça ne soit pas facile de revenir par ici. Vivre avec des gens ça implique toujours des emmerdes. D'ailleurs, t'avais beau aimer ta soeur du plus profond de ton coeur, en ce moment elle te faisait bien chier depuis qu'elle vous avait découvert au lit. Mais soit, ça lui passerait. Si elle n'était pas tout pour toi, tu lui aurais dit d'aller se faire foutre. Seulement, c'était Zoey, tu pouvais pas te résoudre à lui dire un truc pareil. T'étais en quelque sorte soumis, ouais, même si ça pouvait t'arriver d'être méchant de temps en temps. "T'as eu raison d'être partie, Romy. T'as eu raison de choisir ta vie plutôt que de laisser les autres la décider." C'était son plus beau choix, t'aimerais lui dire de repartir... mais tu ne lui dirais pas. Non, parce que toi ça te faisait trop plaisir de la revoir ici. Tu te sentais un peu moins seul depuis son retour, un peu plus compris, moins enfermé, plus libéré. Tu souriais.

Tu ne pouvais pas imaginer une seconde vivre sans Zoey, elle était à ta vie ce que les étoiles sont au ciel. Elle te faisait briller, elle te rendait plus beau, plus apaisant. Elle était pour toi comme une dose de vie, une dose d'amour, une dose de rêve. Si elle n'était pas là, tu serais sûrement déjà mort tué par balle, tué par rage, tué par lucidité. Elle était ta moitié, et sans sa présence, tu ne serais pas entier, tu ne pourrais pas avancer. Zoey c'était ta vie, la plus belle personne que tu puisses connaître, alors forcément, quand vous vous preniez la tête.. ça pouvait partir loin. Très loin. Trop loin. T'appelais ça les nuits folles, les nuits d'ivresse, les nuits de détresse. Tu t'étais pris deux fois la tête avec Zoey de manière intense, et durant ces quelques heures, tu étais déjà à moitié mort. Tu ne pouvais pas supporter l'idée, ça te rendait malade, ça te rendait fou. Tu faisais n'importe quoi, tu buvais, tu tapais la moindre personne qui osait te mettre un coup d'épaule. T'étais un fauve dans la nature, tu en devenais dangereux. Alors forcément tu pouvais comprendre le sentiment de Romy sur sa soeur. D'ailleurs, tu ne l'avais jamais rencontré. Quoi qu'il en soit, les histoires de famille, ce n'était jamais simple. "Ouais, la famille, ça craint. Un vrai lot de problèmes." Attachement, culpabilité. Tes histoires de famille étant la seule chose qui pouvait te tenir en vie, te tenir accroché à cette vie que tu ne supportais pas réellement. En fait, ta famille c'était le lien avec la vie. Ta mère, ton grand-frère, ton petit-frère, ta jumelle. Peut-être que ça aurait été plus simple pour toi de t'entendre avec personne, peut-être que si tu ne te sentais pas redevable envers eux, peut-être que tu ne serais pas ici. Et si personne avait pris soin de toi, et si Zoey ne serait pas ta moitié, peut-être que tu ne serais pas toi. C'était compliqué, t'étais désireux de connaître aucune attache familiale mais s'ils n'étaient pas à tes côtés, peut-être que tu pleurerais leurs présences. De toute manière, avec des si, on pourrait changer beaucoup de choses. Tout. Puis dans le fond, t'en avais pas vraiment envie de changer ta famille. Sûrement que tu les aimais trop, puis que c'était grâce à eux que tu es comme ça aujourd'hui. Alors ça amenait un tas de soucis, d'obligations, mais c'était la famille. Ta famille. Tu te devais de la protéger. Tu commençais à rouler un joint lorsque Romy te soufflait un merci. Etait-ce la première qu'elle entendait quelqu'un lui dire ? Peut-être. Mais tu sentais bien que ça lui faisait plaisir de l'entendre. Par un simple merci, le mot qui veut dire tout et rien. Enfin, après ce n'était pas réellement de ton ressort de lui dire des choses comme ça. Bien que tu t'intéressais à son bien-être, parce que tu tenais à elle. Tu le savais, là tout de suite, qu'elle avait gagné une partie sentimentale que peu de gens aperçoivent. Simplement par son retour, par sa nouvelle présence. Tu sortais une feuille, tu prenais ton grinder, tu laissais la weed remplir le papier. Tu te sentais tout à coup troublé par la question de Romy. Tu tournais la tête vers elle, sourcil gauche levé. Tu ne t'étais jamais vraiment posé une question pareille. "Non, bien sûr que non." La réponse te semblait évidante. La réponse, en revanche, était fausse. Tu prenais le temps de réfléchir quelques secondes, plongé dans le regard de la belle brune. "En réalité, j'en sais rien." Tu tournais la tête vers ton joint que tu continuais de préparer. T'étais le seul maître de ta vie, de tes choix. Si tu voulais partir, tu pouvais le faire. Mais tout n'était pas si simple que ça... Une seule raison: la famille. Plus particulèrement ... Zoey. "Enfin tu sais, ma famille, puis surtout Zoey. Je suis le seul à choisir, en théorie. Si on pense à la pratique, c'est différent. Je pense toujours à elle en premier. C'est comme ça, j'y peux trop rien. Je crois. Enfin, je regrette pas. D'ailleurs, j'pense jamais à tout ça. Bref.". Définitivement, cette question venait te perturber et tu ne voulais pas plus en parler que Romy voulait écouter tes problèmes.

Parler de ta soeur, parler de tes choix, parler de la vie. En fait, c'était pas vraiment ton truc. T'étais plutôt le genre à fuir les conversations trop sérieuses une fois qu'elles te concernaient. Les sujets qui fâchent, les sujets inintéressants. Les problèmes. Bien que dans le fond, ta soeur n'en était pas un. Pas pour l'instant, du moins. Et si ça devait arriver un jour, tu en serais le premier étonné. Alors voilà, tu coupais court à la conversation et Romy n'a finalement eu aucun mal à le deviner. Tu terminais ton joint, tu l'amenais à tes lèvres. La flamme qui sortait de ton zippo dansait, elle était belle à fendre la nuit. Elle venait enflammer ton désir, tu tirais sur le joint, tu sentais une certaine libération. Quand ta jumelle te disait que tu étais accroc, que t'avais tout l'air d'un drogué et d'un alcoolique, tu préférais lui répondre que tu aimais la vie. C'était un moyen de survie, c'était ton moyen pour ne pas toujours faire trop de folie. Tu tirais, encore. Tu soufflais, la fumée venait vous envelopper dans ce parc silencieux et paisible. La bonne odeur de la weed te caressait les narines, ça te faisait sourire. Sourire partagé par Romy, léger rire à l'envolé. Ça sonnait bien à tes oreilles, elle venait s'introduire dans ce havre de paix que tu te construisais toujours tout seul. Elle avait par sa présence, ce don inexplicable d'élargir la bulle pour s'y introduire. Bulle de confiance, de compréhension, de folie. C'était une bulle de survie, un monde venu d'ailleurs au milieu du leur. Romy mentionnait le bal, tu ricanais légèrement. "Ce genre d'événement hypocrite qui durent à travers les années scolaires. La seule et unique raison pour laquelle ça a été inventé, c'est pour pouvoir sauter son cavalier ou sa cavalière." Tu savais que ça pouvait représenter beaucoup pour certaines personnes, d'ailleurs, ta soeur en faisait partie. Mais voilà, tu ne pouvais pas penser autrement. Quelle rêverie d'organiser une soirée où tout se joue sur les apparences. "Vous allez tous vous faire fourrer" devrait être le slogan pour vendre ce genre d'événement.