Yohan est drôlement bavard et si des fois j'pouvais avoir envie de l'étouffer avec ses chaussettes, ça m'avait cette fois drôlement aidé, j'en étais même rendu à penser certains moments qu'il ne répondait pas suffisamment vite à mes sms. Ça me changeait les idées sur le trajet disons, surtout que j'avais pris la décision de partir à pieds ; me connaissant, en voiture, j'aurais roulé comme un taré pour passer mes nerfs. J'avais fini par arriver à l'hôtel, songeant un instant à Briony qui dormait ici, elle aussi, mais mes pensées retournèrent bien vite à ma dispute avec Anya. J'avais vraiment la sensation dernièrement que notre amitié ne tenait qu'à un fil, et là, avec les hormones de la grossesse, je me demandais bien comment ça allait pouvoir s'arranger. Elle allait devenir plus sensible dans ses moments doux mais aussi une vraie terreur agressive quand elle serait en colère et ça... j'allais avoir du mal à gérer et je le savais. Même si elle ne pensait pas ce qu'elle pouvait dire et que je ne devais pas le perdre de vue, c'était dur. Grimpant dans l'ascenseur, je rejoignis le bon étage et regardai les numéros de chambre défiler les uns après les autres jusqu'à voir le numéro 17. Je m'y arrêtai et toquai, entrant dans la chambre sans prendre la peine de l'attendre. J'suis trop soutenu pour avoir de la bière chez moi alors j'ai pris du scotch. J'eus un léger rire et refermai la porte derrière moi en montrant la bouteille. Ça va, t'as pas trop mal rangé ton bordel pour un mec qu'a fait ça en dix minutes, j'admire !

Ces nuits ou vous avez une envie irrépressible de chanter un truc dépressif sur votre balcon en attendant, espérant même, qu’un truc se passe et que vous tombiez… Simplement parce que vous n’avez pas la force de le faire vous-même. Ces nuits ou vous avez le cran de gueuler en plein milieu du hall de l’hôtel, honnêtement et sans retenue «ma vie c’est d’la putain d’merde!», vous les connaissez? Moi oui. Enfin… peut-être pas tant que ça, mais le truc du balcon, ça m’est arrivé! Si si, c’est vrai! En attendant, Andy, lui, devait certainement avoir un de ces coups de blues. Il était mon pote et pour une fois, je comptais bien faire ce qu’on attendait de moi : aider mon pote a mieux ce sentir.

Donc il était maintenant en chemin pour venir ici, et moi, j’faisais ce pourquoi j’étais né selon ma mère : nettoyer le bordel innommable qu’est ma chambre. Après avoir foutu TOUT le linge qui trainait par terre, sale ou pas, rien à foutre, il allait être nettoyé, tiens! Les bras pleins, je me mis au travail, retrouvant du fait même mon plus beau t-shirt mais me rendant compte que la majorité de mes paires de chaussettes n’étaient plus vraiment des paires. Boarf. Pas grave.
Andy. Lui, c’était mon meilleur pote sans partage. Il m’avait vu renvoyer dans les fêtes les plus folles , m’avais vu comme j’étais vraiment face a mon père et m’avait toujours soutenu. L’aider a surmonter ça ou ne serait-ce qu’engourdir la blessure était vraiment le moins que je puisse faire pour lui.
Je foutais les derniers sous-vêtements dans le gros sac –pour le lavage- quand je l’entendis toquer et entrer.

«Yoooo!»

 Je me dirigeai vers l’entrée.  Le mot «scotch» attira mon attention dans sa phrase.  Sourire et rire complice. Ça, c’est mon Andy! La blague qui suivit sur mon bordel était comme une habitude. Enfin, soyons sérieux, qui ne mentionnerait pas le dépotoir qui s’offrait a eux en entrant ici?! Mais bon, j’imagine même pas comment le pauvre Andy devait être désorienté! Plus un truc qui traîne! … Ou presque. Enfin, y’avait encore deux-trois canettes de Sprite sur la table de salon et un bol qui, un jour, avait contenu des céréales. Mais ça, c’était jadis!

«Ouais! Admire! C’est bien parce que c’est toi que j’me suis donné autant d’peine!»

Je désignai sur ces sages paroles l’espace qu’il y avait soudainement dans cette vaste pièce en ricanant, reportant ensuite mon attention sur la bouteille.

«Oohh pas mal! Mets-la dans le réfrigérateur!»

Putain, un jour faudrait m'expliquer POURQUOIII Ô grand pourquoi j'avais cette fâcheuse manie de me prendre la tête pour des broutilles, pourquoi j'étais du genre à penser trop et je ne parlais même pas de mes insomnies... Quand tout le monde dormait, je n'avais plus que moi en général et à ce moment-là, outch. Je remets toute ma vie en question presque tous les soirs et c'en était fatigant. Là, je n'avais plus envie de penser, de me prendre la tête, je ne voulais plus penser à Anya qui m'avait déçu... J'voualsi décompresser, dire des conneries et boire avec Yohan. Rien d'autre. Arrivé devant la porte de sa chambre, j'entrai sans attendre son autorisation et me regardant parcourut rapidement la chambre. Wah, quel changement, on aurait dit que... que ce n'était pas la sienne tout simplement. où étaient les chaussettes, les piles de magazines de jeux vidéos et de high tech et... C'est moi, ou son lit était (presque) fait pour ce que j'apercevais dans l'embrasure de la porte ? Je reportai mon attention sur mon best friend quand il me répondit et fronçai les sourcils, l'air le plus sérieux du monde. Qu'avez-vous fait de Yohan ? J'veux savoir, tout d'suite ! Puis dans un rire, je refermai la porte et m'exécutai en allant mettre le whisky au réfrigérateur. Ça m'touche que t'ais fait ça pour moi ! Avoue tu as payé la femme de ménage pour qu'elle vienne te filer un coup de main ? Bon et puis ça va, son spray parfumé ne sentait pas les chiottes (aa). Je le rejoignis de nouveau en m'étirant, un sourire aux lèvres. Alors dis-moi, c'est quoi le programme ?

Andy n'allait pas bien ces derniers temps. Je le voyais dans ses yeux, que ça soit par les cernes qui les entouraient ou par le regard qu'il arborait. Or après plusieurs années je commençais à au moins un peu comprendre son raisonnement. Moi et lui avions les mêmes fonctionnements, les mêmes mécanismes de défense. J'avais pas besoin de voir la bouteille de scotch qu'il s'était ramené pour savoir que ce qu'il espérait de cette soirée, c'était de boir et oublier toute la merde qu'il endurait, voir oublier qu'il est venu ici le lendemain. Alors que certains croirait que noyer ces problèmes, c'est pas bien, moi j'étais son pote, et j'allais l'y aider. J'avais pas envie de le voir déprimer, il méritait mieux! En plus, c'était assez marrant une fois tout les deux bourrés!

Sa réponse me fît marrer. Enfin, intérieurement. Alors qu'il me regardait d'un air sérieux et me disait ça, je lui offris un p'tit sourire complice avant de répondre :

«Il à disparu avec son bordel, et t'es le prochain!»

Je ne tint pas plus longtemps mon sérieux que lui, rigolant un coup. Alors qu'il allait porter la bouteille au réfrigérateur, j'allai vers la télévision – et la xbox- regarder ce qui pouvait être intéréssant parmi mes dizaines de jeux. OUAIS bon okay j'en étais fier, de ma collection! J'entendis la voix de Andy un peu plus loin. Ça l'touche? Tant que ça? Bon bah pour Noël j'viendrai faire le ménage chez lui, tiens!

«Cette vieille mexiquaine folle? J'la laisse pas entrer, elle va me foutre un de ces bordels... Nan mais pour que MOI j'abandonne une partie de Halo sans sauvegarder pour me mettre à ranger, faut qu'tu sois important, hein!»

Alors alors... Continuant de chercher parmi mes nombreux jeux et films, je ne savais plus quoi faire. Tien, un vieux jeu de ps3! Boarf, t'façon, l'est nul, ce jeu. J'en trouvai quelques uns -12, c'est pas tant!- qui se jouaient à deux et qui étaient susceptibles de plaire à Andy. Au même moment, celui-ci me rejoignit, me demandant le programme. Le programme? Une lueur d'arrogance apparu dans mes yeux alors qu'il me demandait ça. Et maintenant, je pouvais lui montrer ma fierté! D'un geste rapide, j'attrapai les 12 jeux et les étalai au sol devant lui en l'espace de quelques secondes. Paf! Haha! J'me sentais soudainement super cool. Pour une fois, j'avais l'impression de réellement maîtriser ce sujet. Levant les yeux vers lui, je lui souris.

«Mis à part la beuverie, t'as choix!»

Quel con ! Yohan était faible, mais moi j'le suis pas alors personne d'autre ne disparaîtra. Sauf toii ptit con qu'a fait disparaître dans la nature le fou qui m'sert d'ami d'enfance. J'allais faire comme dans les films, me transformer en psychopathe fou et lui découper la boîte crânienne pour le "réparer" mouahahah. Depuis la cuisine, je l'entendis me répondre que la femme de ménage était une mexicaine folle, si bien que je m'esclaffai avant de lui répondre. Folle ? Mais non elle est pas folle, doit y avoir une explication logique, chuis sûr que c'est parce qu'elle perd ses moyens devant toi, tu l'intimides ! Tiens une femme de ménage mexicaine quand même.. Alejandro était pas le seul, il avait une amie qui pourrait faire le ménage avec lui, yay ! J'eus un léger rire en revenant dans la pièce principale. T'as vraiment arrêté une partie de Halo sans sauvegarder JUSTE pour moi ? Pinçant les lèvres un instant, je repris en baissant les yeux vers mes pieds. Mes chevilles vont finir par exploser là. Continue de me flatter, j'adore ça. Riant de plus belle, je reportai finalement mon attention sur les jeux qu'il venait d'étaler par terre en me signalant que le programme de la soirée me revenait, concernant les jeux. Je m'agenouillai donc devant tous les jeux en me mordant les lèvres, songeur. Erf, choix compliqué quand même. Y en a pas pour qui t'a des préférences ? Non sérieux, c'est toi l'pro, pas moi ! J'eus un grand sourire amusé en mettant Little Big Planet 2 de côté. Ça déjà, ça va être sympa quand on sera bien allumés. J'allais bader devant mon sackboy, si on avait un coup dans le nez en y jouant, j'étais à peu près certain de me fendre la poire sans arrêt devant ce jeu déjà un peu perché de base, de quoi nous occuper une bonne partie de la soirée même si j'étais certain qu'à cause de moi, on allait foirer tous les niveaux. Un truc qui pourrait nous faire flipper un peu, t'as pas ça en stock ?