illusions and false assumptions
@Salvatore Denaro & @Oliver Matthew Davis
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septembre 2023
Boston Police Department

People are quick to believe
the bad things they hear
about good people.
…

Filière laissée entre bonnes mains, découragé d'avoir attendu aussi longtemps sans résultat, alors que clairement tout aurait pu se régler avec un "c'est son jour de congé" dit plutôt, je tente de chasser le tout avec quelques bouffées de nicotine, entrainant le sicilien dans mon passage, puisqu'il semblait si impatient d'en griller une quelques minutes plus tôt. Lui proposant la flamme de mon briquet, je garde le bras tendu jusqu'à ce qu'il aie réussi à enflammer sa cigarette proprement. Vieux zippo que je traine depuis des années et qui commence à se faire capricieux, il reste pourtant dans mes poches comme un talisman dont je ne veux pas me débarrasser, mais avec ses caprices, il n'y a plus que moi qui puisse le manier. Du moins, que j'autorise. …à l'exception de celui qui me l'a offert et dont les initiales paraissent encore sur l'une des facettes métalliques.

- Janvier 2023, indiquais-je en soufflant un nuage de fumée, rangeant mon briquet. J’ai gradué en décembre et Mr. Dafoe m’a contacté durant les vacances : son assistant s’était désisté, il m’a offert le poste, j’ai accepté, résumais-je grossièrement avec un haussement d’épaules. Changement de plan imprévu, mais comme il faut bien payer les factures et que ça reste dans le domaine artistique, j'ai sauté sur l'occasion. J'avais jamais pensé devenir prof, mais finalement, à assister comme ça, j'ai fini par apprécier l'idée de la profession, avouais-je avec un sourire en coin. Comme quoi parfois, les offres qui passent apportent beaucoup avec elles!

M'installant sur un banc public, j'ai le réflexe de me poser le derrière sur le dossier et les pieds sur l'assise alors que j'apprécie ma cigarette. Entendant la question de mon élève, j'en tourne la tête en sa direction à nouveau, haussant un sourcil sans d'abord rien dire.

- Non? Indiquais-je finalement avec une interrogation encore présente sur ma voix et sur mes traits. Faudrait? D'accord, y’a des profs qui étaient attirants quand j’étais encore sur les bancs, mais j’ai jamais fait le moindre mouvement vers eux. Et depuis que je suis passé de l’autre côté de la pile de papier… J’admets que j’ai jamais demandé ses cartes à un mec avec qui j’ai couché auparavant, avouais-je avec balancement de tête en tirant une nouvelle bouffée de nicotine. Au final, j’ai peut-être couché avec un élève, mais à ma connaissance, aucun des miens au moins. Et j’ai jamais dragué en cours non plus. Lui, par contre… Pourquoi tu demandes? Ça fait partie de ta bucket list? Le questionnais-je, plaisantant plus qu’autre chose. Même si ça m’étonnerait peut-être pas tant que ça…

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Finalement, ils n’étaient pas si éloignés que ça en termes d’âge. Même s’il aurait dû s’en douter. On ne pouvait pas dire que l’assistant du professeur Dafoe soit du même âge canonique de ce dernier à première vue. Mais le sicilien n’aurait jamais imaginé qu’ils auraient pu être sur le même banc à quelques mois près. “Tu veux dire qu’à une année près, on aurait pu baiser après s’être rencontré dans une soirée étudiante ? Genre tu aurais pu être mon …” Il ne trouvait plus le nom utilisé pour les relations se dessinant entre les étudiants plus anciens et les nouveaux arrivants. Même s’il n’était pas une première année lors de son transfert depuis Florence. Il claqua des doigts.”Parrain !” Voilà, il avait retrouvé le terme, ce qui était assez savoureux quand on avait conscience des origines familiales du Denaro. “J’aurais pu être ton pulcino qui t’aurait suivi partout. Celui à qui tu aurais appris les méandres des couloirs de la faculté. Les subtilités des attentes de tel ou tel professeur. Les sujets qui étaient tombés les années précédentes. Les meilleurs bars pour les soirées étudiantes. Les meilleures positions sexuelles pour se découvrir.” Il tira une bouffée de nicotine de sa cigarette avant de laisser s’évader les volutes par ses narines. “Che perdita !” (1) plaisanta-t-il à moitié avant de reprendre plus sérieusement. “Du coup, tu vas rester professeur ? Ou tu as d’autres projets ?”

Le sicilien finit par éclater de rire face à la question posée par Oliver. Coucher un professeur faisait-il parti de sa bucket list ? “Già fatto.” (2) avoua-t-il en repensant à cette professeure de français qui lui avait appris bien plus que les subtilités de conjugaison de la langue voisine. Il s’assit sur le banc, reposant sa tête en arrière sur le dossier en fermant les yeux, appréciant la douce caresse de l’air frais sur son épiderme après toute une nuit passée au poste. “Sei tu sulla mia lista.” (3) commenta-t-il sans prendre la peine de lui répondre dans sa langue avant de poursuivre. “Tu en as une ?”

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1 - Quelle perte !
2 - Déjà fait.
3 - C’est toi qui est sur ma bucket list.

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Un léger rire secouant mes épaules, et je secoue la tête en expulsant un nuage de fumée. Il a une de ses façons d'analyser les choses…

- J'ai commencé le diplôme en retard après avoir déménagé, admis-je, expliquant ma graduation tardive, omettant volontairement les raisons à tout ça.

Le laissant parler, j'hausse cependant un sourcil lorsqu'il semble chercher ses mots. Amant? Fuckbuddy? Je sais pas où il veut en venir, mais c'est ce à quoi je m'attends de sa part. Raison pour laquelle j'affiche un certain étonnement lorsqu'il finit par trouver le terme qui lui manquait. Mais l'amusement prends rapidement place sur mes traits lorsqu'il mentionne qu'il aurait pu me suivre partout, que j'aurais pu lui faire découvrir tous les méandres des corridors… Mec, t'as pas idée à qui tu parles pour ça! T'aurais effectivement appris à connaître tous les foutus de corridors de l'endroit parce que… je m'y perds encore! Et tandis qu'il continue son discours, je pouffe doucement de rire.

- C'est pas les méandres des corridors que tu veux apprendre, c'est tous les coins sombres et confortables, lançais-je avec un sourire en coin, tout de même amusé. Mais est-ce que je peux réellement lui reprocher, sachant ce qui a déjà pu se passer dans quelques ateliers après les cours? Pas tellement, je crois. Je connais encore quelques bars en ville, mais tu sais déjà où se trouve mon préféré apparemment, fis-je remarquer puisqu'on s'est déjà croisé chez Ange.

À sa nouvelle question, j'ai un regard pour le bâtiment qu'on vient de quitter. Elle est loin cette époque où c'était le métier que je devais suivre sans m'opposer… Et si je pouvais reparler au gamin que j'étais, je lui dirais de prendre un respire ou deux et de s'accorcher, parce que la libération est pour bientôt.

- À moins que ma route change avant que j'aie ma permanence; ouais, je devrais devenir prof, souris-je en reposant mon regard sur le sicilien.

Ça n'a jamais fait partie de mes plans, c'est vrai. Que ce soit au début où à la fin de mes études, ma vision de mon futur est toujours restée assez floue, même si je sais sur quel chemin je ne retrournerai jamais. J'ai pris l'offre de Dafoe en me disant que ça me donnait une bonne situation pour penser à la suite, mais, en toute honnêteté, j'apprends réellement à aimer ce métier et j'ai envie de faire valider mes quatre années d'assistant.

Une expression dans sa langue natale et j'hausse à nouveau un sourcil. Je comprends rien. Et ça semble pas toujours lui effleurer la tête, mais bon… j'ai pas toujours le réflexe de m'exprimer en anglais non plus, alors je vais me taire. Je comprends peut-être un peu mieux ce que je faisais vivre à Saël …Jaysaël à l'époque.

Une nouvelle tirade et penchant la tête légèrement sur le côté, je laisses s'évader un petit nuage de nicotine. Avant que je n'ai pu lui demander ce que ça signifie, il retrouve son anglais, sa question me tirant d'ailleurs un sourire en coin.

- Pas tellement, finis-je par dire après un moment de silence, mon regard se perdant sur la circulation passant devant nous. Mais j'ai deux buts que je démordrai pas, lui confiais-je tout de même. Être moi-même et être heureux, indiquais-je en relevant machinalement un doigt à chaque énoncé, tirant tranquillement sur ma cigarette. Ça semble simple, banal et peut-être même stupide pour certains, mais c'est mes visées et je veux pas en déroger.

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Un rire sonore s’échappa de sa gorge, attirant l’attention sur eux sans qu’il n’accord la moindre importance aux visages qui s’étaient tournés dans leur direction, tantôt intrigués, tantôt agacés. Le Sicilien avait l’habitude d’être au centre des conversations et des regards, même sur le parking d’un commissariat de police. Quand on venait d’une famille mafieuse d’importance, cela n’était jamais sans conséquence et il avait dû apprendre à faire avec. “Touché.” avoua-t-il avant de poursuivre, l’oeil pétillant de malice. “Même si j’en ai déjà trouvé quelques uns, tout seul !” Il lui adressa un clin d’oeil. “Enfin quand je dis tout seul, tu me comprends.” Il avait suffisamment de succès auprès de ses camarades de classe, quel que soit leur sexe, pour éviter de recourir à la meilleure amie de tous les hommes : leur main droite. Il hocha la tête lorsque son interlocuteur évoqua leur rencontre inopinée dans le bar de celui qu’il poursuivait, en vain jusqu’à présent, de ses envies sexuelles comme un satyre en manque de contact charnel. “Tu y vas souvent d’ailleurs ? C’est étonnant qu’on ne s’y soit jamais croisé avant.” commenta-t-il. Certes, il aimait varier les plaisirs autant que les terrains de chasse mais il était tout de même étrange que sa route n’est jamais croisé celle de son professeur en dehors des salles de cours qu’à deux reprises. Un bar gay et un commissariat. En y repensant, c’était assez cocasse et peu commun. Bien plus exotique que les rayons fruits et légumes de la supérette du coin.

“Pourquoi ? T’aimes enseigner ou …” Il se tut au dernier moment, réalisant qu’il aurait pu sérieusement le vexer s’il avait continué sa phrase. Ce n’était pas tant la crainte des représailles sur ses notes qu’il craignait que le risque de perdre cette fragile amitié qui commençait à se dessiner entre eux. Fragile et étrange mais existante néanmoins. Il poussa un soupir, commentant même s’il ne lui avait pas demandé son avis. “Je ne pourrais jamais. J’ai pas la patience de gérer tous ces petits cons en cours.” Et par petits cons, il s’incluait évidemment dedans. “Et je saurais pas garder ma queue au sec.” Ce qui amènerait à le faire virer de son travail sans le moindre doute. Il tira une bouffée de cigarette, laissant sa gorge s’embraser légèrement avant de reposer sa tête en arrière, appréciant la sensation de liberté que cela lui procurait après une nuit entière passée au poste. Un sourire se dessina sur ses lèvres charnues alors que le jeune homme évoquait ses buts dans la vie. Le dos appuyé contre le mur, il tourna la tête vers lui et l’observa avec attention. “Et tu l’es ? Heureux et toi-même ?” Il était curieux de sa réponse, chacun ayant sa propre définition du bonheur. Le sien était quelque peu altéré en l’absence de son meilleur et ami et de sa soeur. Mais il ne pouvait pas l’avouer. “J’ai de quoi t’y aider si jamais.” proposa-t-il, ne réalisant pas qu’évoquer son activité extra scolaire sur le parking d’un commissariat de police n’était peut-être pas l’endroit idéal.