musique fait vibrer le crâne dans l’habitacle. le son résonne trop fort, espérant faire taire les voix. celles qui pensent trop, qui sifflent encore les mêmes instants repassés en boucle. l’envie de s’amputer l’encéphale, de le voir prendre feu pour ne plus penser à lui. l’alcool qui aide bien c’soir, qui rend l’âme plus paisible, chasse les dernières nuits à s’rendre malade de vouloir croire qu’il existe encore quelque chose de nous. fusée passe sous les réverbères, lignes fluorescentes eblouissent les vitres teintées de noire. sombre solitude masquée par des soirées bien arrosées, mensonges aux arômes de liqueurs sucrées. acidulées quand plus rien ne compte. les yeux qui se baissent quelques secondent pour trouver le verre mouillé d’une bouteille de bière. décélère, attrape la boisson pour boire quelques gorgées avant de vouloir la reposer. - merde, putain ! injures se fondent sous la chanson en fond. liquide qui s’déverse sur le tapis côté passager, j’essaye de limiter les dégâts et j’en oublie presque la route. les coups d’œil brefs ne suffisent pas à éviter la collision. boum. choc supportable, le dos qui se décolle d’son dossier brusquement. battement de cils, cerveau en pause l’temps de réaliser la scène. soupire, ferme les yeux en me laissant retomber contre le siège. - fais chier.. les doigts encore enroulés autour du volant, langue qui passe nerveusement sur l’émail des dents. et j’daigne finalement sortir d’mon véhicule, claquer la portière appréhendant de découvrir les dégâts. iris tachetés de pourpre, preuves d’une soirée d’excès. réajuste le bas de ma robe en faisant claquer mes talons jusqu’au devant de ma caisse. et ta stature s’détache dans l’ombre, plisse les yeux éblouis par les phares. essaye de distinguer tes traits jusqu’à ce que tu t’pointes à ma hauteur. - désolé, j’regardais pas et.. propos à peine cohérents. minable état dans lequel j’étais encore. - je m’y connais pas en caisse mais j’te rembourserais tout.

une énième soirée au volant d'un de tes bijoux. certainement en excès de vitesse mais pas au point de finir dans un arbre, t'es pilote de courses clandestines alors t'as assez de maitrise pour éviter les conneries de ce genre. une main sur le volant, l'autre portée à ta bouche, avec au bout de tes doigts une clope bien entamée. t'es posé et pourtant ta tranquillité ne dure pas, interrompue par un choc brutal droit dans ta caisse. la collision est brève, pas bien grave, mais putain qu'est-ce que ça te fait chier. tu respires un bon coup, sors de ta voiture sportive maintenant bien amochée. tu grognes en voyant l'ampleur des dégâts, pas des plus graves mais assez pour blesser ton âme de fan d'automobile. tes yeux se lèvent à la recherche de l'auteur de ce chef-d'œuvre et ne tardent pas à reconnaitre ce qui semble être une femme dans l'obscurité. tu t'approches, jettes ta clope au sol et l'écoute bégayer. la nana empeste l'alcool, la rougeur de ses yeux témoigne de ses consommations. cette boisson à laquelle tu ne touches plus depuis des années fait ce genre de ravages et ça te dégoûte. « tu regardais pas ou t'es juste complètement bourrée? » si c'était un homme t'aurais clairement pas prit le temps d'ouvrir la bouche, tu lui aurais sauté dessus. mais t'as encore assez de respect pour les femmes pour préférer la discussion à la baston. « putain, on t'a jamais apprit à pas conduire dans cet état? » t'as horreur des morales à deux balles et pourtant tu juges nécessaire de rappeler à cette inconnue à quel point elle a été inconsciente. « j'espère qu't'es blindée de thune miss » les réparations c'est pas gratuit sur ce genre de caisse. @Lena Castiglia

debout, entre les phares des deux caisses. le moteur qui gronde encore, laisse les yeux admirer les dégâts. capot enfoncé, déformé, autant que l’arrière de ton bolide. l’esprit qui reprend à peu près le contrôle, la tête qui refroidit instantanément. ou presque. l’alcool laisse le brouillard enfumé les pensées, tout se mélange, se braque et s’arrête quand ta voix se démarque enfin. les azurs viennent se figer dans ton regard, règne un semblant de mépris à l’intérieur et mes traits s’assombrissent dans l’ombre. - l’un ou l’autre, qu’est ce que ça change ? que j’réplique sèchement. soupire balancé, la soirée prenait un tournant plus irritant. adieu l’euphorie des derniers instants avant le drame. - tu comptes m’faire une morale à deux balles là ? j’avais pas besoin d’ça. pas besoin qu’tu viennes pointer du doigts le naufrage dans lequel j’étais en train d’me noyer. - j’t’ai dis que j’payerais les réparations. talons qui claquent à nouveau contre le bitume, m’approche de l’écart qui reste entre les deux voitures. comme si ça allait changer quelque chose, comme si j’m’y connaissais dans ce bordel de mécanique. - t’sais si j’peux encore rouler avec ? visage qui s’tourne à nouveau vers toi. pas vraiment certaine d’avoir envie d’reprendre le volant après ça. réalise que ça aurait pu être pire. - laisse tomber. j’vais trouver un uber.. récupère le téléphone dans la poche arrière, m’éloigne une peu pour trouver d’quoi rentrer. à peine le temps d’ouvrir l’application que tout s’éteint. l’écran devient noir, pouce qui tapote dessus agressivement. - putain d’téléphone de merde ! que j’grogne en le balance par la fenêtre encore ouverte. demie tour, me retrouve face à toi. - j’ai plus d’batterie.. tu peux m’prêter le tient ? les mots qui brûlent les lèvres. y’avait qu’toi ici de toute façon.

Let me be there

I can be, there 'til you're whole. you weren't touched by a man in so long
'Cause the last time, it was way too strong. ;;

un tour en voiture au beau milieu de la nuit qui se finit en accident, c’est pas le genre de soirée que tu préfères. et encore moins quand la demoiselle s’permet des manières alors qu’elle est en tort. tu souffles, mords ta lèvre pour retenir les conneries de sortir. tu prends ton mal en patience, elle promet d’assumer et payer les frais de réparations, semblant être le genre de meuf pour qui l’argent n’est pas un problème. tu acquiesces, « hm ». elle observe la voiture, se demande si elle est encore utilisable. la voiture est pas si défoncée qu’elle, apparemment. tes yeux se plantent dans les siens, la regardent de haut en bas « dans cet état, nan ». puis elle s’éloigne avec son téléphone et t’en profites pour t’allumer une clope histoire de te calmer. un bruit qui te pousse à te tourner vers la source, son téléphone qui s’écrase contre le béton. elle semble pas avoir de moyen de rentrer, son téléphone visiblement mort. « vas-y j’te ramène » que tu siffles entre tes dents. un élan de gentillesse, tu peux quand même pas la laisser seule dans la merde, même si elle a défoncé ta caisse. les dégâts sont pas si graves et toi au moins, t’es en état de conduire. tu verras à un autre moment pour les réparations. @Lena Castiglia