Il n’est pas le Marlowe qui devrait être présent à cette soirée. Il le sent, il le sait, Benedikt et il en suffoquerait presque à cet instant, de ne toujours pas être celui qu’ils attendent. Mais en même temps, ses parents en pensent si peu de lui. Il a toujours été l’intrus, l’enfant qui n’aurait pas dû naître et évidemment, ils n’ont pas pu le lui cacher. Pourquoi faire alors que c’est la plus stricte des vérités. Resserrant sa prise sur ses propres mains, ses doigts entremêlés, il lui revient à l’esprit les rires de Fredrick, l’un de ceux, moqueurs, qu’il a toujours adoré lui dédicacer. C’est pour cela en partie, qu’il veut se tirer. Ôter ce costume qui lui sied si mal. Il a tenté pourtant le blond, d’être semblable à son frère ne serait-ce que l’espace d’un court laps de temps, mais c’était déjà trop en demander. Alors, il propose qu’ils se tirent, avant de se confondre en excuses, parce qu’elle peut douter de lui. De ses intentions bien qu’elles ne sont en rien mauvaises dans le fond. Puis, il change de sujet, s’adosse à la rambarde et l’interroge afin de connaître son prénom. Il est d’usage de le demander plus tôt, il croit, mais en même temps, il n’est pas doué pour tout ça. “Je crois que c’est clair.” Le jeune Marlowe rétorque alors sourcils froncés, quand, à la mention de pédigrée, il ne peut s’empêcher d’être surpris. “Junior.” Il prononce après elle puis ajoute : “d’accord.” Benedikt se doute bien que ce n’est pas ainsi que ses parents l’ont prénommé en premier, mais puisqu’elle veut en dire le moins possible, alors soit. “Junior, je suis Benedikt. Je l’ai déjà mentionné et si ses deux vieilles femmes ont de la peine pour moi, c’est parce que mes parents avec mon aîné ont eu un accident de la route. Lui est dans le coma, ma mère ne parle pas. Elle hurle de temps en temps.” Il pousse un soupir. “Quant à notre père, il a été blessé, mais va s’en remettre.” Que dire de plus sur cet accident ? Prétendre avoir préféré être à leur place ne servirait à rien, bien que ce soit le cas. De plus, cela ne s’est pas passé comme ça. “Maintenant, on se tire ?” Il lui offre un large sourire et tend sa main, peu certain qu’elle s’en saisisse, mais sait-on jamais, peut-être sera-t-il surpris.