Qu'est-ce que u foutais au bal? T'avais aucune envie d'être la, à devoir affiché un sourire comme si tout allait bien, comme si tu étais d'humeur festive alors qu'en vérité tu ne l'étais pas. T'avais pas envie de faire ton hypocrite à prétendre que tout allait bien avec Alex ou la bande alors que ce n'était pas le cas. Le bal, c'était juste de la merde et il y avait plein de souvenirs auquel tu n'avais pas spécialement envie de penser. Ta discussion avec Wyatt t'avait aidé, à oublier qu'il y avait aussi du bon dans la vie et que les cicatrices pouvaient se refermer avec le temps. Est-ce que tu pourrais vraiment pardonner à Alex pour tout le mal qu'il avait pu te faire cette dernière année? On dit que ce sont ceux que nous aimons le plus que nous font le plus mal. C'était si vrai. Elios t'avait brisé au point que tu te demandais encore si tu savais faire confiance à un homme. Alex t'avait déçu jusqu'a un point de non retour. Après que Wyatt soit retourné à l'intérieur, t'avais envie d'attendre Seth, surtout que tu n'avais aucune envie de retourner à la table encore. Donc tu attendais, toujours assise sur le petit muret près de l'entrée, cigarette entre tes lèvres pour t'occuper en attendant.

Le bal. Comme si j'avais vraiment envie d'y aller. J'avais accepté d'accompagner Feldt, au moins ça lui changerait un peut les idées. Pourtant je ne me sentais pas à ma place, au milieu de tous ces faux semblants, des gens qui faisaient genre. Que du faux, des paillettes et rien d'autres. Si c'était ça la vie qui m'attendait une fois diplômé d'Harvard, non merci. Je préférais encore vivre comme un vagabond, quitte à me mettre mes parents à dos, peu importe. Une Caerdydd au masculin. Pourtant je n'avais pas envie de ressembler non plus à ça. Ca faisait pitié : je préférais encore être celui qui a pitié que celui dont on a pitié. Quoiqu'il en soit, il s'agissait de la soirée où il fallait rentrer dans le moule, peu importe les conséquences, et peu importe la manière dont les choses tourneraient. J'étais parti en retard au bal et le fait que Feldt m'envoie un message pour me dire qu'elle m'attendait ne me fit pas pour autant accélérer le pas. Pourquoi j'avais accepté d'accompagner cette fille déjà ? J'me rappelais même plus. Arrivé sur les lieux, je passais à travers les étudiants, sans chercher à saluer qui que ce soit et j'allais à l'extérieur. Elle attendait sur un muret, une cigarette entre les lèvre, un fin filet de fumée s'y échappant. Je m'avançais et m'arrêtais à sa hauteur. Je baissais seulement les yeux sur elle, sans dire quoique ce soit pendant quelques secondes. T'as une sale tête. Ma mauvaise humeur se ressent ? Non, sans blague.

L'hypocrisie qui régnait sur ce campus te donnait presque envie de vomir. C'était tellement incroyable de voir ces gens avec leur faux sourire, avec leur semblant de sentiments, mais au fond, tout le monde parle mal dans le dos de tout le monde. C'est bien la nature humaine que de prétendre. Alors qu'est-ce que tu foutais là? Tu prétendais bien aussi d'avoir envie de ce genre de festivité, alors que t'avais pas envie de t'amuser ce soir. Peut-être que tu partirais tot ce soir, de rater la cérémonie des prix. Ca t'évitera d'entendre les critiques de ceux de ta table. Cela te dérangeait pas de critiquer mais tu savais déjà dans quel direction cela allait prendre et tu n'avais pas envie de les entendre. Foutu jeunesse. Ca te faisait rire, tu préférais autant de détruire avec la cigarette que tu avais entre tes lèvres. Tu te faisais pitié avec. T'avais réussi a arrêter pour 9 mois et au premier accident, au premier gros problème, t'as resombré dedans. Bravo, c'est tout ce que tu avais a dire. Tu voyais quelqu'un arriver dedans toi. Relevant le regard tu vis Seth avec ses merveilleuses répliques. "J'prend ça pour un compliment venant de toi." Rétorquais-tu.

La réponse de Feldt s'était faite aussi tranchante que la phrase que je lui avais lâchée. De toute manière, si je n'avais vraiment pas voulu me mêler à tous les autres, je n'aurais pas dû venir. Mais étant donné que j'avais promis ... une promesse est une promesse. Je mettais mes mains dans mes poches sans lâcher Feldt du regard. Pourquoi t'es ici ? Juste parce que tu fumes ou que l'ambiance est trop à chier à l'intérieur ? dis-je sans relever sa remarque. Non, elle n'avait pas une sale tête à proprement parler mais la cigarette gâchait tout chez cette fille. Déjà qu'elle parle pas comme une princesse, la clope venait parfaire le cliché. Je n'osais même pas imaginer le nombre de personnes, ça devait grouiller de tous les côtés. Il y avait déjà pas mal de monde autour de nous mais j'étais sûr que ce n'était même pas cinq pour cent des personnes présentes. Pourquoi tu voulais aller au bal d'ailleurs ? C'est un truc de confrérie non ? balançais-je pour la taquiner. Après tout, c'était vrai. Les dunsters avaient réussi à imposer le thème de leur bal alors que les students n'avaient rien proposé. Autant jouer sur l'incohérence de sa position. Je sortis à mon tour le paquet de cigarette que j'avais dans mon manteau d'été - oui puis qu’inutile de préciser que je ne m'étais pas vraiment habillé en conséquence.

Ah ce Seth, il avait toujours ce même charme. Qu'est-ce que tu foutais avec lui sérieusement? Très bonne question. T'aurais pu venir toute seule aussi, cela n'aurait absolument rien changé à la soirée. Peut-être parce qu'il te servira de distractions. Surement, y a pas d'autres explications de pourquoi de tout les mecs t'as choisi lui comme cavalier. "Non l'ambiance est tellement géniale que je me sentais obligée de faire un grand sourire à toutes les personnes que j'pouvais voir." Dis-tu rempli d'ironie. Peut-être que l'ambiance était bien et il devait y avoir un tas de gens qui s'amusait comme pas possible, mais pas toi. T'étais pas d'humeurs à faire sourire, à t'amuser, non pas ce soir. Il te demandait alors ce que tu foutais là. Pourquoi venir au bal? Très bonne questions. Tu osais les épaules, crachant la fumée que tu venais d'inhaler. "Parce que j'pensais qu'une certaine personne allait comprendre à quel point il m'a fait mal mais visiblement, c'est un connard de première comme la moitié des mecs de cette fac." Il commençait à parler des dunster. Ô quelle mauvaise idée sachant à quel point, tu tenais cette confrérie à coeur et que la seule chose qu'ils savaient faire c'était piqué. "Tu devrais être content non? Les winthrops sont si proche de cette confrérie de copieurs dont les chefs ne savaient rien faire d'autres que prendre ce qui ne leur appartient pas." Tiens c'est pour toi sale connasse de vice-présidente dunster qui avait détruit ta vie pour son pure plaisir. Tu le voyais sortir son paquet de clope, remarquant que niveau vestimentaire il n'avait rien fait. "Ton seul effort c'est d'être venu je présume?" Lui sortis-tu alors.

Les gens autour de nous devaient certainement nous dévisager. Peut-être déjà parce que je ne trainais jamais avec Feldt d'habitude et que le fait de la retrouver au bal pouvait paraitre étrange, mais aussi parce que je devais faire tâche parmi les autres. Peu importe, je n'étais pas non plus habillé comme un sac, j’avais seulement esquivé le dress code. J'allumais ma cigarette en écoutant Feldt me raconter ses déboires avec les mecs de l'université, sans rien rajouter. Je ne pouvais m'empêcher de penser que si une personne souffre c'est en partie parce qu'elle l'a aussi cherché, que ce soit en amour ou en amitié. Ah t'es le genre de fille à penser que tout les mecs sont des connards donc ? Ceci dit, ça s'accorde bien avec ton discours du bar, dis-je en détournant le regard, allumant simultanément ma cigarette avant de laisser échapper un long filet de fumée d'entre mes lèvres. De toute manière, ça m'est bien égal je ne fais plus partie de la winthrop house. Toi qui disais que les confréries ne t'intéressait pas, au final c'est juste parce que tu as été blessée par certaines personnes, pas parce que le système ne te plaît pas. Tu sais que c'est gamin comme réaction ? demandais-je en toute franchise en reposant mon regard sur le visage de Feldt, qui était éclairé par les nombreux lampadaires autour de nous. Pourquoi est-ce que je devais l'accompagner déjà ? Non parce que putain, quel caractère elle a, celle-là. Ca m'amuse pas ce genre d'événement, et j'ai pas de fric à dépenser dans un costard que je mettrais qu'une fois dans ma vie.

Tu n'étais pas capable de mettre ta rancune de cote parce que pour toi, si tu la mettais de coter tu ne laisserai que la douleur revenir d'aussi tôt. Tu n'aimais pas souffrir, du moins, tu en avais marre d'avoir mal. T'avais envie de t'amuser, de profiter de ta vie, de tes enfants, de tes études et tu ne voulais pas t'enfoncer encore plus dans les maux de cette société cassée. "Non, je ne leur fais pas confiance. Mais, en effet, cela explique ce que je disais au bar." Tu t'étais jurée de ne jamais aimer, de ne jamais t'attacher sentimentalement à quelqu'un parce que tu savais que la douleur de la trahison ferait trop mal. Pourtant Wyatt et Elios avaient réussi à t'atteindre là où tu ne pensais pas que cela était possible jusqu'a complètement te briser et cette douleur tu ne voulais plus jamais avoir à la subir. Qu'il te dise qu'il ne faisait plus partie des winthrop te surprit un peu. Il aurait été parfait pour la confrérie. "T'as raté ton bizutage pour que tu n'y es plus. Tu allais tellement bien avec l'image du parfait winthrop arrogant." Lui répondais-tu avec un peu de sournois. Tu inspira alors une nouvelle fois sur ta clope, expirant la fumée avant de lui répondre. "Ce n'était pas une question d'avoir été blessé ou non, mais je n'appartenais plus à mon ancienne confrérie et je me vois pas faire l'hypocrite pendant un an à sourire à tout le monde. Tout comme j'ai pas l'intention de faire mon hypocrite dans cette salle et de passer une bonne soirée alors que j'ai pas envie d'y être." Finis-tu pointant alors la salle de ton doigts. Tu ne sais pas si tu allais y retourner. Peut-être pour aller chercher quelque chose à boire, histoire de bien se saouler un peu, ca pourrait surement détendre ta mauvaise humeur. "C'est toujours bien d'avoir un costume tu sais?" Bon, fallait pas se mentir, tu pouvais te permettre d'acheter une robe pour l'occasion, mais tu recyclais aussi pas mal et la robe blanche que tu portais ce soir allait surement servir pour un autre gala.

Continuant à fumer ma cigarette, je croisais le regard d'autres personnes, des personnes sans importances, comme la plupart des gens qui pensaient que ce soir allait être la soirée de leur vie. Je me demandais si Despe y était. Je ne savais même pas si elle avait un cavalier ou quoi. A vrai dire, à cause des révisions, je m'étais éloigné de tout le monde et rapproché de personnes inhabituelles, comme Feldt. Je n'arrivais toujours pas à comprendre comment j'en étais arrivé à l'accompagner au bal. A quel moment avais-je pu faillir pour dire oui ? Quand elle avait posé ses yeux en amandes sur moi ? Quand j'avais senti son parfum fruité ou encore quand elle avait joué avec une mèche de ses cheveux ? Au moins, c'était sûr que ce n'était pas lorsqu'elle se mettait à parler des autres comme des sous-merdes. Elle me rappelle les eliots quand elle parle de cette manière, et le pire, c'est que je suis certain qu'elle ne s'en rend pas compte. Evidemment, dès qu'elle en avait l'occasion, elle me descendait à nouveau, une pique par-ci, une pique par-là. Un vrai jeu, un jeu d'auto satisfaction. Tu vas gagner un jouet à chaque fois que tu clashes quelqu'un ? Ouais, c'est le genre de truc que j'aurais rêvé de lui balancer et qui à coup sûr, soit l'aurait réduit au silence, soit l'aurait faite sortir de ses gonds. Qu'est-ce que j'étais moi ? Elle m'avait pris pour son confident la meuf ? Je venais l'accompagner au bal, that's all. Tu sais quoi ? Je t'emmerde Feldt. J'emmerde ta bêtise, dis-je calmement en croisant à nouveau son regard. Tu penses que je suis trop con pour passer un bizutage ? Tu crois que tu es là seule à avoir le droit à ne pas te sentir à ta place dans une confrérie ? T'es pas le centre du monde, ni une référence, ou peut-être que tu l'es dans le tien. Ouvre les yeux, c'est pas en te comportant de cette manière avec les gens que tu te sentiras à l'aise, par exemple à ce genre d'événement. Je comprenais absolument pas pourquoi elle passait son temps à se plaindre. Pourquoi n'était-elle pas restée chez elle, hein ? Franchement si c'est pour tenir ce genre de discours j'aurais pu très bien ne pas venir. Tu t'es engueulée avec deux ou trois personnes ? C'est ça ? Et ça te suffit pour tirer la tronche vingt quatre heure sur vingt quatre ? Non parce que j'crois que je t'ai jamais vu sourire. Une fois à tout casser et encore je suis pas sûr. J'te signale qu'y'a plusieurs milliers de personnes à ce bal, t'es pas obligée de rester avec des gens qui t'emmerdent. Ca me gonflait. Elle prenait ses airs, comme si elle avait tout vu de la vie, qu'elle connaissait tout le monde, et ça me gonflait. Elle qui me reprochait mes préjugés sur la petite femme parfaite américaine, elle m'en sortait des plus énormes sur les mecs. J'ai pas de fric à claquer là-dedans, dis-je pour clore la discussion concernant ma tenue. Elle voulait se la jouer tu m'acceptes comme je suis sinon, ciao, ben ça allait être la même pour moi et j'allais rentrer dans son jeu sans prendre de pincettes. Je passais ma main dans mes cheveux en me tournant, pour me mettre de dos à Feldt. Je posais deux doigts sur l'arête de mon nez et tentait de calmer ma respiration. Putain, mais quelle chieuse celle-là, dans quel bordel je m'étais foutu avec elle ?

T'en avais marre, marre des gens qui prétendaient savoir comment tu te sentais, qui prétendaient savoir qui tu etais alors qu'au fond, ils ne savaient rien. Oui, tu avais un caractère de merde, tu l'assumais, mais tu avais aussi bien trop souffert dans ta vie pour que tu pretendre que tu allais bien. Tu n'etais pas le genre de fille a te cacher derriere une facade, tu preferais te montrer comme tu etais et cette personne qui resortait ce soir, c'etait toi quand tu etais blessée. Tu extorisais ta douleur, ta colere, ta haine. Et la ce qu'il te disait, ca te donnait envie de lui en faire une. Tu le connaissais meme pas, tu l'avais juste rencontré et il te faisait chier comme pas possible a te dire ce genre de propos. Tu essayais de rester calme, de pas craquer mais tu pouvais sentir la cigarette froissée sous tes doigts, la cendre doucement te bruler alors que tu la jetais par terre. Tu restais calme, du moins, tu l'essayais, mais plus il parlait, plus t'avais envie de lui en foutre une. Tu finis par passer ta main dans tes cheveux essayant de ne pas defaire ta coiffure completement. "Tu veux me juger encore une fois? C'est la seule chose que tu sais faire avec moi? Me juger? Croire que tu sais ce que je pense? Tu penses avoir le droit de me dire ce que j'sais pas deja? J'sais bien que j'peux clairement être une conasse quand je le veux, mais je te rabâche pas a la figure tout tes defauts alors que je te connais meme pas vraiment. T'sais quoi? Va te faire foutre! Si t'avais pas envie d'etre la pourquoi tu m'as dis oui alors? J'passais une relativement bonne soirée jusqu'a ce que tu pointes ton nez." Non tu comprenais pas. T'osais la voix et certains gens s'arretaient pour vous regarder mais bon, au temps faire une scene, c'est pas comme si une bagarre ne devait pas se passer a l'interieur. Toujours la meme chose au bal.

Sa manière d'être, de se montrer, de se tenir, ces lèvres qui ne s'étiraient jamais pour sourire et ce regard dur, tout semblait être fait pour avoir Feldt dans le collimateur. Alors c'était un dû qu'on vienne lui parler ? Dès qu'on lui dit une chose, elle se sent agressée, ça, j'ai bien vu. Elle ne s'arrêtait pas de parler alors que j'avais fermé les yeux, que j'essayais de faire le vide dans ma tête. Dans quelle situation je m'étais foutu sérieusement ? Elle avait raison après tout : qui étais-je pour lui balancer en pleine face la première impression qu'elle donnait à un inconnu. En un instant, tout devint clair, ou du moins plus ou moins. J'avais compris comment j'en étais arrivé là et pourquoi, malgré ce caractère, je passais au-dessus et utilisais tous ces mots. Elle me rappelait cette fille, elle. Celle pour qui j'aurais donné ma vie et qui m'avait tenu le même genre de discours. Celle avec qui j'avais eu l'impression d'avoir échoué, que j'avais vu sombrer, impuissant. Celle pour qui j'aurais été prêt à vendre père et mère si j'avais pu remonter le temps, ne serait-ce que de quelques années. Est-ce que ça veut dire que je suis faible ? Ou est-ce que ça veut dire que je souhaite épargner à une inconnue le sort qu'a subi Caerdydd ? T'as raison, j'me tire, lâchais-je de manière presque inaudible sans me retourner. J'ai bien mis quelques secondes qui me parurent des minutes à faire le premier pas pour partir mais je l'ai fait. Je commençais tout juste à réaliser ce que j'étais en train de faire avec Feldt. Moi qui m'étais promis de prendre la distance avec ce qui me faisait penser de près ou de loin à mon passé, j'avais lamentablement échoué. J'avais la rage, j'étais écœuré, j'avais envie de pleurer et de crier s'il le fallait. Je n'en pouvais juste plus de voir trainer autour de moi le souvenir de cette fille.