Quelle chance de posséder un majordome calé sur les nouvelles technologies ! En l'espace de cinq minutes, Gauthier me sauvait une fois encore la mise. La commande vocale désormais disponible, plus la peine de lui demander de taper mails et textos... en m'amusant de ses petits soupirs de dépit. Peut-être cela me manquera-t-il à l'avenir... chaque réaction de mon mentor et soutien étant mémorable, ni plus ni moins. Je débarque chez toi Dan, besoin d'un coup de main, et pas d'un coup de pied ! que je dicte à l'attention de mon pote Kirkland, armé de plusieurs bouquins et, avant toute autre chose, de mon dictaphone. Le début des examens a plutôt roulé pour ma part, mais les oraux m'angoissent bien plus que tous ceux des années précédentes réunis. La position du jury, le nécessaire pour présenter un projet, la place allouée au candidat... toutes ces inconnues me rendent nerveux et pour cause, tout ce que je ne maîtrise pas reste dans un coin de mon cervelet, sans m'offrir de repos. Voilà la raison de ma visite chez Dan, étudiant de ma génération ayant oublié de festoyer avant les examens, ou de se la jouer jeune premier qui compte les quelques poils désormais présents sous son menton. En sa compagnie, je peux m'exprimer, échanger, m'adapter. Il connaît mon handicap, mes nouvelles problématiques. Impossible pour moi de demander un coup de main à quelqu'un ne me connaissant pas suffisamment... et sur ce coup-là, j'ai vraiment besoin d'une main tendue plutôt que d'une porte fermée. Désolé de me pointer comme une fleur, mec... mais je t'ai amené les meilleurs biscuits de mon majordome, ça compte en ma faveur ? Caillou lancé dans l'océan, je tends le petit sachet empli de mignardises toutes plus délicieuses les unes que les autres. Okay, je t'achète un peu, j'avoue. Mais juste un peu...

Entendre la voix de Dan juste devant moi en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, et alors que ma main n'a même pas atteint la sonnette de la porte d'entrée. La donne m'amuse. Sur l'instant je ne comprends pas pourquoi mon no life de pote est descendu aussi vite, mais la raison se dévoile d'elle-même : les marches. La plaie de mon siècle. Ces trois demoiselles de béton ne sont rien en comparaison du côté défoncé des rues de Boston... je me sens presque chanceux et ne pas me trimballer en fauteuil ! que je soupire doucement sans oublier les mignardises préparées avec douceur par nul autre que Gauthier, qui ne remplacerait pas seulement le beurre et la margarine dans mon existence... Mais aussi les blancs en neige et la mayo. Si je te dis que ai chipé le sachet sans dire mot, ça compte ? Je papillonne des cils à peine quelques secondes avant de suivre la silhouette de Dan, dont l'ombre me guide plus assurément que bien des mots et des gestes. De cette manière, pas de croute ridicule qui tienne ni d'étalage en pleine rue et en bonne et due forme. Je pénètre par conséquent cet environnement ne m'étant pas inconnu, un petit sourire aux lèvres. Tu sais combien j'évite de demander des coups de mains que je ne suis pas certain de pouvoir rendre, mais... mon grand oral approche. Et je n'ai aucune idée des détails techniques : emplacement du jury, place pour présenter le projet, si un projecteurs est autorisé... En bref, je ne suis pas prêt. Et c'est impensable pour moi. J'aurais besoin... Que tu sois mes yeux sur ce coup-là, Dan...