you, me and her.
tw : décès d'un parent, accident.

Assise sur le canapé, Rosalia a les mains sur ce dernier et est en pleine séance de gymnastique. Ce que j’entends par là ? Elle fait des squats depuis cinq minutes et refuse de se laisser habiller, ce qui commence doucement à me taper sur le système. C’était drôle cinq minutes mais là, je commence à perdre patience, je ne peux pas le nier. Allez crapule, on y va, Jax va nous attendre. Et s’il y a bien une chose que je n’ai pas envie de faire c’est que Jax nous attende. J’ai hâte de le revoir, de passer un moment avec lui et d’oublier que la vie n’est pas facile, que les responsabilités nous tombent toujours sur le coin de la gueule, qu’on le veuille ou pas. Rosalia a maintenant un an et avec cette douceur vient aussi la dureté de la réalité - je la connais parce que cela fait aussi bientôt un an que notre mère est décédée. Je soupire légèrement, me reprends rapidement avant de partir dans des flagellations intenses et attrape ma petite soeur. Une vérification rapide de la couche, je lui enfile son manteau, ses moufles mais aussi son bonnet qu’elle va arracher d’ici peu, je le sens. Rapidement emmitouflée aussi, je sors de l’appartement avec un sac à dos qui comporte tout ce dont on pourrait avoir besoin. Rosie râle lorsque je la mets dans la poussette mais elle se calme rapidement, acceptant le sort qui lui est réservé. Elle aime beaucoup tenter de marcher, être portée mais je voudrais être libre de mes gestes pour quelque situation se pose à nous. Le trajet en bus est rapide et je fonce vers le lieu de rendez-vous. De loin, je reconnais ton regard espiègle alors que tu détailles un stand. J’avance doucement dans ta direction et souffle ces mots, une fois à ton niveau : Bonjour. Est-ce que vous voulez danser avec moi ? Vous avez l’air d’être un danseur de qualité. J’en ris légèrement avant de te prendre dans mes bras rapidement. Ce contact est doux, agréable, je sais qu’avec toi, je n’ai pas besoin de mettre les petits plats dans les grands, tu m’acceptes comme je suis et ça, c’est un luxe que je chéris.

C’est si facile d’interagir avec toi. Je ne peux pas l’expliquer mais c’est comme ça. Les mots sortent facilement, la conversation est toujours fluide et si ma tête me demande de me calmer, je n’écoute pas vraiment ce qu’il en est. Mais j’étais absolument sérieuse ! T’as pas le niveau pour aller à Danse avec les Stars mais tu t’en sors si bien, tellement bien que ça me donne envie de recommencer. En club ou bien dans mon salon. Si je pousse la table basse, les jouets et le canapé, on arrivera bien à y faire quelque chose. Mais aujourd’hui, ce n’est pas pour la danse qu’on est ici mais bien pour passer du temps ensemble, manger des churros qui coûtent beaucoup trop cher et profiter de l’animation mise en place par le comité des citoyens. Ça bouge partout autour de nous alors Rosalia tourne la tête sans arrêt jusqu’à ce que tu te places face à elle. Je trouve ça craquant mais n’en dis rien. Faisons quelques manèges oui. Ruinons nous pour ne devoir manger que des pâtes le reste du mois. Ce n’est pas grave, ça ne sera pas la première fois que ça m’arrive et ça ne me gêne pas le moins du monde. Un sourire sur le visage, je commence à avancer et à me diriger vers les attractions qui sont accessibles pour Rosalia. On ne va pas faire grand chose, c’est sûr, mais c’est le moment partagé qui est le plus important dans l’histoire. Pas grand chose… Le petit monstre a été malade la semaine dernière alors ça a pas été de tout repos, j’ai réussi à avoir un peu plus de classes au théâtre pour les cours de danse pour enfants alors je suis refaite. Ça m’avait tellement manqué… Et il y a aussi eu l’altercation avec Jacob qui m’a quand même laissé une petite marque à l’âme, je ne peux pas le nier. Et toi alors ? Ton amie, ça va ? Que je m’inquiète rapidement. J’écoute tout ce que tu me dis et je m’inquiète de savoir si ça va réellement, bien que je ne puisse pas faire grand chose quand j’y pense. C’est ce que font les amis, non ?

La manière dont tu interagis avec Rosalia me fait sourire. La plupart des personnes que je rencontre la regarde un peu comme si elle était un extra-terrestre mais toi, t’es différent. J’avais pas besoin de ça pour le savoir mais là, je m’en rends réellement compte. C’est un peu comme une piqûre de rappel. Si j’avais un doute sur ta gentillesse et ton côté terre à terre, plus besoin de douter. Dès que je suis dans la routine de tous ces trucs qui s’ajoutent et changent, je te laisserai savoir. Merci beaucoup en tout cas… Ça me touche qu’il soit prêt à m’aider à me faire un peu plus d’argent pour rendre ma vie - et celle de ma soeur par extension - plus facile. Je commence à voir le bout des galères financières mais c’est probablement parce que j’ai de plus en plus d’aide pour Rosie aussi. Je ne pourrais jamais assez remercier la clinique Rylon pour toutes les informations qu’elle a pu me donner et l’aide dans les démarches. Sans eux, je crois que je ne serais pas grand chose ou nul part aujourd’hui. Un sourire sur le visage, je suis rassurée d’entendre que ton amie va bien et ne cherche pas à en savoir plus parce que tu ne sembles pas vouloir en parler plus que ça. J’imagine que si tu le voulais, t’aurais épilogué un peu. Je te connais assez pour savoir que tu peux parler de longues minutes sans faire attention au temps qui passe. Je te suis et fais attention à la réaction de Rosalia quand elle voit le manège. Ça n’a pas l’air impressionnant comme ça, à l’arrêt mais elle est tout de même intriguée. Il ne m’en faut pas plus pour la sortir de la poussette et la placer sur ma hanche. On fait un tour ? Que je demande à la petite, comme si elle allait me répondre. J’ai hâte qu’elle parle mais on y est malheureusement pas encore. Et puis elle se penche en avant pour tapoter la croupe du cheval en bois, imitant ton geste. Je crois que ça veut dire oui. Je ris légèrement et te regarde. Tu jettes un oeil sur la poussette le temps que j’aille nous prendre des tickets ? Que je te demande doucement. Je prendrais la chose avec nous quand on montera sur le manège mais là, je n’ai pas le courage de faire attention à tout. C’est pas facile de tout gérer mais ça va le faire. Tu réserves le cheval hein ? Que je te souffle en filant vers la caisse, ne te laissant pas vraiment le temps de refuser ou je ne sais quoi. Ça va me couter une petite somme que de prendre trois tickets mais ça vaut le coup et ça sera plus facile de prendre des photos, pour créer des souvenirs à la puce. On a presque tout d’une petite famille et c’est beau, je crois.

Dès que je pense que j’ai enfin la main sur ma vie, il se passe quelque chose de nouveau qui déstabilise complètement tout. Quand ce n’est pas de nouvelles responsabilités au travail, c’est Rosalia qui est malade ou, pire encore, le retour de Jacob dans ma vie. Tel un boomerang, il revient sans cesse et notre dernier échange de message a été plus que houleux. À cause de l’un de tes messages d’ailleurs. Ça m’a foutu dans une drôle d’humeur et je n’arrive pas réellement à en sortir. J’ai toujours peur qu’il débarque et s’impose comme il sait si bien le faire. Le pire c’est que s’il venait à tomber sur nous, il deviendrait fou alors qu’on est là dans la version la plus platonique qu’il nous ait été donner de vivre. On danse pas, on se dévisage pas vraiment, y a pas grand chose. C’est peut-être le temps de se remettre dans le bain, de se rappeler ces doux moments passés. J’en sais trop rien. Tout ce dont je suis sûre c’est que tu me plais mais j’ai peur de ce que mon ex petit-ami pourrait faire, nous faire. Aussi bien à toi qu’à moi et Rosalia. Je connais Jacob et c’est le pire. Et avant de laisser ces pensées me pourrir la sortie, je file en direction du kiosque, jouant celle qui n’a pas entendu le début de ta phrase. Je peux bien nous payer ça. Rosie est trop petite pour réclamer quoi que ce soit et moi, je me passerai de sucreries et d’attrape-nigaud comme dirait ma mère. C’est pas grand chose. Que je souffle en haussant les épaules et te souriant légèrement. Tu m’as promis une peluche après, l’oublies pas. Alors je t’économise une dizaine de dollars dans ce manège qui va faire le tour du propriétaire pendant quelques minutes. C’est fou comme un rien fascine les gamins. Mais toi aussi, t’es fasciné. Je te vois chevaucher ton fidèle destrier et ne peux m’empêcher de rire au spectacle qui s’offre à moi. Je sors mon téléphone pour prendre un cliché rapide et m’occupe de Rosalia qui éclate de rire, se lançant en arrière. Pas comme ça mon coeur. Que je souffle en me penchant en avant pour attraper ses bras et les rênes. Je bouge ces derniers et ça la fait regarder droit devant elle, la bouche qui souffle des ‘oh’ et des ‘ah’ à mon plus grand bonheur. Allez on fait la course, vite, vite, on va gagner ! Les chevaux n’avancent pas au même rythme et on dépasse légèrement le tien avant que le notre ralentisse. Ce changement dans les vitesses est drôle et pourrait vraiment faire quoi à un gamin qu’il a le contrôle sur le canissé de bois. Oh non il nous rattrape ! Que je souffle et, pour la première fois, la voix de Rosalia dit autrement chose que le banal “reur” (qui veut dire soeur) Oh non ! Les yeux ronds comme des billes, je te regarde et dis Elle vient de parler ? Je suis pas folle, elle vient de parler ? Elle nous a pas récité du Shakespeare mais c’est tout comme ! C’est trop bien mon amour. Que je souffle en embrassant le crâne de Rosalia qui se tient droite, prête à doubler Jax au prochain virage ! Bordel, cette dose de bonheur…

Savoir que tu n’oublies jamais tes promesses m’arrache un sourire et m’offre ce sentiment de sécurité dont je suis dépourvue depuis quelques mois maintenant. Je me dis tout simplement que si tu n’oublies jamais tes promesses, c‘est que tu y portes de l’importance et ça, ça n’a pas de prix. J’ai tellement été habituée aux gens qui ne tiennent pas leurs promesses - mon géniteur, ma mère mais aussi Jacob - que ce sont des choses auxquelles je fais attention maintenant. Le manège est rapidement en route et je ne peux m’empêcher de rire en voyant la scène que tu nous offres. C’est bon enfant, ça fait rire Rosalia et pour moi, c’est tout ce qui compte. Ma vie a tellement changé ces derniers mois mais je commence enfin à trouver un équilibre qui me plaît malgré les intrusions intempestives de mon ex petit-ami. Elle finira par te mettre au défi et tu n’auras plus que tes yeux pour pleurer. Que je lance en riant légèrement. Parce que Rosalia sera une battante, je le sais. Il est tout bonnement impossible que cela ne soit pas le cas. Tout va très vite et j’attrape ta main pour descendre du manège alors que j’ai Rosalia dans les bras qui sautille pour refaire un tour, je le sais. Elle a apprécié son moment et je le comprends. Moi aussi, j’ai vraiment apprécié tout cela mais probablement pas pour les mêmes raisons que ma petite soeur. Lorsque nos mains se lâchent, le courant d’air me le fait bien remarquer et je m’occupe l’esprit en replaçant Rosie à sa place. Elle pointe le manège qui démarre sans elle et fais quelques mouvements pour montrer son envie de remonter. ​​Peut-être plus tard mon chat. On va se balader un peu d’abord. Que je dis en embrassant son front avant de me placer derrière le guidon de la poussette en t’écoutant. Mes yeux glissent sur les différents stands et je souffle Allons vers les animaux, ça me semble être le mieux. Elle n’y connait rien en princesses de toute façon donc ça lui fera tout autant plaisir d’avoir un énorme panda avec elle que la reproduction de Raiponce. Et sinon alors, pas de nouvelles productions en cours avec l’université ? Je te demande ça le plus simplement du monde. Je ne sais même pas si Hamlet est fini ou pas, je n’ai pas trop fait attention mais c’était il y a presque six mois l’ouverture et rien ne tiens si longtemps à Boston quand ce ne sont pas des comédies musicales. Je sais que je t’ai dis que je n’avais pas trop de temps en ce moment mais pour t’aider avec tes lignes, je trouverai du temps. Ça impliquera sûrement le fait que tu doives venir à la maison comme ça on pourra faire ça tranquillement pendant que Rosie dort le soir. Ou l’après-midi en week-end, mais là encore ça risque d’être compliqué. Allez, à chaque fléchette, tu me donnes une information sur ce que j’ai manqué depuis l’ouverture d’Hamlet. Les messages c’est bien mais on ne va jamais trop loin dans la confession, dans la prise de nouvelles. Je crois que toi comme moi, on préfère les relations réelles à celles qui sont virtuelles.