Salem, la belle. Enraciné dans un passé qui ne veut s’éteindre. Sol tâché par le sang. Maudit selon certain. En son sein, règne une atmosphère épaisse. Porte sur ses épaules, le poids de l’injustice. Accompagnée d’un brouillard glacial, une torpeur matinale envahit les lieux. Virevolte dans l’air. Se mêle à quelques flocons perdus. Foulant le bitumes, les étrangers s’avancent. Déambule au milieu d’une ville étrangement calme. Ce qui change des étés touristiques. En hiver, c’est calme. Tellement qu’il peut sentir les mornes âmes sortirent de leur cachette. Marcher au côté des vivants. Il a toujours cru Scott en une sorte de survivance. A ceux qui refusent de partir par tourment ou mesquinerie. Silhouettes irréelles. Donne l’impression de flotter au milieu de la brume. A ses côtés, la jeune femme ne fait presqu’aucun bruit. Derrière elle, flotte sa chevelure blonde. Se lie au vent emprunt des embruns de la mer. Elle qui se trouve à quelques pas. « Tu veux commencer par quoi ? » Réchauffe leur main, un café brulant qu’ils sont incapable de ressentir correctement à cause du froid mordant.

@Scott Guerin || Ca m'a prit soudainement, comme une véritable envie de tout plaquer pour les deux jours à venir, comme pour me prouver que s'il le fallait, j'en étais capable, de renoncer à cette vie, à m'en protéger. Dans mon sillage, j'ai entrainé Scott, sans trop savoir ni comment ni pourquoi. Je l'ai simplement fait. Salem est froide à cette époque, peut-être bien plus encore que le reste de l'année, mais qu'importe, pull, manteau et écharpe pour nous protéger du froid et ça fera l'affaire. Pour ce qui est du reste, de l'atmosphère oppressante des lieux, je ne sais pas bien à quoi l'attribuer. Est ce que ce sont les légendes urbaines qui jouent un tour à mon esprit ou est ce qu'il était désormais temps pour moi d'admettre que le paranormal puisse être une vérité fondamentale de notre monde ? J'ai envie de croire que la première option est la bonne, de continuer à rejeter ce qu'on a pu m'enseigner à une époque. Pour moi, dieu, le diable, les sorcières et tout cela n'existe pas. Et même si j'en rigolais parfois, je ne prenais rien de tout ça au sérieux. Mais un peu d'histoire ne pouvait pas nous faire de mal, et puis c'était toujours l'escapade d'un week-end. « Le musée des sorcières ? Histoire de se mettre tout de suite dans l'ambiance. Et puis avec un peu de chance, on trouvera aussi quelque chose pour te rendre moins chiant. » Comme dit, j'y crois pas, mais ça m'empêchait pas d'en plaisanter.

Salem passé. Défile dans sa mémoire, des souvenirs d’enfances. Emmené ici par sa mère. Archéologue et passionnée d’histoire, elle avait dédié son cours à ses femmes et ses hommes tués par folie humaine. C’est par ça que désire commencer la jeune femme. Le vent fouette leur visage. Met en garde les étrangers sur les mensonges proférés. Les pousses à s’abriter d’eux dans l’austère musée. Lui dont le sol est souillé par les touristes en quête de sensation ou d’empathie. « Tellement chiant que t’as réquisitionné sa présence tout un week-end. » Air faussement désolé. Justement, le voilà qui se dresse devant eux. La fin de son café avalé d’une traite, il bifurque vers l’entrée. Jette ledit gobelet dans une poubelle publique. « Tu crois en ça ? En la sorcellerie ? »

@Scott Guerin || TW : Secte, maltraitance infantile
Je ne suis plus croyante depuis bien longtemps, je me demande même si je l'ai été un jour, mais au delà de la croyance, il y a l'histoire. Si je suis là, c'est pas non plus par hasard, ou simplement pour me faire peur, mais pour me rappeler ce qu'on vécu les femmes à travers l'histoire, et ce qu'elles vivent encore aujourd'hui. Je suis plus vraiment à plaindre, j'ai appris à survivre dans des mondes dominés par les hommes dans lesquels on m'a appris à être leur égale, même si certains se plaisent encore à me rappeler que ça ne sera jamais vraiment le cas. J'ai besoin de retrouver cette hargne, de retrouver l'envie de vouloir m'en sortir par moi-même et de m'en donner les moyens. L'engrenage pour enfin pouvoir mener la vie que je voulais était déjà en route, mais il manquait encore quelques pièces que moi seule pouvait forger. C'est cette pièce que je cherche ici aujourd'hui, dans l'histoire de ces femmes - majoritairement- exécutées pour des raisons qui n'ont aucun sens. « C'est mon côté maso ça ! » Après tout, j'aurais pu venir seule, c'est vrai, mais j'ai toujours haït la solitude, et malgré tout Scott n'était pas le pire compagnon de week-end que j'avais eut. « Non, pas du tout. » Que j'affirme calmement. « J'y croyais un peu plus enfant, mais mon passage chez les mormons m'a soigné. Après tout, quand c'est toi qu'on commence à traiter comme une sorcière ou qu'on maltraite parce que c'est "la volonté de dieu", tu finis par vite renier toute ces choses. Je ne crois pas en dieu, ni à la sorcellerie, ou au paranormal. » Je hausse légèrement les épaules. J'avais commencé à nier tout cela il a bien longtemps.