Le mépris dans le regard, je regarde les filles disparaître du tableau de ce soir. Je m’impose, en quelques mots, pernicieuse prose. Bien décidée à le voir me rembourser ce téléphone que j’utilisais pour servir nos marques, nos intérêts. Moi, pour faire mon entrée dans les empires de la technologie, et lui, pour se voir lier à, de l’Amérique, la petite poupée. Chouchou désignée depuis que je suis née. Et détaille l’objet que j’ai éclaté, juste parce qu’aujourd’hui, sous le soleil, je m’ennuyais. Parce qu’aussi de cette association, je n’en ai pas vraiment envie. Je déteste me dire que WW pourrait bel et bien avoir besoin de lui, mon entreprise n’avait besoin que de moi, jusqu’ici. Malheureusement pour moi, il semblerait, qu’il n’y a pas d’autres disponibilités dans les enchères des jeunes héritiers de marques réputées. Alors je me propose pour jouer les pétasses pour le temps que ça va durer.

De toute ma candeur, je l’observe, le regarde de haut pendant qu’il sort de sa poche le tabac froid, déteste le goût comme l’odeur. Ecœurée par cette vision, j’exècre plus encore cette association. « On t’as déjà dit qu’il déjà qu’il existe des jouets spéciaux pour çà. » Attends, je me demande, dans le bide c’est tout ce que tu as ? Ou c’est juste que ton niveau d’alcool est déjà trop élevé, que tu ne sais pas jouer. « Un téléphone, c’est à l'oreille, pas ailleurs. » Une seconde, ma langue dénote mes dents, s’apprête à persifler, tandis que j’incline le visage sur le côté. « Tu surestimes le vibreur. » Mais aussi mes besoins à ce niveau-là. Sauf qu’on ne va pas disserter dessus tu ne crois pas ? T’en viendrais à me dire que t’es le meilleur, et ça me donne d’avance des haut-le-cœur. « Et pour ton information, » juste une petite précision, « il n’est pas denté. » mon entre-jambe, alors ce n’est pas l’endroit où le téléphone s’est abîmé. Sourire surfait, d’une princesse aux airs parfaits. « Tu m’invites ? » parce que j’arrive à le lire dans tes yeux, combien ça te fait plaisir qu’on soit ici tous les deux.

La cigarette, il la glisse sur son oreille, vision qui me débecte, mais au moins, je me dis que je n’aurai pas à supporter de lui parler au travers d’un écran de fumée. « Juste vérolé, mais je n’irais pas vérifier. » Blablabla, j’en lève les yeux au ciel avant de lancer un regard plein de dédain sur toi. Qu’on se le dise, cette idée, elle est bel et bien partagée. « On est deux. » Je n’ai absolument aucune envie de me retrouver dans une position intime avec lui. N’ose même pas imaginer les nausées qu’il engendrerait si un jour il s’en venait à me toucher. Ca me dégoute rien que d’y songer.

Mais me propose – juste pour l’emmerder et parce que j’espère qu’il me rembourse le téléphone estampillé de sa marque attitrée – pour l’accompagner au fil de cette soirée. « J’ai le choix ? » Pas vraiment, tu vois. Puis autant se l’avoue personne ne me dit jamais non. Paraît que je suis d’un ange une incarnation. Tu sais, qu’on me donnerait le bon dieu, sans confession. Et quand sa main se plaque sur le bois du bar, je sais que j’ai gagné. C’est bien ce que je pensais, le non, pour moi, c’est jamais. « Si j’achète ce bar, tu pourrais en être éjectée… » Et la soirée deviendrait soudainement plus terne, je le promets. Sa menace ce n’est même pas un peu qu’elle vient me perturber. Parce que je me dis que ce n’est pas à ce point qu’il peut me détester. Pas jusqu’à acheter ce bar de bas étages, à ne pas en douter. Le dollar est trop précieux pour être gaspillé. Vénale, vous pensez ? « Une bière, peu importe la marque. » Une fois n’est pas coutume, une légère grimace de dépit se glisse sur mon visage, à l’entente de l’alcool demandé. De la bière, vraiment ? Je devrais peut-être lui préciser les ravages que l’alcool peut faire sur le long terme, qu’il s’en mordra les doigts lorsque la génétique reprendra ses droits. Bedonnant, vieillissement de la peau, tout ça… J'affiche d'ailleurs ma désapprobation par une onomatopée, souffle aspiré bruyamment entre mes dents comme si la souffrance n'était pas jouée. « Mauvais choix. » prends exemple sur moi « Virgin mojito. » j’annonce à mon tour, et de ses possibles blagues sur le nom du cocktail choisi j’en aperçois déjà les contours. « Alors sinon, » je ne sais même pas pourquoi je fais la conversation, pour montrer qu’elle n’est pas si pire que ça, notre association, et puis, ca fera plaisir à nos campagnes de communication, j’agis comme si j’avais entendu l’éternel « moteur, action ! » et persifle, « tu t’éclates au Summer Camp ? » ou à toi aussi, ça te donne la gerbe tous ces étudiants ? On vaut mieux que ce genre de gens. « T'as fait des rencontres, des affaires ? » pour ce que ça m'intéresse ou ce que ça peut me faire. Je cherche juste de quoi réajuster mon venin de vipère.

Qu’on se le dise, plus je l’agace, plus la situation me plaît, plus je prends plaisir à rester, à m’imposer. Son espace vital, le violer. Au départ de cet aparté, je venais me plaindre, je venais geindre. Forcée par celle qui dirige mon image, et cette même image, elle est liée à celui avec lequel je suis en train de converser. Dont la joie est présentement si bien cachée. « Des vacances, à défaut de m’en faire, tu sais c’que c’est ? » Non, étant donné que c’est depuis que je suis née, qu’en permanence je dois briller. Le temps, c’est de l’argent, tu connais ? C’est le refrain qui m’a bercée. Alors, on ne se refait pas, c’est dans mes gênes, quelque chose comme ça.

Alors je lève les yeux au ciel, fatiguée par son manque de répartie flagrant. Je t’ai connu meilleur, non franchement. Je te trouverais presque décevant. Mais bon, je préfère me dire qu’on en est encore à la phase entraînement. Et que possiblement son esprit, faute de l’alcool, n’est plus très clairvoyant. Et les boissons finissent par arriver, ce n’est même pas deux secondes qu’il laisse défiler avant de choper sa bouteille pour la porter à ses lèvres. De la vision, j’en grimace un peu, et l’entends prononcer ; « On trinque pas. Rien à se souhaiter t’es d’accord ? » Long soupir de ma part avant de déposer mes ongles sur mon cocktail, je bats la mesure en un tintement qui se veut agaçant, avant de débuter, sous son œil mauvais. « Oh ça va. » C’est de bonne guerre, un truc comme ça. « Détends-toi. » juste un brin, faut savoir être mignon, mon petit chat. T'es en vacances, c'est ce que tu tonnes, je crois. « Elles étaient moches. » Les deux filles qui étaient là juste avant moi. « Au moins, grâce à moi, t’as pas tapé dans n’importe quoi. » Et je lui souris de toutes mes dents, mon verre le soulevant, pour trinquer, faire semblant, en ajoutant ; « pour une fois. » C’est plus fort que moi.