T’as tout fait pour échapper à ce foutu couronnement. Que ce soit un faux billet du médecin ou encore te faire taper sur la gueule, l’anniversaire du frère de ta fausse petite amie, rien n’a suffit et te voilà contraint de prendre l’avion dans moins de quarante-huit heures. T’as la rage au ventre, tu as envie de tout casser. T’as pas envie de te coltiner Sybil la chieuse et encore moins ton père. T’en a marre de devoir exister pour les autres et te voir refuser absolument tout ce qui te procure un once de plaisir en ce bas monde. Ce soir, tu comptes bien te mettre à l’envers pour oublier tout ça et quoi de mieux qu’une caisse de bière et un ballon de basket pour y parvenir ? Nemo ne te répond pas et comme il est l’un des seuls à parvenir à te faire évacuer, tu te débrouilles comme tu peux. Carton de bière entre les mains et ballon sous le bras, tu te diriges vers les bas quartiers de la ville. C’est à cet endroit que se jouent les meilleures parties de basket-ball. Y’a toujours des gens avec qui partager ce moment et visiblement, aujourd’hui ne fait pas exception à la règle. Au loin, tu peux déceler trois silhouettes masculines, ce qui est parfait puisqu’ainsi vous pourrez former deux équipes de deux joueurs. Une fois à proximité du terrain, tu déposes tout au sol, attrape quatre bières et te retourne pour les offrir aux membres déjà présents. Regard qui se promène d’un spécimen à l’autre, tu passes près de crever avec ta salive en reconnaissant la tronche de l’officier de police. Pas n’importe lequel, le plus beau et le plus sexy du commissariat. ‘’ Qu’est-ce que vous faites ici ? ‘’ Demandes-tu, sourcils froncés. Il te traque c’est ça ? T’as encore rien fait de mal alors ouais, fallait s’attendre à ce genre de réaction de ta part.

En short et vareuse de basket, sans aucun autre accessoire, je me dirige vers le terrain de basket dans le sud de la ville où, s’ils n’ont pas changé d’avis, se trouveront deux gars impliqués dans un gros trafic informatique. Pas de micro sous ma tenue, pas d’arme à disposition, je suis simplement là en repérage, histoire de montrer ma tête une nouvelle fois et qu’ils s’y habituent. Leur confiance va devoir se gagner sur la durée. Le but n’est pas de faire une descente et de ramasser les quelques PC portables qu’ils ont peut-être dans le coffre de la voiture mais bien de comprendre leur fonctionnement. Qui est impliqué, à quel point eux le sont, l’ampleur du réseau. Sans surprise, ils sont déjà sur le terrain lorsque j’arrive sur les lieux. Mon téléphone et mes clés posés sur une table en bois sur le bord du terrain, je les rejoins et commence la partie, sans trop poser de questions. Il va falloir se montrer plus que patient et discret si je tiens à tirer quoi que ce soit d’eux, alors je donne plus que je ne reçois. Puis une tête se joint à nous, bière à la main, et le masque tombe l’espace d’une petite seconde. Le sang se glace dans mes veines, je blêmis et essaye de me foutre une claque pour me ressaisir. Ce petit con est vraiment partout mais jamais là où il faut être. Une passe vers Jackson et je trottine à sa rencontre, pratiquement collé à lui pour que les deux autres ne tirent rien de l’échange. Ferme là Windsor. Mon regard se veut menaçant alors que murmure entre mes dents. Je chope l’une de ses bières, venant faire sauter la capsule sur le bord de la table en bois et recule avec un sourire avant d’en prendre une gorgée. Deux contre deux ? Je propose aux autres et reporte mon attention sur le petit prince. Noah c’est ça ? Max. Je glisse "mon" prénom tout en lui soufflant le sien. Ils n’ont pas besoin de savoir le rang de celui qui vient de nous rejoindre et j’ose espérer qu’il utilisera son demi-cerveau pour rentrer dans mon jeu. T’es avec moi. C’est non discutable. Je tourne les talons et lève les bras, prêt à récupérer le ballon.

Tu t’imaginais passer une soirée relaxe à évacuer toute cette rage qui te bouffe de l’intérieur, passer tes nerfs sur ce foutu ballon et engloutir des litres de bière afin d’oublier ton titre, ton nom et même ta présence en ces lieux. Te réveiller au petit matin, allongé sur cette table en bois à ne plus te souvenir de la veille, mais toute forme d’espoir se dissipe lorsque tes billes lunaires se posent sur la silhouette de l’officier Boehringer. La surprise est lisible sur ton visage, encore plus lorsqu’il s’adresse à toi de cette façon. Il crache son venin et ta mâchoire se crispe sous le poids de ses mots. Tes opales vagabondent, elles analysent et tu mets très peu de temps à comprendre de quoi il est question ici ce soir. ‘’ Je mesurerais mes mots si j’étais vous. ‘’ Tu répliques du tact au tact avant de retirer ton sweatshirt. Ce mec te déteste et tu te demandes ce que tu peux bien lui trouver. Quoi qu’il en soit, de vous deux, c’est toi qui est en meilleure position. Un seul mot de ta part et son dur labeur se verrait réduit en cendre. Plutôt alléchant lorsqu’on voit l’attitude déplorable de ce dernier à ton égard. À ton tour, tu ouvres une bière, descends quelques gorgées avant de te mettre aux étirements. Tout le monde semble d’accord pour un deux contre deux, c’qui n’est pas plus mal, mais t’as pas envie de faire équipe avec lui, surtout pas. Tu restes silencieux, préférant ne pas relever le nom merdique qu’il t’attribut, sans parler du sien. Il veut t’avoir à l'œil, c’est certain et il a bien raison puisqu’au moindre faux pas de sa part, tu comptes le balancer aux membres de l’équipe adverse. - Max - Pour ce soir, est en possession du ballon, tu déjoues facilement l'assaillant qui te colle aux basques, réclamant une passe d’un geste de la main, passe que tu lui renvoi directement dans les tibias. Petite vengeance personnelle et plutôt satisfaisante pour le coup. Sans plus attendre, tu cours à toute vitesse jusqu’à la balle pour la récupérer.‘’ Tes réflexes laissent à désirer, Max. ‘’ Pique lancée avec une pointe d'amertume et de sarcasme, agrémentée d’un clin d'œil pour le principal intéressé avant de te remettre sérieusement au jeu.

La probabilité qu’il se trouve dans ce bas quartier de Boston était proche de zéro. J’ai pensé à l’éventualité de tomber nez-à-nez avec quelqu’un qui a déjà eu affaire à moi mais le nom de Windsor n’est pas apparu dans la liste des menaces potentielles. Je ne peux que questionner sa démarche. Cherche-t-il à se faire tuer ? Arrêter ? Est-il un pauvre gosse de riche qui est prêt à tout pour attirer l’attention sur lui, qu’elle soit bonne ou mauvaise ? C’est ce qui me semble le plus cohérent et ça me dépite, pour lui. Je n’ai jamais compris ce besoin constant d’être le nombril du monde mais cela vient peut-être de mon éducation des plus modestes. La richesse m’est tombée sur la tête du jour au lendemain lorsque mon paternel a accepté de faire de moi un Boehringer mais je n’ai jamais su adopter leur style de vie. C’est superflu et presque irréel. J’avais souvent l’impression d’assister à une scène de film alors que nous vivions une journée des plus banales en famille. La mâchoire contractée à ses mots, je ne réagis pas et tente de me détendre afin de ne pas me griller tout seul. Le jeune homme partira peut-être du principe que je lui dois une faveur s’il m’en accorde une aujourd’hui et c’est sur cette option que je vais miser. Win-win. Surtout vu la fréquence de ses dernières arrestations. Je dribble, effectue une passe dans sa direction et me prends le ballon dans les jambes une demi-seconde plus tard. Je ne peux que me demander s’il est débile ou s’il le fait exprès. A-t-il seulement déjà touché un ballon de basket de sa vie ou dois-je lui rappeler qu’on fait exceptionnellement équipe ? Je rêve de lui faire avaler son air suffisant et le sourire arrogant qui l’accompagne. Tu veux qu’on t’explique les règles ou ça va aller ? Je réplique d’un ton moqueur, comme si je taquinais un pote, car nous n’avons pas besoin que Tic et Tac se questionnent sur une animosité évidente. Je lui demande la passe d’un geste de la main, qu’Alistair ignore royalement, pour aller au tir lui-même. Au moins semble-t-il avoir compris le but du jeu. Comme quoi, quand tu veux… Je lui adresse un sourire en coin et tente de contrer l’adversaire. Je ferais tout aussi bien de mentionner une urgence et de me barrer avant que l’étudiant me grille car je doute fortement être en mesure d’apprendre quoi que ce soit à présent.