Leonora & Clay
   I’ll be back.

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Un autre tribal de plus ornait à présent mon biceps droit, figé sous la fine pellicule de cellophane que l'artiste avait fraichement apposée vingt minutes plus tôt. La douleur était encore bien présente et quoi de mieux que l'alcool pour évincer cette légère souffrance... En un appel, les trois flics les plus audacieux de Boston se retrouvèrent autour d'un jeu de trous et de boules. Le billard, typiquement masculin. Et tenant fermement nos queues, évitant les sphères les moins mieux notées, nous commençâmes la partie. J'en étais à ma quatrième bière - rien de très glorieux entre nous - quand d'un coup mal placé la blanche fut éjectée de la table et roula jusqu'à heurter une plainte un peu plus loin. Le bruit fut étouffé par les nombreuses acclamations des supporteurs présents, venus pour mater le combat sur grand écran. Et tandis que j'allais la chercher j'y jetai tout comme eux un œil et vis moi aussi les deux combattants dont l'un d'eux était l'un de nos représentants. Mouais... La boxe bof, que du spectacle. L'un de mes deux compères m'attendait déjà le regard fuyant et le sourire moqueur. Alors quand je fus à sa hauteur, il ne put s’empêcher de sortir sa vanne, ce qui ne manqua pas d'éveiller les soupçons du troisième acolyte. " Tu te déconcentres bien vite ce soir ". Sans plus leur prêter d'attention, ma main vint repositionner la boule sur le tapis tout en rajoutant d'un ton cynique “ Je n'vois pas d'quoi tu parles ”. Il enroula son bras autour de mon cou, pointant du bout de sa queue une silhouette à l'autre bout du bar. " Tu l'as reluques depuis le début de la partie ". Sur la défensive aussitôt, je me désengageai de son emprise. Mais trop tard, mon geste m'avait trahi car il était vrai que je l'avais une ou deux fois observée.

" Qu'est-ce que t'attends pour lui parler..." Penché sur le billard, l’œil rivé sur mon prochain coup, je ne pouvais m’empêcher de relever de temps à autre le regard vers le fond de la pièce, vers elle et celle qui semblait être l'une de ses amies.“ Jamais deux à la fois, tu devrais l'savoir.” J'avais donc reporté toute mon attention sur les boules et tira lorsque le troisième attrapa ma cible avant qu'elle ne disparaisse dans la cavité. " Regarde, Dieu a exaucé tes prières. " Ses paroles ressemblèrent à une mise à l'épreuve et me redressant, d'un coup d’œil histoire d'étancher ma soif de curiosité, je l’aperçue effectivement seule, isolée.

Je leur laissai donc mon équipement et repris ma bière à la main, l'étudiant durant mon approche: Joli brin de fille, cheveux longs couleur ébène, légèrement maquillée et pourtant si féminine, lorsque je les entendis au loin me siffler. Bande de cons... Ma bouteille vide percuta le comptoir et je pris place à sa gauche, fis signe au barman d'un geste de la main, “ Une autre ”. Et dans l'attente d'être servi, mes pensées voguèrent sur celle qui se tenait à mes cotés, songeant déjà à une façon de l'embobiner. M'amusant machinalement à faire tourner le culot de la bouteille de verre sur le bois détrempé, je me mis aussi à regarder l'écran et sortis ce qui me paraissait évident sur l'instant: “ Zhang va l'emporter ”. 

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A peine avais-je tenté une approche des plus subtiles que cette brune sulfureuse me tira un coup de semonce droit dans les yeux. Lesbienne? Sérieux... Qui avouerait çà de but en blanc à un parfait inconnu si ce n'est pour le faire dégager prestement? Niquée ma belle, si tu veux jouer à ce jeu là, t'es pas au bout de tes peines. Mon regard se déporta sur mes deux compères qui nous observaient toujours d'un peu plus loin, encore affairés autour du billard. Et faisant mine de rechercher quelque chose dans ma poche, je leur fis signe discrètement de la main que l'affaire s'avérait plus corsée que prévue, qu'il me faudrait sans doute l'avoir à l'usure. L'un d'entre eux fut aussitôt pris d'un rire nerveux, se retournant face au mur ce qui me fit sourire également lorsqu'il laissa tomber sa queue. Rivé à présent sur mon fond de bouteille, je laissai s'échapper - le sourire aux lèvres - des mots dépassant ma pensée, peut-être un peu vexé d'avoir été aussi vite écarté. “ Bah c'est pas grave, personne n'est parfait. Je me contenterais de regarder. ”   De deux choses l'une, soit j'allais me prendre dans les prochaines secondes une gifle ce qui voudrait dire que - choquée et faute de trouver de quoi rétorquer pour m'évincer - elle n'en était pas une. Soit elle allait continuer dans sa lancée, me crachant sa verve au visage et peut-être irait jusqu'à me proposer de l'accompagner histoire d'ébranler mon assurance. Si t'en est qu'elle aie déjà une partenaire...Peut-être cette rouquine qui m'avait empêché jusque là de l'accoster.  
Sans attendre sa réponse j'enchainai sur son commentaire plutôt distrayant tandis que le barman décapsulait sous mes yeux ma commande. “ C'est pas une question de chance mais de couilles... Enfin... si tu connais ce mot.  ” J'en reportai le goulot à mes lèvres, visionnant le combat mais restant néanmoins attentif au moindre de ses gestes, juste au cas où.

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Pas un seul geste agressif à mon égard. Merde, me serais-je planté de victime... Eh bien maintenant que j'en connaissais la teneur, pourquoi ne pas renchérir sur la mise et lier le plaisir au lucratif? Ma main délaissa la bière pour aller quérir dans mon blouson - déposé sur mon genou - un objet aux reflets métalliques. En une pression l'écran tactile s'illumina, dissimulé de son regard, et mes doigts pianotèrent frénétiquement sur les touches virtuelles quelques mots à l'intention de l'un des deux condisciples. "  Gouine, combien pour l’amener dans mon pieu?" . Et malgré la distance j'entendis l'un d'entre eux s'esclaffer lorsqu'il lu le contenu du message reçu en quelques secondes seulement. C'était peut-être un peu prétentieux de ma part c'est vrai. Peu de temps après, le mien vibra également. Un seul nombre était affiché à l'écran dont les trois chiffres, il faut bien l'avouer, ne me laissèrent pas indifférent.  Une fois le portable à nouveau à l’abri, je repris ma bouteille à pleine poigne et entama la descente, pour entre deux gorgées, discuter de son choix de vie: “ Comme on dit, y'a que les cons qui ne changent ...ou ne rechangent pas d'avis.  C'que j'en dis... ” Les yeux toujours rivés sur l'écran, le goulot déposé sur les lèvres, j'espérais qu'une femme devenue subitement végétarienne pouvait de nouveau gouter à la chair.

Elle était si sûre d'elle dans ses allégations et semblait nourrir envers moi une telle aversion que je commençais à croire qu'il me serait impossible de lui faire faire de concession. Mais lorsque je sentis son regard se déposer sur moi et qu'elle rouvrit les lèvres, son sous-entendu me laissa pour le moins perplexe. “ A quoi ça te servirait de le savoir? Ça ne fait plus partie de ton régime alimentaire. " Une autre gorgée coula le long de ma trachée, la regardant soudainement de biais avant de rajouter “ Mais si c'est pour ton éducation personnelle, et pour te reprendre, tu peux toucher. Je suis ouvert à tout, même à ce qu'une gouine me tâte les " Un bruit sourd devant nous me coupa dans mon élan. Je restais à questionner du regard le barman qui venait de déposer une pinte à mon attention tout en désignant d'un signe de tête une femme plantureuse assise à l'autre bout, le regard langoureux. Encore une qui s'était laissée amadouer cet emballage sur mon bras.   “  Quoi... c'est pas pour elle plutôt? " Je souriais, ironique à l'idée que ma voisine ait plus de succès qu'un hétéro pur souche auprès de la gente féminine.... chose impossible. " Non, pour vous a-t-elle dit". Levant les yeux à nouveau vers cette inconnue, je la remerciai d'un sourire sans pour autant lui porter le moindre intérêt. Après tout, ce n'était pas sur elle que j'avais posé mon dévolu.

Spoiler:

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Je n'avais rien dit sur son commentaire quant à ma sexualité puisqu'il était évident que j'étais aux yeux de tous un hétéro. Certes avec une gueule d'ange une fois rasé de près mais jamais je n'avais eu d'approche ambigüe de la part d'un homme...fort heureusement. Par contre, lorsqu'elle cru que je la prenais pour une conne, toujours la bouteille accolée à mes lèvres, je ne pu m'empêcher de lui faire remarquer l'ironie de la chose, un peu blasé qu'elle n'ait su prendre ma remarque à la légère. “ C'est qu'une expression.... ”. Inutile de te mortifier pour si peu la belle,  je déconnais. Mais néanmoins, je me mis à sourire sur sa réplique: la voilà la réaction agressive que depuis peu j'attendais.

Alors, quand elle s'adressa à cette femme à l'autre bout du comptoir, j'en éprouvai une soudaine satisfaction mais restai de marbre lorsqu'elle me "vendait" à la bien heureuse.  Serait-ce de l'intérêt de sa part...Puis elle se pencha Même si je suis bisexuelle à tendance plus prononcée pour les hommes.. Je passe mon tour cette jolie demoiselle. Tu devrais aller la voir. En tout cas, j'aime bien ta détermination...Mais tu ne m'auras jamais dans ton lit Fort intéressant. Les dernières gouttes de liqueur ambrée me donnèrent une excuse suffisante face à mon silence. Je viendrai chercher mon casque après . Encore plus intéressant...Au pire, je m'appelle Léonora et je pense que je suis bien trop jeune pour toi. Bref bonne soirée avec miss coincée ! Qu...Quoi?? Là, ce fut la douche froide. Combien pensait-elle que j'avais? Elle partie aussitôt sans demander son reste pendant que je restais là à scruter le barman.

Après quelques minutes, je me penchai vers lui au dessus du comptoir, ouvrant mon portefeuilles comme si j'allais payer ma note, lui dévoilant ma plaque en guise de passe droit tout en lui soufflant d'une voix assurée “ Écoute, un double et une bière, elle n'est déjà plus en droit de conduire. Alors soit tu me dis quel genre de bécane elle a et je m'occupe de l'immobiliser, soit tu la laisses rentrer en état d'ébriété et j'me ferais un plaisir de venir te coffrer pour non assistance à personne en danger. Tiens au passage file moi un bout de papier " Pour le restant, l'insigne suffit à le raisonner et il me dévoila la marque ainsi que la couleur de la cylindrée de cette habituée.  Satisfait, ma main vint tapoter sa joue, le gratifiant d'un large sourire tout en lui laissant un billet. “ Tu vois c'était pas compliqué " Ma veste sur l'épaule, je quittai à mon tour mon promontoire, une autre bière à la main, pour retourner vers mes confrères, l'un en particulier et lui demandai d'un ton calme mais légèrement irrité: “ T'as toujours tes chaines dans ton coffre?  " Il se mit aussitôt à rire, hochant de la tête " Hey Roméo, tu comptes l'attacher?" Pensivement, je me détournai vers cette brune diabolique aux penchants exotiques, à présent assise dans un coin du bar. “ C'est à peu près çà". Je ne l'avais pas quittée du regard tandis qu'il déposait dans ma paume entrouverte son trousseau de clefs.

Il ne me fallut que quelques minutes pour aller enchainer la roue avant de sa bécane, la seule cylindrée correspondant à la description que le barman m'avait donnée. Avec ceci, impossible de s'échapper, le tout condamné par un cadenas en acier trempé que Jeff utilisait d'ordinaire pour verrouiller sa remise. J'en observai quelques instants le résultat, un petit mot laissé à son intention où était écrit " Bien cordialement, Clay " , puis  repris la direction du bar. Rien n'avait changé entre-temps, elle était toujours assise au même endroit, visionnant de face l'écran géant. Quant à moi j'avais le choix: passer du bon temps avec cette femme au comptoir ou reprendre ma partie du billard la queue entre les jambes pour le moment. La deuxième option me parut la plus propice en attendant qu'elle daigne réagir à cette provocation.

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" Bah alors! Elle t'a refoulé? " Jeff, mon bon vieux Jeff, vas-tu fermer ta grande gueule... Arrivé à leur hauteur, j'haussai les épaules en signe de mon désintérêt et tout en récupérant mes affaires, un bras fermement ancré sur la table de billard, rajoutai, sûr de moi “ Tout est question de patience. Vous allez voir, elle va revenir me voir. ”  La partie s'éternisait tandis que de temps à autre, juste par curiosité, je lançais un regard intéressé toujours dans la même direction. Puis c'est le sourire en coin dessiné sur mon profil que je la vis finalement se lever, prendre son casque auprès du barman puis sortir. Regardant ma montre sournoisement, je me demandais combien de temps elle allait mettre avant de m'implorer. Le battant de la porte se fit de nouveau entendre au bout de quelques secondes seulement et sa silhouette se faufila de nouveau vers le comptoir, visiblement outrée. Bien, c'était l'effet escompté.

Alors reprenant mes actions, concentré sur mon prochain coup - et je parle du billard bien évidemment - l'un des deux compères me siffla discrètement lorsqu'elle arriva à moins de deux mètres de nous. Sans importance. La queue glissa le long de mes phalanges et percuta violemment la cible qui vint se loger dans la cavité convoitée. Néanmoins, en me redressant, je sentis une présence derrière moi m'étreindre. Et quelques secondes durant, je la cru bien plus affectueuse qu'elle ne l'était vraiment, ses mains glissant vers un endroit que je pensais pour elle dénué d'intérêt. Naïf sur ses intentions, ma tête se pencha vers elle, un peu perturbé qu'elle s'adonne à de telles pratiques en public. “ Hey hey... Ici? ” . Au fond de moi, je n'étais pas contre cet élan d'attention mais ses mains s’arrêtèrent sur la boucle de ma ceinture quand elle me siffla à l'oreille: " Sans rancune Casse-noisette ! " “ Hein? ”.
Elle avait été si rapide, si habile qu'il m'avait été impossible de la stopper avant de me retrouver en boxer, le futal sur les genoux. Naturellement, les deux abrutis qui m'accompagnaient éclatèrent de rire mais je n'étais en rien gêné, peu pudique par nature et bien foutu de ma personne. La voilà qui me toisait à présent, le sourire aux lèvres lorsqu'elle me concéda vouloir arrêter notre petite guéguerre. " Maintenant que l'on est quitte, je veux rentrer chez moi à moto. Je ne partirai pas d'ici avant que tu m'offres la possibilité de partir. " Compte là-dessus... Un regard dans leur direction et les deux autres se turent, simple question d’autorité. Puis revenant à elle, les bras croisés, toujours dans le plus simple apparat, ma langue se délia d'un ton plus sec que d’accoutumée “ Contente? ” Les secondes s'égrenèrent alors que nous nous observions en chien de faïence. Puis je pris sur moi de me rhabiller, rebouclant ma ceinture fermement avant de lui cracher “ Quitte? Je ne crois pas. ”. Mais une main se déposa fermement sur mon épaule et la voix de Jeff énonça l'une de ses conneries légendaires histoire de détendre l'atmosphère. " Coop, techniquement, c'est toi qui vient de jouer à l'exhib dans un lieu public, t'es en infraction. "  C'est l’hôpital qui se fout de la charité. Ok, arrêtons les dégâts tant qu'il est encore temps. Mais puisqu'elle y tenait tant à cette clef, qu'elle vienne elle-même la chercher. Je m’approchai donc d'elle sous le regard inquiet de mon adjoint, me postant devant elle avant de lui murmurer, sur mes gardes “  Poche droite."