The Horse Whisperer × ft. POPPY & CLAY

Il est dix heures tapantes à ma montre lorsque le bus du coin nous dépose finalement au grand canyon situé au sud de Santiago, près d'une étable où un autochtone propose contre quelques billets ses chevaux à la location. C'est un exercice que je n'ai plus pratiqué depuis des années, depuis que j'ai quitté l'Australie pour tout dire. Mais je reste persuadé que c'est comme le vélo: il suffit de se remettre en selle pour retrouver l'équilibre. Tout est une question d'assiette, de jambes et d'assurance. Et pourtant, dès que je pose pied à terre pour me diriger vers l'écurie, j'éprouve la curieuse envie de faire demi-tour, j'appréhende le moment venu où il me faudra donner les premiers ordres à ma monture. Me faire respecter des hommes est quelque chose d'innée mais des animaux, c'est une toute autre histoire.

Et lorsque le chilien se pointe pour m'adresser d'un doigt pointé l'un de ses petits bourrins, j'esquisse un sourire nerveux. Malgré toutes ces années loin des chevaux, une vérité me saute directement aux yeux: l'animal ne supportera pas mon poids. Il souhaite vraiment me voir l'écraser?  " Non " J'essaye alors de me faire comprendre de lui par des gestes puisque je ne comprends pas un traitre mot de ce qu'il me raconte avant qu'il ne prenne de sa poche une liste griffonnée. " Cooper, 51 kilos , moi donner çà ". " Pardon? " Espèce de sous-développé, j'en fais au moins trente de plus au bas mot dans mes bons jours. Il suffit de me regarder juste une seconde pour savoir que je suis loin de ce qu'il vient d'annoncer. Mais non, il me contourne et me laisse avec la jument tandis qu'il distribue tour à tour les animaux. Quelques secondes plus tard, je l'entends à deux box plus loin s'adresser à une jeune femme près d'un hongre dix fois trop haut pour elle: " Cooper?? 86 kilos?? " Putain, j'ai compris. Alors quand il la délaisse à son tour face à sa monture, je vais en direction de la petite blonde d'un pas léger, me massant le visage ne sachant comment l'accoster avant de lui demander " 51....c'est çà? "