Arizonaaa me voilàààà ! Ouais bon, je sais pas très bien chanter et vaudrait mieux que je m'abstienne. Le fait est que c'est les vacances et que ça me met de bonne humeur. Certes, ça sera pas des vacances de rêves parce que j'ai pas forcément tout l'argent pour mais c'était un bon début je trouve. J'ai une caravane, que je partage mais ça on s'en fiche, il fait beau, le camping est bien placé et puis à tous les coups, mes potes les plus proches sont là. Autant dire tout de suite, l'éclate totale et je compte bien profiter du mieux que je peux. Alors que je venais de me lever, j'avais une putain d'envie de café là. Heureusement, j'étais pas trop loin de l'espace restauration pour pouvoir aller chercher mon petit dej la tête dans le cul. Claquettes aux pieds, t-shirt et short sur le dos, je venais prendre deux croissants ainsi qu'un café corsé que j'rapportais sur mon lieu de résidence pour l'été, sur la table posée devant la caravane. Installé, j'en profitais même pour foutre les lunettes de soleil sur le nez puisque ça commençait déjà à piquer les yeux mine de rien. Et voilà, une matinée comme je les aime.

Ce que j'aime le plus ici, c'est le matin. La chaleur n'est pas encore trop étouffante, et surtout, nous sommes dans la nature. On est au milieu des montagnes de l'Arizona, on entend les oiseaux, les bruits de la nature et j'adore ça. Je préfère ça à un hôtel quatre étoiles. Lorsque je me réveille, je mets pas moins de vingt minutes pour sortir du lit. Quand tout à coup, j'entends un bruit. Autour du camping, il y a des brumisateurs automatiques et il y en a pas loin de ma caravane. Je regarde par la fenêtre et je souris, quoi de mieux que de se réveiller là-dessous ? Je sors alors du lit, enfilant un bas de maillot de bain et un débardeur et je cours en dehors de la caravane en criant, « T'ARRÊTES SURTOUT PAAAAAAAS »  avant de me foutre en dessous, les yeux fermés. Un réveil en fraicheur. Du frais, putain c'est bon. Quand le jet du brimasateur s'arrête je me recule et je sens que je bute contre quelque chose, une table on dirait. Je me retourne et je me trouve face à Lincoln. Bah merde alors, il fout quoi ici lui ?

Un bon café dehors le matin, y'a que ça de vrai ! Du coup, j'avais été chercher mon café au service restauration du camping - j'ai pas de cafetière compétente et en bon état dans ma caravane malheureusement - et puis je m'étais installé sur la table. J'avais même opté pour mettre un peu de musique dans mes oreilles avec mes écouteurs. Yeux fermés, je profitais de la fraicheur matinale quand tout à coup, quelqu'un percuta ma table. Je rouvrais les yeux presque immédiatement avant de découvrir qu'il s'agissait d'Holly. Celle que je m'étais mise à détester depuis un concours. Celle que je m'étais secrètement mis à apprécier quand elle m'avait partagé les documents de la famille Hoover. Retirant mes écouteurs, je posais le tout sur la table, vérifiant alors si elle n'avait pas renversé mon café. Par chance, c'était pas le cas. « Tu pourras faire attention la prochaine fois ? Non pas que ça coûte cher un café ici mais un peu quand même. » Ouais bon, pas tellement, mais j'ai pas envie de gaspiller de l'argent dans du breuvage noir deux fois quand je peux le faire qu'une fois. J'arborais alors un sourire qui voulait faire passer le message.

Quand il s'agit des petits plaisirs simples de la vie, je suis la première à m'incliner devant. Alors avec la chaleur qu'il fait, surtout dès le matin, quand j'ai la possibilité de me rafraichir, je ne me fais pas désirer. Sans faire gaffe à ce qui se passe autour, bien sur. Je butte contre une table et en me retournant, je fais face à un Lincoln qui a l'air assez blasé. Je ne savais même pas que je l'avais en voisin de caravane, what a shame. « Tu pourras faire attention la prochaine fois ? Non pas que ça coûte cher un café ici mais un peu quand même. » J'arque un sourcil en le regardant, « Oh tiens, du café ! Attends ! »  Je vais dans ma caravane et je prends une tasse avant de revenir près de lui pour me servir directement à sa cafetière. « T'as pas du sucre ?  » Je souris en coin: ouais, je fais ça pour l'énerver, c'est juste plus fort que moi. Je tire une chaise et je m'assoie près de lui en trempant mes lèvres dans ma tasse. Ugh, vraiment trop amer je confirme, il me faut du sucre!

Non mais j'étais clairement fan des petits plaisirs de la vie, j'en faisais limite même une religion. Marcher pieds nus dans le sable ou dans l'herbe, dormir dans un hamac, boire un café à l'aube, en entendant les oiseaux chanter. Ouais, c'était ce qui faisait que j'aimais ma vie. Mais par dessus tout, j'aimais lire un bouquin tranquillement installé à 14h, sans qu'on vienne me déranger. J'avais pas tellement eu de chance jusqu'ici, puisqu'Emma m'avait bousculé l'autre jour. M'enfin. Là, c'était Holly qui venait me déranger dans un de mes petits plaisirs, et je n'appréciais pas tant que ça. Sans trop savoir ce qu'elle faisait en partant, ce n'est que lorsqu'elle revenait vers moi avec une tasse que je comprenais qu'elle allait se servir dans ma cafetière « Je- » Je la laissais faire, elle comprendra bien assez vite que c'était une regrettable erreur ce qu'elle venait de faire. Et voilà qu'elle venait s'installer à côté de moi pour siroter son café tranquillement. Bon bah ce matin, mon petit plaisir a pris fin bien assez tôt. « Non, désolé c'est.. ma coloc, qui a pris les derniers morceaux. Elle est très fan de sucre en fait, donc voilà » Je tentais de dissimuler mon désolement à travers un sourire mais en vain, je crois ça se voyait que c'était pas si sincère que ça. « Il est bon ton café ? Enfin, en dépit du manque de sucre je veux dire »

« Je- » Je ne fais pas tellement attention à ce que Lincoln essaie de me dire, je me contente de me servir dans sa cafetière et venir m'installer à sa table sans aucune gêne. Je lui demande même s'il a du sucre, parce que son café est super amer et que c'est juste dégueulasse. « Non, désolé c'est.. ma coloc, qui a pris les derniers morceaux. Elle est très fan de sucre en fait, donc voilà »Je grimace légèrement en regardant mon café et j'hausse les épaules, prenant une autre gorgée. Ouh, c'est vraiment weird.  « Il est bon ton café ? Enfin, en dépit du manque de sucre je veux dire » Je lève le regard vers lui, « Bah.. il a un sale goût, tu fais pas très bien le café mon petit Lincoln. »  Je souris en coin et je remarque alors que le café qu'il a est pas un café qui vient de sa cafetière, mais un truc qu'il a du acheter dans le coin. Je regarde mon café, puis le sien, puis le mien et là, ça fait tilt. « Attends, c'est parce qu'il est dégueux que t'as été t'en acheter un? »  Je grimace et je pose ma tasse, « Pourquoi tu m'as laissé me servir ?! »  Parce que là j'me suis intoxiquée au café dégueulasse.

Non mais quelle idiote quand même des fois elle. Forcément que si elle me laissait pas parler, elle aurait une drôle de surprise en dégustant ce merveilleux café dégueulasse. M'enfin, la faute lui reviendrait, puisqu'elle ne m'avait pas laissé en placer une. Taaaant pis pour elle. Du coup, elle s'installait et puis cherchait le sucre. Ouais non, on va dire qu'il y en a pas. Peut-être que ça fera tilt à un moment donné. « Petit Lincoln ? » Parce qu'on est au stade de se donner des surnoms maintenant ? Première nouvelle. Non pas que ça me dérange mais bon, on se connait pas quoi. Sauf le moment où elle m'a montré des dossiers historiques, importants pour l'histoire de notre pays. Puis là, je voyais sa tête et je comprenais qu'elle avait compris. Le sourire venait s'étirer sur mes lèvres alors qu'elle m'interrogeait, presque indignée. « Peut-être parce que tu m'as pas laissé le temps de te prévenir ? Tu parles tellement, c'est affolant ! » C'est les vacances, un marathon. Pas la peine de sprinter comme si sa vie en dépendait.

« Petit Lincoln ? » Je ne fais même pas gaffe à cette remarque qu'il vient de faire. Oui oui, je viens de l'appeler petit Lincoln. Et oui, je ne l'entends même pas le dire parce que je viens de comprendre ce qui s'est passé. J'ai pas cherché à comprendre, je me suis jetée sur sa cafetière alors que celle-ci doit être cassée ou un truc dans le genre, d'où le café dégueulasse que je viens de boire, et le café qu'il semble boire et qui vient d'un truc extérieur. Il aurait pu me prévenir de pas boire le café de chez lui, non ? « Peut-être parce que tu m'as pas laissé le temps de te prévenir ? Tu parles tellement, c'est affolant ! » Je parle tellement ? Je parle tellement. Je le regarde, toujours assise face à lui et je croise les bras à ma poitrine sans rien dire. Je ne dis absolument rien, je ne fais que l'observer. Bon bah puisque je parle trop, pas question que je dise un mot. Je vais rester muette comme une tombe, là à l'observer boire son bon café pendant que moi, je suis... muette. Je garde un petit sourire sur les lèvres, espérant que ça l'agacera que je le regarde silencieusement avec ce petit sourire satisfait.

Holly était agaçante quand elle le voulait. J'veux dire, même pas le temps de lui dire quoique ce soit à propos du café qu'elle enchainait assez rapidement. Bah tant pis, elle s'en rendra compte bien assez vite hein. Non mais parce qu'en plus, elle m'appelait "Petit Lincoln", sauf que j'ai rien de petit hein! Non mais ouais, tellement agaçante, elle m'énervait. Vraiment. Je sais pas du tout comment j'allais survivre ces deux mois en sa compagnie en fait. Enfin, en étant son voisin. J'espérais juste qu'elle me laissera assez tranquille en fait. Et du coup, je lui avais quand même dit que j'avais essayé de la prévenir pour le café sauf qu'elle parle trop et voilà qu'elle parlait plus du tout. En fait, elle me regardait là, sans rien dire. « Quoi, tu vas passer ta matinée à me regarder boire mon café avec un sourire sur les lèvres ? » J'étais pas agacé... ouais bon peut-être un peu. Elle est chiante.

Je sais que je suis énervante. Je sais que je peux devenir très très très agaçante quand j'en ai envie. C'est un trait de caractère qui pourrait être facilement vu comme négatif, mais je le prends moi comme une qualité plus qu'un défaut. Parce que je sais que je peux faire chier n'importe qui, n'importante quand juste en actionnant mon petit côté fille têtue méga chiante. Je suis donc là, assise à regarder avec ce petit air agaçant dont j'ai le secret sur le visage. « Quoi, tu vas passer ta matinée à me regarder boire mon café avec un sourire sur les lèvres ? » Je le fixe, et je ne réponds pas. Je ne réponds pas. Du moins, pas tout de suite. Je me contente de le regarder, toujours avec insistance. Je finis après une minute ou deux par me redresser légèrement, décroisant mes bras en me penchant vers lui, disant doucement avec toujours ce sourire agaçant sur le coin des lèvres. « Quoi, ça te perturbe ? C'est le fait qu'une fille te regarder qui te perturbes parce que t'as pas l'habitude ? » Je le regarde, et je ne dis à nouveau plus rien, attendant une réponse de sa part.