J’en perds quasiment mon latin à la vue de la hache qui va se planter dans la cible, presque je fais un tour sur moi-même pour me saucer. Mais bon, j’ai un brin de dignité, et face à un mec comme lui, j’ai la conviction que la déconne, c’est compliqué. M’enfin, qui suis-je pour lui dire que se prendre au sérieux ça fait devenir rapidement plus vieux.

Le truc c’est qu’au lieu de m’encourager – comme un grand frère le ferait, pour ce que j’en sais – il m’accuse de tricherie et ça, ça me laisse sans voix. « Une remontée inespérée » Qu’on se le dise, j’en suis le premier surpris. Je croyais même que j’allais être Fanny. On se détend, je me bats toujours à la loyale, elles pourraient toutes en témoigner, mes connaissances, dans un tribunal. « La première fois ? » Que je m’adonne au lancé de hache ? Il y a vraiment des personnes qui font ça souvent ? Pour qui c’est un passe-temps ? C’est étrange, non, comme loisir, mis à part si en en-tête de son curriculum vitae il y a écrit le mot serial killeur.

Mais bon, parce que je ne me vois pas lui dire ce qui tourne dans ma tête, j’opte pour une autre solution, ne désirant toujours pas finir avec une hache plantée dans le front. « Bah ouais, » que je réponds, dubitatif, « j’étais puceau. » et c’est la première fois que je suis presque fier d’annoncer ça. « La chance du débutant. » ça fonctionne mieux que le fait d’être trop confiant apparemment.

MADE BY @ICE AND FIRE.

« Bah ouais, j’étais puceau. » A regarder l’état de la cible il y a de quoi douter, surtout après son dernier lancer lui offrant par la même occasion la victoire. Pourtant le canadien, la mâchoire crispée, ne s’avoue pas vaincu surtout après la petite ritournelle qu’il vient de lui balancer l’air de rien : « La chance du débutant. » En toute logique, maintenant, la chance l’aura quitté ce qui est plutôt encourageant. Il faut l’avouer, le gringalet a réussi cette fois-ci, lui imposant presque le silence lorsqu’il retourne vers l’établi et du pouce tâter du tranchant d’une hache mal affutée. « En trois manches, j’ai oublié de préciser. »  

Il a certes gagné la première mais voilà qu’il se donne la possibilité de remporter la guerre en rallongeant sans permission cette épreuve qui n’a ni queue ni tête. Un amusement qui commence à le tendre progressivement, au fil des ratés et des réussites lorsqu’elles ne sont pas pour lui. « J’estime qu’elle vaut au moins çà, »  même sans avoir vu son corps à elle, il espère ne pas se tromper sur ce qu’il a pu s’imaginer, qu’elle soit aussi charnelle au lit que motivée par son métier. « Non ? » Les espagnoles ont cette étiquette de tombeurs nés alors il ne devrait pas la sous-estimer et accepter de continuer. Deuxième manche donc, il approche, reprend la position mais cette fois ronge son frein en grognant contre celui qui tire les ficelles du destin. « Farewell and adieu to you, Spanish Ladies ♫ »Qui ne tente rien n'a rien.

Vraiment, je n’y croyais pas, mais j’ai comme l’impression d’avoir gagné au loto en dépassant les dix points. Cela dit, ça ne fait pas plaisir à mon tout nouveau copain, parce qu’il rajoute, l’air de rien. « En trois manches, j’ai oublié de préciser. » qu’il est malin. J’en crache un rire avec nervosité, évidemment que je vais accepter de continuer. C’est pas que mais j’y ai presque pris goût à notre compet improvisée. « J’estime qu’elle vaut au moins çà, » Oui, ou bien c’est ton égo qui parle pour toi. Ca fait mal de se faire battre par le petit gringalet qu’on vient de menacer. Ca va que pour ma part, comme joueur, je n’ai jamais été mauvais. Toujours prêt, même pour la défaite. « Non ? » C’est bon, ce n’est pas la peine d’appuyer et de faire semblant, j’ai déjà accepté.

Alors j’opine, comme pour lui prouver qu’on est sur a même longueur d’onde, enfin, à peu près, parce qu’à dire vrai je n’en suis pas persuadé. Et il s’arme une nouvelle fois, chantonnant quand il se décide à lancer. « Farewell and adieu to you, Spanish Ladies ♫ » Un refrain que je connais, les classiques même en Espagne, on ne passe pas à côté. Une nouvelle hache en main, je regarde la sienne retomber en un bruit sourd sur le sol ; comme quoi, la chance est peut-être toujours de mon côté. « T’es certain que tu veux rallonger ? » Attention, je ne m’avance pas sur ma victoire, mais la sienne paraît après tout un peu plus loin. Mais je n’ai posé la question que pour la forme, car j’en sais déjà la réponse, l’homme à côté n’est pas du style à abandonner.

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C’est un nouvel échec qui se pointe à l’horizon lorsque sa hache va se planter magistralement dans la paillasse qui mure la cloison. « T’es certain que tu veux rallonger ? » Mais rien n’est encore perdu parce pour débuter cette deuxième manche, l’un comme l’autre se sont foirés, le gringalet ratant à l’instant aussi son lancer. Aucun des deux n’ont brillé ce qui donne au mercenaire l’espoir de l’emporter. « J'n'ai qu'une parole. » Jamais de sa vie il n’a reculé alors ce n‘est certainement pas aujourd’hui qu’il commencera, pas devant un petit freluquet. Cette fois il n’ira pas rechercher son arme, la laissant, un bleu las de faire des allées et venues pour si peu de résultats.

A côté, non loin, les autres semblent tout autant galérer alors il se fait une raison quant au manque de chance par lequel il est touché. C’est consternant de savoir que le gamin a réussi là où il peine alors que d’ordinaire il y excelle. « Et sinon qu’est-ce qu’un avocat fait de son temps libre ? »   Il se force à installer une connexion, un semblant de conversation bercée de sympathie comme ses instructeurs lui ont appris, bercé l’ennemi de faux semblants afin de le mettre à terre plus rapidement et proprement. « Protéger la racaille, on doit forcément compenser à coté en BA. »   C’est l’idée qu’il se fait de la justice de ce pays, un carnaval de pots de vin et de minauderies, de contrefaçons, de mensonges et de duperies.
Armé à nouveau, il se présente sur le pas de tirs pour retenter un exploit, se concentrant, un genoux à peine fléchi, une paume sur la tranche et l'autre tenant fermentant le manche.