Alejandro se regardait une dernière fois dans le miroir. Il était relativement bien coiffé, mais avec le style qui est le sien, pas de coiffure léchée ce soir. L'Espagnol avait opté pour une tenue classique: chemise blanche, un veston bien découpé, une paire de pantalon agencé avec le tout et des chaussures en cuir espagnol, couronné bien sûr pas sa plus belle montre et un petit bracelet à son autre poignet, c'était le bracelet qui supportait les Anciens Combattants, soirée caritative à laquelle il allait. Soirée à laquelle il n'allait pas seul d'ailleurs, puisqu'il comptait y aller avec Jales. Il y a une poignée de journées, Alejandro avait appelé la demoiselle en question pour savoir si l'accompagner à la soirée l'intéressait toujours, à quelle heure il pourrait passer la chercher, etc.

Ce soir, il n'était pas question qu'il conduit, il avait fait appel au service d'une limousine, rien de moins. En fait, c'était une cadillac berline, une voiture à quatre portes et avec à peu près autant de places, noir bien sûr, pour faire distingué, avec le chauffeur bien habillé pour l'occasion. Pas question de faire les choses à moitié! La limousine arriva à l'heure, mais Alejandro en revanche ne fut pas près encore avant un bon cinq-six minutes. C'est donc avec quelques minutes de retard qu'il arriva à la maison Cabot. Par-dessus son veston et tout, il arborait un grand manteau noir, à cause de l'hiver bien sûr. Apercevant Jales, Alejandro eut un sourire. Le chauffeur allait sortir, mais le jeune homme lui dit d'attendre à l'intérieur et sortit pour accueillir la demoiselle.

-Buenas Tardes Jales. Oh, woah, qué bella, tu es ravissante, vraiment.

Le jeune homme s'approchait d'ailleurs pour lui faire la bise, avec une chaleur toute espagnole, avant de lui prendre doucement la main et d'ouvrir la porte de la voiture, l'invitant à y prendre place, en toute politesse. Puis, le jeune homme suivait derrière et fermait la porte, avant de donner la destination au chauffeur. Direction, Boston à nouveau, puisque c'est de là qu'ils arrivaient.

-Comment tu vas? Tu n'as pas eu trop de difficulté pour la robe?

De son côté, ce n'était pas un problème bien sûr. Il regardait encore un peu Jales, sourire sur les lèvres, avant de reporter son attention devant lui. Sur le chemin, en plus de la petite conversation de base, Alejandro résumait à sa cavalière où et en quoi consiste la soirée à laquelle ils vont. Ils vont à Boston, au Boston Navy Yard, sorte de musée maritime où ils ont une salle de réception. Il confie n'y avoir jamais été. La soiré est pour honorer un programme qui vient en aide aux blessés de guerre et à leur famille. Le grand-père d'Alejandro supporte un programme semblable espagnol, alors le jeune homme y va comme le représentant de sa famille, Jales représentera la sienne par la même occasion. Il y aura sans doute un buffet, du champagne et une petite allocution de la part d'un porte-parole, un truc du genre pour tous les remercier. Alejandro annonçait d'avance que ce ne serait pas comme une soirée en boîte.

Après près de une demi-heure de route, la limousine arrive à destination et ils n'étaient pas les seuls en belle voiture dans le coin. Le tapis était déroulé, il y avait une petite haie d'honneur formé de militaires, des généraux passaient, des hommes en vestons, les dames presque toutes en robe. Alejandro sortit le premier, puis tendit la main à sa cavalière comme pour l'aider à sortir. On ne tarda pas à les accueillir et à les départir de leur manteau une fois à l'intérieur.

-Ça va? Tu ne te sens pas trop dépaysé?

Spoiler:

Jales-Suelen est une réelle beauté, cela, Alejandro l'avait deviné tout de suite, une beauté avec du caractère aussi, comme elle lui en avait fait la démonstration à la bibliothèque, ce qui n'est pas pour lui déplaire non plus. Ce fut un plaisir de faire la bise à la jolie jeune femme. D'où il vient, on apprécie beaucoup la beauté, mais aussi, le fait d'être bien arrangé. En robe, elle avait l'air d'une vraie princesse la Cendrillon des Silver. Cendrillon qui lui retournait d'ailleurs le compliment avec une sorte d'euphémisme. Alejandro répondait avec un sourire tout en modestie.

-J'ai fait de mon mieux.

Une fois dans la voiture, Jales avouait sa nervosité, ce qui faisait sourire Alejandro. Il était content de la voir sincère et d'admettre son degré d'appréhension plutôt que de tout intérioriser, c'est bien pour cela qu'il l'avait invité à cette soirée, en partie du moins, l'aider à plonger dans ce monde où elle sera probablement plus à l'aise qu'elle ne le croit.

-Quelque chose me dit qu'elle te va mieux qu'au mannequin. Tu lui donnes beaucoup de vie.

Elle ferait mieux de s'habituer au compliment de l'Espagnol, qui n'est pas en reste de ce côté. Il a un petit côté poète en prime. Après quoi, ils arrivent à la soirée, une soirée à l'allure familière et habituelle pour Alejandro, mais voir le regard d'émerveillement de Jales valait la peine de l'avoir invité, puis, de voir la jeune femme si sûre d'elle en boîte, par exemple, se faire toute petite ici. Allons, tête haute demoiselle, elle n'a rien à envier aux femmes ici. Comme elle se rapprochait pour lui murmurer à l'oreille, il passait son bras autour de la taille et répondait de la même façon, à son oreille:

-Pas d'un centimètre, je te le promets. Gardes la tête haute. Tu es tel un jeune soleil qui entre dans le système. Les autres ne feront que graviter autour de toi.

Il lui donnait alors un bisou sur la joue. Puis, comme il passait près d'un serveur avec un plateau qui offrait du champagne, Alejandro prit deux coupes et en tendit une à Jales. Avec un sourire amusé, il dit alors:

-C'est du courage pétillant.

"Tchin" et il prit une petite gorgée. Pas mal, mais peu probable que ce soit du vrai champagne de France... au goût, c'est ce qu'il estimait, ce qui provoqua chez lui un petit "hum...". Puis, quelqu'un venait à leur rencontre, visiblement un homme âgé, d'origines latines, avec son épouse.

« Alejandro Ortega. Content de vous voir parmi nous. »

-Moi de même, excusez cependant ma mémoire qui n'oublie que trop même les visages les plus marquants, vous êtes?

« Sergio Marchionne, PDG de Chrysler USA »

-Ah si! Cela me revient maintenant. Pardonnez moi.

Alejandro lance quelques mots d'Italien, qui font rire le couple, puis, repassait à l'anglais, tandis que Sergio présentait son épouse et qu'Alejandro lui lançait un sourire plein de charme et venait lui faire la bise, avant de présenter Jales.

-Je vous présente mon amie qui a eu la gentillesse de m'accompagner à cette soirée, Jales-Suelen Silver. Attention, n'essayez pas de l'impressionner, elle étudie la psychologie à Harvard.

Le jeune homme guetta alors la réaction de sa cavalière, un doux sourire sur les lèvres, avant d'entendre la femme de Sergio dire ceci:

« Regrettez-vous votre décision mademoiselle? »

Réponse de Jales et peu après, Sergio s'excusait et filait avec sa femme aller discuter avec d'autres gens, ce qui les laissait à nouveau tranquille. Alejandro suivit des yeux le Sergio, puis fit un petit signe de tête à Jales pour se rapprocher de la vitre et de la vue sur la baie. Ils étaient plus tranquilles à cet endroit.

-Mon grand-père et Sergio ont eu une petite bisbille en affaire, mais les deux hommes se respectent beaucoup.

Alejandro eut un léger rire, plutôt amusé par la remarque de Jales. Magnifique? Oui, il a le même qualificatif en tête, non seulement quand il regarde la robe, mais quand il la regarde comme. Ainsi, il eut ce regard vers la jeune femme, accompagnant un sourire plus timide après, comme s'il craignait qu'elle ne remarque qu'il la détaillait du regard, qu'il n'avait simplement pas pu s'en empêcher.

Lorsque Jales lui demanda, une fois à la soirée, s'il n'était pas poète dans une vie antérieure, le jeune homme eut un léger sourire au coin des lèvres et répondit, de manière normale cette fois et non pas à l'oreille de la belle blonde.

-Je lis beaucoup et j'ai une bonne mémoire.

En droit, on n'a pas le choix de lire, mais par lecture, il entendait aussi des romans ou des livres plus substantiels. Il avait plusieurs auteurs espagnols ou du monde latin qui lui était cher, comme Paul Coehlo entre autre. Il pouvait aussi lire des livres comme "L'amour au temps du choléra" et disons qu'il pouvait retenir de belles phrases et s'en inspirer.

Chose certaine, le champagne est toujours le bienvenue. L'alcool aide à se détendre, à passer le temps aussi si on s'ennuie un brin. Jales soulignait qu'il lui en faudrait plusieurs, ce qui fit sourire le jeune homme. Allons, elle se débrouillait bien. Bon d'accord, elle attirait beaucoup les regards, pour deux raisons évidentes, trois peut-être même. D'abord, elle est nouvelle dans ce cercle, tout comme Alejandro d'ailleurs, qui a par contre un nom très connu du milieu. Ensuite, elle est belle et enfin, justement, le fait qu'elle soit au bras du jeune Ortega ne doit pas passer inaperçu.

D'ailleurs, le grand patron de Chrysler et Fiat en Amérique du Nord venait les saluer. Jales était tranquille, quoique timide quand il vint le temps de saluer les gens, normal quoi. Cependant, elle se reprit avec un beau sourire et une remarque assez bien placé. Puis, la dame lançait une question à la jolie blonde. Un moyen de la déstabiliser, de la tester? Allez savoir! Il y a quelques prédateurs redoutables ici. La réponse de Jales fit sourire Alejandro. Une fois qu'ils se retrouvèrent seuls, l'Espagnol put percevoir le soulagement que la blonde semblait ressentir. Pourtant, elle s'était tout de même bien comportée somme toute. Près de cette fenêtre à la vue intéressante, il trouvait encore plus intéressant de regarder Jales lui partager ses impressions jusqu'ici sur la soirée.

-Je sais... C'est normal. Dis-toi qu'il vaut mieux passer à l'infrarouge que de susciter de l'indifférence. Je t'avais prévenu que tu allais briller, bon gré, malgré.

Alejandro lui avait dit et savait qu'en amenant avec lui Jales, il n'allait pas passer inaperçu, elle non plus par la même occasion. Puis, il se fit rassurant, essayait du moins, posant sur main l'épaule de la blonde.

-Ne t'en fais pas, on s'habitue et puis, après un certain temps, on suscite moins de curiosité, mais non moins d'intérêt. Mais je ne t'apprends rien, la psychologie n'a pas de secret pour toi, après tout.

Lui faisait-il remarquer avec un certain amusement. Puis, aux questions qu'elle posait, il prenait une énième gorgée de champagne et prenait le temps de l'avaler, la faisant rouler en bouche, avant de répondre.

-Personne de ma famille n'est ici. Ma famille supporte une fondation pour les vétérans d'Espagne et nous avons fait la guerre aux côtés des Américains en Irak, nous aussi, le terrorisme nous a frappé. Je suis ici par solidarité en quelque sorte. Pour te répondre... si, je représente ma famille et peut-être aussi cette Espagne qui n'oublie pas ses amis.

Puis, à ce que Jales lui demandait, Alejandro ne put pas s'empêcher de rire un peu, puis d'acquiescer.

-Bien sûr, je connais un endroit où on pourra boire en toute tranquillité, un bar lounge, ça te va?

Alejandro repérait les musiciens militaires qui jouait de la musique jazzé, d'orchestre big band. Alors il fit un petit signe de main à un serveur et déposa sa coupe vide sur le plateau, invitant Jales à faire de même. Puis, le jeune homme lançait cette invitation.

-En attendant, tu viens danser?

Ce ne sera pas comme danser dans un club par contre. Le bras autour de la taille, dansant une sorte de slow, ce ne sera pas moins agréable, pensa-t-il.

Jales-Suelen prenait un peu mal l'attention qu'elle recevait ici, la faute au fait qu'elle n'en avait pas trop l'habitude. Alejandro trouvait cela mignon. La modestie est une qualité en soi, si elle s'était pavanée comme une fausse étoile, cela aurait sonné faux. Elle était restée naturelle.

-Je te regarde et je ne vois rien de mauvais, Jales.

Elle devait se détendre un peu, ce ne sont que des regards après tout, il faut laisser courir. Puis, l'Espagnol eut un sourire amusé en entendant sa cavalière suggérer qu'elle pourrait leur donner sa robe si cela pouvait faire en sorte qu'elle soit tranquille. Allons... Puis, Alejandro expliqua la raison de sa présence, qui était appréciée de la blonde. Les Américains sont renommées pour leur patriotisme. Les drapeaux, c'est un peu leur point faible et le jeune homme eut un sourire en coin. Jales découvrirait par elle-même qu'Alejandro n'est pas fait du même bois que la majorité des hommes.

-J'essaie juste... d'être à la hauteur de la chance que j'ai. En bonne compagnie, si possible.

Ajoutait-il avec un sourire charmant. Puis, ce fut entendu, après cette petite soirée, ils iraient prendre un verre dans un lounge de Boston, le genre d'endroit où les gens de biens traînent. Comme il l'emmenait sur le plancher de danse et commençait à danser doucement, Jales lui rappelait une bêtise qu'il avait dit. Sa main dans le dos de la belle pressa un peu pour qu'elle se rapproche.

-Rancunière ou possédant une bonne mémoire?

Les deux peut-être. Après la réponse à sa question, il répondait à celle de son invitée.

-Ne m'en veux pas, mais je trouve que les Américaines dansent un peu trop... Je ne sais pas comment t'expliquer. Vous ne vous abandonnez pas assez. La danse, c'est de corps et d'esprit. Il faut s'abandonner au rythme, se laisser aller, se détendre, mais aussi, fusionner avec son partenaire, ne faire qu'un... Mais vous avez cette retenue qui vous honorent. Par contre, je vais te dire un secret: l'autre soir en boîte, retenue ou pas, tu m'as donné chaud.

Et cela n'était pas donné à toutes les filles. Par contre, Alejandro prit doucement les mains de Jales. Il en gardait une dans la sienne, le bras tendu, posait l'autre dans sa taille. Elle avait eu le réflexe de se placer comme on danse au collège ou en boîte, mais ici, c'était un peu plus classieux que cela. Il lui fit un petit sourire, ne lui en voulant pas de la petite faute. La musique s'achève bientôt, ainsi que leur douce danse et les gens applaudissaient doucement, Alejandro y comprit. Puis, il portait son attention sur Jales et prenait sa main, pour l'apporter doucement à ses lèvres et y déposer un baiser.

-Gracias por el baile señorita. Merci pour la danse, Jales.

Il était temps de passer à une autre activité. Alejandro repérait une petite file de gens qui saluait un soldat en chaise roulante, accompagné de ses proches. L'Espagnol fit un petit signe de tête à l'Américaine et ils se mirent en file. Lorsque ce fut leur tour, il poussait un peu Jales, doucement, juste pour qu'elle soit la première à faire un pas, une invitation à ce qu'elle parle la première. Oui, Alejandro venait de s'amuser un peu aux dépens de son invité, mais hey, parions que ce qu'elle dira à cet homme sera tout gentil. Perdre une jambe pour son pied, cela vaut bien un petit effort de la part d'une jolie blonde, non?

Jales-Suelen, avec sa franchise habituelle, lui avouait être un peu rancunière et avoir un peu une bonne mémoire. Quelque chose lui disait que le un peu devait dépendre des situations. Alejandro eut un sourire, puis la conversation se poursuivi et au passage, le cavalier corrigeait la position de sa cavalière, sans lui faire de remarque, puisqu'après tout, c'était sa première soirée du genre, inutile de la critiquer sur tout. Alejandro se permit une petite remarque au commentaire de Jales.

-J'ai du respect aussi.

Pas seulement lorsqu'il danse, si vous voulez son avis. Disons que l'un n'empêche pas l'autre. Puis, un peu plus tard, l'Espagnol avouait qu'elle lui avait donné chaud, ce qui fit sourire Jales, qui gardait cette remarque en tête. Petit sourire en coin, la danse se termine bientôt et au terme de celle-ci, après le geste galant d'Alejandro, la blonde tira une révérence, ce qui le fit sourire, assez pour presque rire, lui jetant un regard qui devait dire: "mais qu'est-ce que tu fais?". Jales avoua alors en avoir toujours rêvé, ce qui était encore plus drôle. Cette fois, il eut un léger rire, puis, prit la main de l'Américaine pour l'entraîner vers un blessé de guerre, de toute évidence. Alejandro laisse alors Jales seule face au jeune homme en chaise roulante et vous savez quoi, elle se débrouilla pas si mal!
Après elle, ce fut son tour.

-C'est un honneur de vous rencontrez monsieur, un honneur.


Répéta-t-il pour accentuer, mais il fut bien plus court que la blonde, c'est certain. Une bonne poignée de main et il était de retour auprès de Jales, qui ne tarda pas à lui faire le reproche. Pour toute réponse, Alejandro déposa un baiser contre la joue de la jeune femme, comme pour se faire pardonner.

-Tu t'es bien débrouillée.

Puis, ils allèrent prendre place à une petite table et Alejandro fit un signe de main à un serveur qui passait non loin et qui vint leur donner deux coupes de champagne. L'Espagnol leva son verre pour porter un toast:

-À ton courage.

Après quoi, il prenait une assez bonne gorgée, avant de reporter son attention sur la belle blonde.