Start over, check again, now tell me what you find.''
Strasbourg, France. Tu es né un dix août. Un beau jour d'été, tôt le matin... et pourtant tu n'as jamais aimé ni l'été ni les matins. T'es un gars du soir, un de ces mecs qui se couchent tard et qui se lèvent tout autant tard. Un de ceux qui préfèrent l'écharpe et le bonnet, à la place des lunettes de soleil et de la casquette. Peut-être que si tu étais né en hiver, tout aurait été différent. Peut-être que si tu avais vécu avec une vraie famille tu ne serais pas ainsi. Peut-être que ça pourrait être différent. Mais ce n'est pas le cas. Tes parents étaient des artistes. À ta naissance, ils ne l'étaient plus vraiment, ils vivaient dans l'ombre de leur succès. Ils n'étaient que des artistes mourant, ayant eu leurs heures de gloires comme beaucoup d'autres, avant de sombrer dans l'oublie. Malgré leur argent, malgré l'arrivée d'un premier enfant dans la famille, ton père ne supportait pas cet anonymat. Les flops s'enchainèrent sur les dépressions et les dépressions sur des trop gros abus d'alcools et de médicaments. Jusqu'à craquer, jusqu'à ne plus supporter, jusqu'à crever. Encore embryon, t'avais trois mois. Tu n'as jamais connu ton père et au fond, tu n'as jamais vraiment connu ta mère non plus, son âme est morte avec ton père ce jour-là. Au fond, elle ne faisait que vivre pour toi, pour te donner la vie. Mais même à ta naissance, elle n'a jamais réellement fait preuve d'un esprit maternelle. Cinq ans à t'éduquer, cinq ans à créer plus ou moins une personnalité à la "Mahe", cinq ans pour finalement mourir de la même manière que ton père et laisser métaphoriquement une oeuvre d'art à moitié terminée. Oeuvre d'art qui a fini par mal tourner, projet raté, laissé à l'abandon qui a juste fini par sombrer. Petit t'étais un gosse infernal. Tu as vécu presque toute ta vie en orphelinat, en tout cas jusqu'à tes dix-huit ans, sans jamais trouver une bonne famille d'accueil. Rebelle, dévergondé, insupportable, sale gosse, merdeux, finit à l'urine, tout les noms d'oiseaux n'étaient jamais assez bons pour te qualifier. Un vrai petit con, comme si ton seul plaisir était de foutre la merde. Ce n'est pas tout faux, mis à part l'art et l'art de foutre le bordel il n'y avait pas grand chose d'autre qui t'intéressait dans la vie.
"'Cause I'm going out of frequency. Can anyone respond ?
It's like an avalanche. I feel myself go under and the weight of it's like hands around my neck. I never stood a chance. My heart has frozen over and I feel like I am treading on thin ice."
Ton adolescence fut chaotique. Beaucoup de tes tuteurs se vantaient d'avoir vécu le pire avec toi, qu'un sale gosse ne pouvait que s'améliorer à l'adolescence. Si seulement. Il a fallu que tu traînes dans les pires gonfles, que tu finis tabassé à mort, à trois doigts d'être en prison, soules, drogué, bref que tu testes toutes tes limites avant de vraiment te calmer. Ça a duré trois ans ainsi. De tes treize ans à tes seize ans, tu ne faisais que ça de tes journées. Des conneries, des voles, des traffics, des cassages de gueules... Le pire c'est que tu ne regrettes rien. Tu ne t'es jamais attaqué à des innocents. Bon, le caissier au kiosque du coin a très certainement pas mérité que vous voliez une partie de son magasin... mais en soit ce n'est pas ce que tu as fais de pire. Il a sûrement dût continuer sa vie... ou pas. Enfin, parfois tu regrettes un peu, t'essaies de te dire que ça ne sert à rien de culpabiliser ce qui compte c'est de t'améliorer maintenant. Mais ce n'est pas chose facile, pour toi comme pour les autres, de te faire devenir quelqu'un de bien. Avec tout ça, t'as quand même le mérite d'avoir réussi à finir tes études malgré les nombreuses heures de cours que tu as séché. Pas de mentions, mais tu t'en foutais. Dans l'art, la mention c'est "créativité" le reste n'as aucune importance.
"Am I broken ? What's the chance I will survive ? Don't sugarcoat me 'cause I feel like suicide just give it to me straight 'cause I'm running out of time. I need an antidote, now what can you prescribe ? I'm going under."
Puis à tes seize ans, la tempête qui trônait en toi depuis tout petit se calma peu à peu. Laissant place à un "Côme" moins rebelle, plus calme, moins impulsif, plus... supportable. Ce qui surprit plus d'une personne. Mais c'était surtout un énorme travail sur toi, sur ta gestion des émotions. Au fond t'es pas méchant, juste rebelle, juste non-conformiste, tu te fous de tout et de tout le monde, peut-être bien égoïste et imbu de toi-même mais pas méchant. Jusque là au fond tu ne faisais que de te chercher, comme tout ado en crise. C'était violent, mais c'était ta crise à toi. Ton changement de comportement ne t'attira pas spécialement un cercle d'amis de meilleures qualités. Toujours les mêmes, avec les conneries en moins peut-être. Tu es devenu plus adulte, plus responsable, après seize ans de vie chaotique il était plus que temps de faire quelque chose de la tienne. Alors, à dix-huit ans, tu as tout plaqué. L'orphelinat, tes sois disant amis, les tombes de tes parents qui représentaient le mot "famille" pour toi. Ça pourrait représenter beaucoup pour quelqu'un d'autre, mais pas pour toi. Ce n'était pas réellement chez toi, ici, à Strasbourg. C'est le dix août pile que tu parties direction Cambridge pour rejoindre Harvard. T'avais pas de plan B. C'était cette école ou rien. Ton héritage fraichement acquit à ta majorité y passa mais tu étais motivé. T'avais enfin un but, un "rêve". Tu voulais terminer l'oeuvre d'art raté que tu es et que tes parents ton laisser foirer proprement, il n'est jamais trop tard pour quelque coup de pinceau en plus et devenir quelqu'un de plus ou moins bien... ou en tout cas de mieux qu'il y a quelques années.
BMTH - AVALANCHE