Malaise de plus, malaise de trop, te voilà transportée en urgence à l’hôpital pour te procurer les soins nécessaires. La réalité allait rattraper tôt ou tard, t’en étais parfaitement consciente préparant tes au-revoirs. Corps trop faible, marqué jusqu'à l’os. T’ignores quel jour il peut être, ce qui s'est véritablement passé. Voilà quelques heures que tu es réveillée, exténuée par la vie à laquelle t’a arrêté de t’accrocher bêtement. Pourtant, elle semble le faire à toi. Branchée à une machine, celle-ci t’apporte cette fonction vitale pour le corps. Constamment sous dialyse, tu te replies sur toi, réduite à une situation que tu n’as jamais voulu. Porte qui s’ouvre tu gardes le dos tournée, et remets les lunettes à oxygène sur le nez avant que l’on vienne te faire des remontrances.

j'étais en route pour aller me bourrer la gueule dans un bar miteux de south Boston. juste après la raclée que je venais de me prendre. la lèvre fendue, des ecchymose partout sur les pommettes, un oeil rouge et une arcade stripé avec les moyens du bord. je suis en train de devenir l'ombre de moi-même. un sous merde qui se laisse mourir dans un coin. plutôt étonnant que je sois pas encore en train de sombrer dans un caniveau ou que je me sois pas mangé une commotion cérébrale. et alors que je me disais que sauter du pont à la sortie de la ville pouvait être une nouvelle expérience à tester pour enfin faire taire la douleur, j'ai reçu l'appel. un appel de l'hôpital me disant que l'état de ma femme s'était aggravée et qu'elle était sous dialyse permanente. j'ai d'abord hésité à te faire passer un message. un truc cinglant du genre "on va tous mourir un jour" ou alors "t'as voulu mourir seule alors bon vent" mais c'était trop dur. aussi dur que lorsque je passe la porte de ta chambre d'hôpital et que je te vois là, recroquevillée dans ton lit. immédiatement les larmes me montent aux yeux. je comprends que tu détestais l'idée que je te vois devenir comme ça, que tu préférais te cacher, pour ne pas me faire souffrir. mais si tu savais à quel point je t'en veux de m'avoir enlever possible derniers instant ensemble. je m'approche du lit, doucement, la peur de te réveiller. et je me mets à pleurer là, en silence.

Ce n’était qu’une question de jour, tu le savais, ça n’allait pas pouvoir durer éternellement. Le mal gangrène en toi, te fatigue tellement. Tu n’as plus la force de rien, tu voudrais seulement pouvoir t’endormir et arrêter de lutter contre l’inévitable. Tu baisses les bras ? Toi qui te bat constamment ? Ce n’est pas ton genre, qu’est-ce qui t’arrive ? C’est parce que tu penses avoir tout perdu, perdu les véritables raisons de te battre. Dos tourné vers la porte d’entrée de ta chambre, tu te refuses de voir qui peut bien être cette personne silencieuse qui sent le tabac et l’alcool. Ce ne peut être un membre du corps hospitalier, impossible. Corps déchiré qui tente de voir qui ça peut bien être, les yeux mis clos, en un instant, tu reconnais Aidan, le visage tuméfié, marqué par l’insomnie et la tristesse qui le dévore. ❝ T’as une sale tronche. Propos presque silencieux, tu ne peux t’empêcher de dire tout haut ce que tu penses et c’est tellement plus évident de parler de lui, de faire comme si tout allait bien dans ta vie. ❝ Pleures pas, je pète la forme, c’est juste un jour sans. Pourquoi encore mentir ?

la vision qui se floute, les larmes qui dévalent mes joues, m'arrache des grimace car le sel de mes pleurs active la douleur de mes plaies. j'ai passé ces derniers jours à picoler et me battre. j'en ai oublié de dormir, de manger. j'ai au moins pensé à me laver avant de venir. mais j'empeste le whisky que je viens de m'enfiler avant d'entrer et de la clope que j'ai fumé avant d'arriver à l'hôpital. je suis rien sans toi Capucine, je suis que l'ombre de la pauvre merde que j'étais avant. et si tu dois mourir, je sais pas trop pourquoi je resterais sur cette foutue terre. j'entends enfin ta voix et je pouffe de rire en m'étouffant à moitié parce que je suis en train de pleurer. ta vue ta tête à toi aucune envie de me battre là. je suis juste là pour voir ma femme. et même si tu veux pas de moi je m'en fou. tu veux pas arrêter de mentir ? on dirait dobby  dans le dernier Harry Potter quand il est mort et qu'il voit des trucs autrement dit c'est pas un compliment. je veux pas être veuf à mon âge  bats toi putain. remets toi et on se remet ensemble. tu me dois ça.

Pourquoi est-il toujours là quand tu sembles atteindre la pire des épreuves ? Il ne mérite rien de tout ce qui vous arrive, ce que tu lui fais subir si tu dois être plus clair. Mais désormais, il va être difficile de lui cacher quoi que ce soit. Mieux qu’une annonce d’une grossesse surprise, le choc en sera tout autant surprenant. L'annonce est difficile, mais t’essaies de garder la tête haute, ne pas l’attrister plus encore qu’il ne l’est déjà. Voilà ce que tu redoutais, il n’est l’ombre que de lui même, mais ça aurait été pire si tu lui avais tout dit, que vous ayez passé ce stade difficile ensemble, avant de finalement sombrer six pieds sous terre. ❝ Voilà ce qui se cache derrière tout mon maquillage. Surprise chéri. Teinte d’humour, tu n’es pas la fille la plus maquillée qui existe optant souvent pour du naturel et un regard de biche. ❝ Ce n’est pas gentil ça. Je suis mieux fringué que lui et j’ai plus de cheveux sur la tête. On ne te compare pas à Dobby bien qu’il soit attendrissant. Regard qui s'embrume, tu te décales légèrement dans le lit tout en grimaçant, tirant ta carcasse de l’autre côté. ❝ Viens là.

j'ai pas oublié Capu. "pour le meilleur et pour le pire. dans la santé comme dans la maladie" j'ai pas oublié et surtout quand j'ai dit oui, c'était en connaissance de cause. j'ai parfaitement compris et accepté ces paroles là, jusqu'à la fin de ma vie. et puis toi t'as mis fin à cette promesse quand tu m'as repoussé pour me "protéger". le mal que tu me fais, que tu nous fait est presque palpable. en tout ça moi je peux le toucher, il suffit que je pose ma main sur ma poitrine, là où mon coeur est supposé être. il ne l'est plus, il est brisé. et en plus de me briser le coeur, tu m'as éloigné pendant les probable derniers moments de ta vie. j'ai même pas pu profiter d'être à tes côtés, tu m'as enlevé ça. j'ai l'impression de me réveiller à côté d'un plan d'un soir que j'ai chopé en boite. tu sais le lendemain quand y a plus l'alcool ni le maquillage je rigole doucement. j'ai mal au coeur mais je rigole un peu. ça je te l'accorde, t'as plus de cheveux que lui. et heureusement, j'suis pas trop attiré par les chauves pas vraiment mon genre non. tu me demandes de venir dans ton lit et j'hésite. j'hésite parce que je t'en veux de tout ce que tu nous a fait subir, mais à en juger par ton état et le diagnostique du médecin.. je devrais profiter de tous les instants possible avec toi. alors j'hoche la tête et je viens m'assoir à côté de toi. comment tu te sens ? sérieusement capu.

Sourcils que tu fronces légèrement, tu plisses des yeux. Blague faite, tu n’es pas un lendemain de soirée, même si t’es pas convaincue d’être à ton avantage là maintenant. Toi qui l’a habitué à ton teint naturel, le voilà devoir faire face à une pigmentation plus pâle qu’à ton habitude, les cernes bien plus marquées, les os qui entaillent ta peau. Ce n’est pas la meilleure image que tu puisses donner, et certainement pas celle qu’il souhaitait voir un jour. Pourtant il t’as vu dans bien des situations, et une fois de plus dans un lit de ce foutu hôpital. Pourtant tu t’étais persuadée que la dernière fois qu’il te verrait, ça serait dans une boîte. Optimiste la gamine. ❝ Je me serais inquiétée si c’était le cas. dis-tu tout doucement, avant de te redresser lentement avec faiblesse dans ton lit. ❝ Je pète pas la forme. J’ai connu des jours meilleurs.Voix faible, tu recouvre ton corps de ce draps blanc et de cette couverture moyennement douce.

t'es pas dans ton assiette et pourtant je te trouve toujours aussi belle. surement parce que c'est pas ton physique que j'aime, c'est tout toi. je sais que je devrais aussi aimer tes mauvaises décisions mais pour le moment j'ai du mal. eh les goûts et les couleurs ça se critique pas ! je souris fébrilement, passe ma main sur mon visage. je suis épuisé, j'ai envie de prendre une douche, je dois désinfecter mes blessures et je rêve de me coucher dans mon lit. pourtant il est hors de question que je sois ailleurs. c'est déjà pas mal que t'admette que c'est pas la folie parce que te connaissant t'aurais pu minimiser les choses, mais là tu ne peux plus. est-ce que tu voudrais que je t'apporte quelque chose en particulier demain ? un plaid, un oreiller ? parce que oui, je compte venir te voir encore demain.