peut-être que la solution, c'était de ne pas chanter seul ?
l'inconnu voulait essayer quelque chose.
madison fronce le nez légèrement, et ses yeux s'frottent à ceux de johan.
ils allaient devoir coopérer.

death doesn't discriminate
between the sinners and the saints
it takes and it takes and it takes
and we keep living anyway
we rise and we fall and we break
and we make our mistakes
and if there's a reason i'm still alive
when everyone who loves me has died
i'm willing to wait for it
i'm willing to wait for it

il a les yeux clos, depuis le début.
ses paupières regardent à travers la peau, cherche le rose derrière.
il se concentre, et toutes ses pensées se flashent en une demi seconde.
la main d'madison se plaque sur son coeur,
là où les doigts de johan se sont installés.

i am the one thing in life i can control
i am inimitable
i am an original !

les yeux s'ouvrent,
il en a les larmes dans les orbites, la note était différente,
facile, même.

wow.

S'introduire dans les espaces intimes des gens - sans jeu de mots graveleux (ou presque) - est une passion chez moi. J'aime bousculer, j'aime déranger. J'aime être témoin de la soie fine d'une aura qui s'exprime. Le myocarde qui vibre, les cordes qui chantonnent de l'or. Il est là le don, dans son cœur. Je ne saurais dire si c'est mieux parce que je n'ai pas vu ses entrainements précédents mais en tant que crooner, il y a mis plus d'intensité.. Il a la voix qui tempête les êtres. Tu es la Passion. Sinner and Saint. Tu es les deux. Ce sont les premiers mots que je prononce. Paumes qui restent liés. Ce qui ne me dérange pas en soit. Ne chante pas pour la performance. Chante pour toi. Chante pour moi. Chante pour le vide. Exalte tes sens, pas .. Je ne te connais pas .. Mais tu n'as rien à prouver. Deviens la musique, Ne sois pas ce aaron. Deviens un, avec les mots. Et rien de plus.

il absorbe les mots, se fait pénétrer par chaque phrase et chaque lettre.
il comprend tout, madison et il intègre les idéaux que johan lui transmet.
la main se relâche, les épaules se détendent, le souffle se retrouve.
il y a de la magie dans l'air, et ce que raconte johan, c'est véridique.
autant il devait être aaron burr par souci... technique,
autant les paroles lui parlaient.

ok.
j'vais te la faire comme si j'étais devant le jury.

il saute sur scène, va vers l'enceinte et mets play sur son téléphone.

theodosia writes me a letter every day
i'm keeping the bed warm while her husband is away...

les paroles défilent, et il est théâtrale, madison.
ce n'est pas ce qu'il faut ?
bien sûr que si, c'était tout ce qu'il fallait pour y trouver sens.
il était lui,
vivait la chanson comme s'il cherchait à conquérir le monde, en dépit de son pire ennemi.
chacune des phrases sonnait clair et précise.

il regardait johan, cherchait à percevoir ses réactions.
allait-il avoir ce rôle ?
il l'espérait tant que ça devenait obsessionnel.

et à la fin, quand les dernières notes de piano furent établi,
il soufflait.

ok.
j'ai fini pour aujourd'hui je crois ! et il se mit à rire légèrement.
l'entrainement avait été périlleux mais vainqueur.

Je le regarde se relever. Devant un jury ? Il devait pas chanter pour lui-même ? Ca se trouve mes mots n'ont pas été les bons. Je pivote quand même pour me mettre face à lui, position en tailleur. L'inconnu rayonne. C'était clairement mieux. Là, je pouvais le dire. Peut-être un peu trop théâtrale mais je suppose que c'est ce qu'il faut. Il n'en demeure pas moins transcendant. Et j'applaudis véritablement quand il a terminé. Tu es très beau. Que je lui dis sans aucune arrière pensée. Il est Lumineux. Saint more than Sinner. Il m'avait embarqué. Et même si cela faisait que quelques minutes que je connaissais cette chanson, j'avais la sensation de découvrir un bout de son histoire. Je suppose qu'il est débloqué le bonhomme. Mais pas moi. Enfin si. Mais rien de bien concret pour me faufiler dans mon atelier. Pourquoi tu donnes l'impression de jouer ta Vie quand tu chantes ?

il tape dans ses mains, l'enfant gâté.
madison sent qu'il se rapproche de cette date butoir où tous ses efforts seront enfin récompensés,
l'espère-t-il du plus profond de son âme.
il tire une révérence très... hollywoodienne et il pouffe légèrement,
l'amusement qui se dessine sur ses traits.
parce que c'est le cas ?
cette chanson... ce rôle.
il peut me faire quitter harvard et fouler les planches des plus grandes scènes du monde.
ce rôle, c'est le rôle de ma vie.

bien plus que ce qu'il était lui-même.
madison bûchait jour et nuit pour appréhender chaque faille qui ne le conduirait pas à ses rêves.
même son homosexualité in disguise était un frein qu'il ne permettrait pas.

mais chanter m'libère des choses... des trucs.
il mime avec ses mains comme si des choses sortaient de son ventre,
parce que ça vient d'là, tout ça.
de son estomac, de son corps, de ses tripes qui ont des choses à raconter.

Je hoche la tete. Il courait apres ses reves. Il s’en donnait les moyens. J’avais concrétisé le mien. Il me restait plus qu’a grimper les échelons. Et me faire un nom solide dans la mode. « Alors je suis plutot du genre a te dire, aies ton diplôme sans delaisser ta carriere. Mais on sait tous que chaque opportunité ouvre une porte vers l’inconnu et son objectif. » Je fronce le regard, lisse ma barbe par habitude. « Ca te libère quoi exactement ? » Je l’observe le Splendide, en attendant de mettre un pied de plus dans son monde. Il est Passionnant. Passionné. Un Saint passionné. « Mais oui c’est ca ! Passion ! Oh putain que je t’aime toi ! » J’embrasse son front - j’ai failli viser ses levres - a pleine bouche et redresse, heureux de mon illumination. « Tu veux venir avec moi ? »

madison éclate de rire, surpris par ce baiser d'un profond respect,
où la fierté dépassait même ce qu'il aurait pu imaginer.
il y avait de la folie dans cet homme,
il avait une vieille âme. ce n'était pas péjoratif, mais il semblait dans son regard,
dans ses paroles,
dans ses gestes,
que des milliers d'âme le regardaient d'un arbre de vie.
madison était hypnotisé, complètement déboussolé même par ce qu'il dégageait.
pour l'instant, je ne peux les décrire, ces choses.

parce qu'il n'avait pas mis les mots dessus.
c'était juste... là.
complètement naturel.

où ça ? au bout du monde ?
parce que tu m'as l'air du genre à m'emmener dans les confins d'une forêt exotique.
pourquoi avait-il dit ça ?
comme si c'était réellement possible ?

J’éclate de rire a mon tour. Je lui tends la main, sourire malin. Sans lui laisser le temps de l’attraper, je marche reculons, le regard baignant dans le sien, les effluves d’un déblocage coulant dans les veines. « Viens dans mon exotisme, qui sait, je te verrais enfiler un pagne et me faire quelques pas de danse » Souvenir d’une tribu africaine, l’un des plus beaux. Pas devant, pas derrière, les hanches qui se bougent. Pas aussi parfait que les autochtones mais qu’est-ce que je me sentais vivant parmi eux. C’est en dansant maladroitement, ce qu’on m’a appris que je file vers la sortie. « Viens petit explorateur. Qui sait, tu me feras vivre ces choses-la»

saisissant la main tendue, madison descendit alors les marches de la scène pour rejoindre le partenaire.
il y avait de la magie dans cet instant, et il avait une réelle envie de développer quelque chose d'artistique.
il était certain qu'il pourrait l'aider à se dépasser.
peut-être en danse.
peut-être en chant.
mais ce johan, des étoiles éclataient dans ses iris.

j'peux pas t'promettre des danses de ce style,
mais j'ai des trucs en stock ! l'allée des fauteuils s'allongeaient et ils la traversaient pour aller... on ne sait où.
l'ours bien léché semblait savoir ce qu'il faisait et c'était comme si songe se transformait en livre.
madison éclatait d'un rire sincère et véritable, à l'essai de la danse,
l'imitant, il ne parvint pas à être aussi grâcieux que son compère !
va falloir de l'entrainement je crois !

« On fait honte aux ancetres de nos ancetres. Mais je suis pour les leçons. Faut que je reparte.  » Moi qui descends des grands vikings, c’etait assez cocasse comme propos. On quitte la salle, emprunter un couloir pour aller dans le batiment de mes etudes. « Tu as commencé cette annee ? » Le questionner, apprendre a connaitre ma Clé. On traverse les jardins, je salue quelques gens de ma promo. Pour enfin atterrir dans une salle qui est dédiée à moi. « C’est le bordel. » J’ouvre la caverne comme je la surnomme pour lui presenter des tenues, des croquis grandeur humaine accrochés au mur, des rouleaux de tissus, des collages, des photos. Le bordel creatif. « Bienvenue dans ma tete. »