@Circé Hastings Le tissu souple sous les doigts, et les rubans que je fais glisser entre les phalanges ; curieux serpent, doux et docile. J’en aime la danse dans les mouvements, et leur opacité sur les paupières. Balancez moi dans une malle blindée de matières, laissez moi nager dans les vêtements, permettez moi d’y mettre quelques coups de ciseaux. J’suis pas doué quand il s’agit de parler, d’écrire, de lire, j’suis pas doué quand il s’agit de cocher les acquis dans les bulletins de profs. Mais ta robe de mariée, Circé, j’te jure que j’ai tout un défilé pour toi dans ma tête. Alors je me suis pressé, ce soir, de mettre l’autre vendeur dehors en promettant de gérer la fermeture. Il doute, j’le vois. Mais j’comprends, j’me confierais pas une boutique moi non plus. J’ai fermé la porte principale, clôturé la caisse en suivant les instructions, rangé, nettoyé, j’ai fait l’employé modèle ; et j’ai ouvert une bière. Mes empreintes, sur ces pages d’un carnet noirci que je parcoure. D’anciennes robes, des futures, des trucs griffonnés à l’arrache et d’autres qui m’ont provoqué des ampoules à force d’être gommés. Le dessin doit se calquer sur l’esprit. Sauf qu’il se balade, l’esprit, il se barre, vagabonde entre deux chutes de reins et plonge dans l’éthanol. J’te cale dans une inspiration, dans une pause, un désir créatif et une espèce de curiosité accrochée dans ton récit. J’aime les histoires qui finissent bien. Elle a pas l’air ouf, la tienne, avec cette robe qui revient. Cousons un meilleur chapitre final. “Passe par derrière !” Tu m’verras, en transparence derrière le verre de la vitrine, à te faire des gestes pour te désigner le chemin jusqu’à la porte de secours, à l’arrière de la boutique..

Difficile de raconter ton histoire sans verser une larme. Goutte d'eau qui s'écrase violemment sur l'écran de ton téléphone avant qu'il trouve refuge dans le cuir de ton sac à main. Histoire qui s'écrit à la capitale, berceau d'amour et d'espoir, faite pour durer, pour être contée de tous. Tout était écrit dès le premier regard, un battement de cils avant d'entrevoir l'océan de tes yeux. Le coeur qui flanche, le sourire qui s'étire, te voilà déjà mariée à cet homme dont tu ne connais rien. Les années passent, la routine s'installe. En quête d'un rebond, tu te mets à rêver une fois la nuit tombée. Renouveau qui finit par se faire entendre, différent de ce que tu avais espéré princesse. Ce n'est pas une demande mais une révélation qui tombe. Un jour, il y aura bien quelqu'un mais, jamais ça ne sera toi. La bague, c'est au doigt de quelqu'un d'autre qu'elle sera glissée. Il préfère les hommes Joaquin. Peut-être les boucles blondes de celui que tu as longtemps considéré comme ton meilleur ami, ton confident. Ame perdue qui vagabonde dorénavant en solitaire dans les rues de Boston. Dans la housse que tu promènes, une promesse jamais réalisée. Une âme d'enfant qui s'est élevée, des rêves un peu trop prononcés qui tu pensais toucher du bout des doigts. Tu t'es emballée Circé et t'es tombée d'une dizaine d'étages avant de l'accepter. Inspiration qui fait grandir ton corps, ta tête, ton âme. Tu souris à ton reflet avant de tourner dans la ruelle comme l'indique le gps. Il est important de faire attention à l'image que l'on renvoie. Tu suis. Quête secrète que tu comptes mener à terme. Promesse d'une vie meilleure faite par un inconnu, un être inspirant et inspiré qui te fait signe. Tu penches la tête, fronces les sourcils. Ton nez se plisse et tu finis par comprendre. Tu fais le tour pour le retrouver dans l'arrière boutique. Salut...! Voix douce, timide, reconnaissante. A ce qui se dit, tu sais transmettre beaucoup d'émotions en un temps record. @Horace Dawson

@Circé Hastings Dans ma quête, dans le descriptif de mon personnage de super héro en carton, y a d’réparer ce que les briseurs de rêves s’entêtent à détruire. J’peux tolérer pleins de trucs, beaucoup plus que la plupart des gens, mais, des rêves, des désirs colorés, ça se garde précieusement. On se barre avant de tout abîmer. T’as déjà admiré un arc en ciel d’un dérivé de gris, toi ? Alors, j’te file ma palette, et peut-être qu’avec un peu d’aide, à quatre mains, on peut reconstruire ce qui a été piétiné. Des briseurs de rêves, on en croise de toutes sortes ; ceux qui trébuchent dessus, qui se prennent les pieds dans un rêve trop grand, puis y a ceux qui aiment le bruit de fracas d’un rêve qui se déchire. Ça rebondit, un rêve, quand ça trébuche dans les escaliers. Je n’ai pas la technique pour s’en remettre, j’sais pas s’il faut en construire des plus petits, plus raisonnables. Appuyer dessus pour les faire rentrer dans des cases trop petites. Ce que je sais par contre, c’est que le noir le plus profond peut s’orner de perles, de paillettes, de dorures. Le plus brisé peut se rassembler, et parader avec ses cicatrices. J’ai des rêves que je n’accomplirai jamais. Des rêves d’Harvard et de réussite. Mais y a aussi plein de désirs autour, des ambitions ridicules pour la plupart, mais qui m’feront mon monde pour quelques jours. Y a ta robe, depuis qu’on en a parlé. Parce que dans ces mailles, y a l’espoir et le rêve que t’y as accroché, en la choisissant. Tu rentres, et j’ai ma mission chevillée à mon corps frêle. Ne le sous-estime pas. “Bienvenue dans la boutique après fermeture.” J’m’incline un peu, pour le salut, pour te désigner d’un geste de bras théâtrale la boutique pas aussi lumineuse qu’à l’ouverture. Nous sommes dans les coulisses, là où se trouvent les tissus, fils, machine à coudre, mais on peut voir la boutique à travers cette porte laissée ouverte. “J’te débarrasse ?” De ton fardeau ; de ta robe, déjà. “J’te remercie d’être venue.” T’aurais pu faire demi-tour cent fois, depuis chez toi à ici. Un fin sourire candide s’aligne sur mes lèvres. “Et d’me laisser faire ça.” De me faire confiance, je crois, au moins un peu. “Sans me balancer à ma patronne.” Rajouté avec un rictus amusé. Une palette de couleurs, j'te dis.

Bercée par une douce musique classique, telle une enfant égarée, tu suis lascivement le chemin tracé par une intelligence artificielle. Une voix que tu connais que trop bien depuis des mois maintenant, depuis qu'il t'a abandonné, livrée à toi-même, à ton propre destin. Portable pour seule compagnie une fois la nuit tombée, tes démons apparaissent et dansent jusqu'à point d'heure, jusqu'à ce qu'épuisée, tu gagnes les bras de Morphée. La cage dorée que tu t'étais construite et dans laquelle tu t'étais enfermée, a fini par céder. Ton petit confort, ton avenir tout tracé s'en est envolé vers d'autres cieux, inaccessibles à ce jour. Ange déchu, déçu, c'est le coeur lourd et meurtri que tu le retrouves dans cette boutique qui, autrefois, t'aurait tant fait rêvé. Malgré le chagrin qui comprime ton coeur, tu arrives à esquiver un sourire pour répondre à cette lueur d'espoir qu'il t'offre, sans contrepartie. Les traits porcelaines de son visage ont un côté rassurant. Comme ses mots, ses paroles se veulent douces et envoutantes. Tu as envie de lui faire confiance, de te reposer sur cette personne que tu ne connais point et en qui tu places beaucoup d'espoir. L'oeil curieux, ton regard passe par dessus son épaule alors que de façon théâtrale, il t'accueille dans son antre. C'est beau ici. C'est chaleureux le blanc. La gorge nouée, tu tentes de garder le cap. Tes genoux cèdent, révérence de princesse un peu trop parfaite pour n'être qu'imaginer. Merci à toi de m'accueillir, c'est vraiment sympa. Tes yeux fixent tour à tour la robe drapée et ses mains ouvertes. Tu déposes finalement la housse avec précautions, comme si tu tenais encore un peu à ce morceau de tissu qui te rappelle pourtant que tout est terminé. Je suis sûre que tu vas en faire une oeuvre d'art. Il n'y a qu'à lire la passion dans son regard et la malice dans son sourire. Tu imagines que rien ne peut lui résister, que le tissu lui-même se plie à ses exigences. A ton tour, tu lui offres finalement un sourire sincère et bienveillant. C'est magique ici... Tu tournes sur toi-même, prends le temps de respirer les odeurs qui se dégagent des coulisses. Un rêve de petite fille dans un contexte douloureux. @Horace Dawson