Chez Joey
06 avril
Alors même si elle ignore encore ce qu’il se trame en son intérieur, elle a voulu tenir au courant l’homme qui lui a ravis son cœur. Persuadée, à la finalité, que c’est une chose qu’il devait savoir. C’est bien ce que l’on fait, non, quand on vit une histoire ? En texto, pour elle, ça lui semblait moins compliqué de s’exprimer, lui dire qu’elle a du retard, connaître ses envies et espoirs, pour passer à un autre sujet, oublier. Mais Dutch c’est autrement qu’il en a décidé, et c’est pour ça, qu’elle l’attend, assise, sur son canapé.
ft. @Joséphine Porter |
Bombe à retardement qu’elle a amorcée plus tôt dans la journée, celle qui pourrait potentiellement dans quelques mois changer nos quotidiens à l’un comme à l’autre, en dénaturer l’usuel refrain. Mais rien ne saurait changer mes sentiments pour elle, même si je ne parviens pas à le lui prouver par textos. Alors j’ai préféré lui proposer d’en discuter calmement, une fois posés plutôt que de façon déclinée, me présentant à son domicile même si le trajet cette fois m’a paru beaucoup plus long que d’accoutumée.
Sans doute peut-être légèrement préoccupé parce qu’au travers de ses messages elle en semblait persuadée. Sinon, dans le cas contraire, elle ne m’en aurait jamais parlé, ses cycles ayant déjà été sujet à débat une fois et une seule, pour plaisanter.
La voiture s’est arrêtée aux pieds de son immeuble à la façade que je trouve changée, coupant le contact pour m’y engager. Le doute s’installe à mesure que les marches sont gravies et curieusement l’atmosphère elle aussi s’est alourdie, presque devenue pesante une fois devant sa porte d'entrée. Paume rabaissant la poignée, je me suis permis d'y pénétrer, craignant une seconde de me ramasser contre sa porte si jamais elle en avait verrouillé l'accès. Et à l’instar de ces moments interdits, souriant malgré mes réticences, je me suis présenté devant elle sans un bruit.
Chez Joey
06 avril
Toutes à ses réflexions, elle l’entend finalement pousser la porte de sa maison. Son regard le trouve directement, car ce n’est pas comme si l’espace était, ici, bien grand. Elle pince ses lèvres, fautive d’un rien, si ce n’est d’avoir était de nombreuses fois son écrin. Elle observe le sourire de façade qu’il tente d’afficher, sans trop comprendre de quoi il voulait parler. Il n’est question que d’hypothèses tant qu’elle n’a rien fait pour le confirmer. « Salut ? » Elle prononce, en déliant ses doigts. Elle se demande s’il l’aimerait qu’importe ce qu’il peut se passer en elle depuis ces deux derniers mois. Qu’il y ait oui ou non en son intérieur, une part de toi.
ft. @Joséphine Porter |
Elle est assise, patiente dans un silence qui s’éternise, pour l’avorter de son timbre de voix qui se veut inconstant cette fois. « Salut ? » C’est tendu et pourtant ça ne l’est pas, d'une réserve venue se greffer à nos échanges mais sans savoir encore pourquoi. Même son appart me semble à présent étranger alors que rien n’a bougé. Tout est exactement à la même place qu’auparavant, de ses plantes vertes malmenées à ce bibelot qu’elle a tenu à ramener de France. D’un raclement je me suis éclairci la voix sans même m’exprimer, un élan, coup de pied pour me déloger de l’embrasure et venir m’assoir sur sa table basse après en avoir éprouvé la solidité d’une paume fermement plantée dessus.
Et les deux mains jointes, je suis resté là à la contempler, soupirant en pensant avoir trouvé de quoi la faire de nouveau rayonner. « Excuse-moi. J’suis en retard. » Un mot qui sait assombrir une journée comme il peut également la faire étinceler, lorsqu’il est dit avec sourire, petite moquerie du soir pour chasser de son esprit toute idée noire. Et mes doigts venant chercher les siens, se liant lentement à ses phalanges meurtries, animé par la cette volonté de briser toute distance et mur que cette nouvelle pourrait bâtir, je lui ai murmuré : « Alors. Il parait que nous avons un petit problème Mlle Porter ? »
Chez Joey
06 avril
ft. @Joséphine Porter |
Discussion tout aussi pénible pour elle que pour moi puisque même me regarder en face durant la recherche de ses mots est trop lui demander, mis au rebus alors qu'en cet instant je n’ai d’yeux que pour elle et ses secrets. « Écoute, » Mais je ne fais que çà, attendre et écouter ce qu’elle trouvera la force de m’annoncer. « Je voulais être honnête, » et sur ce point je hoche la tête parce que c’est un des points sur lesquels nous nous étions accordés tous deux le jour où nous nous sommes prononcés. « Savoir si tu partirais en courant, si... » Si… ? Alors mon visage s’abaisse vers elle comme pour l’inciter à continuer dans ses aveux, les traits contrariés à l’idée de ce que je crois avoir deviné. Elle m’a pris pour l’un de ces connards qui n’assument pas leurs ébats, délaissent leurs compagnes une fois avoir engendré.
« J’sais pas. » Tu devrais quand même depuis le temps avoir une idée de qui partage tes draps. « T’as jamais réalisé… » un détail qui devrait t’aiguiller et balayer tes appréhensions. Les mains resserrant leur étau sur les siennes, mon regard cherche et parvient à fixer finalement son attention. « Que je ne t’ai jamais demandé si tu te protégeais…. Moi non, et j’en étais parfaitement conscient, » qu’un jour ou l’autre un tel accident pouvait arriver et que malgré les apparences l’idée ne me déplaisait pas tant, ne m'a jamais dérangé.
Chez Joey
06 avril
ft. @Joséphine Porter |
Ce qui arrive doit arriver même si elle de son coté à du mal à le réaliser, à saisir l’essence des mots qui lui sont desservis en des aveux travestis. « Donc si c’était le cas » T’as bien compris. Inutile de la faire languir plus que nécessaire. « Je resterais. » Non pas par obligation ou par pitié mais parce que tel est mon souhait même si les choses vont plus vite que je ne me les étais imaginées. « Qu’est-ce qui a pu te faire croire le contraire ? » Mes activités ? Mon cercle restreint qui ne compte que des noms à éviter ? Le fait peut-être que je sois toujours – sans doute un peu moins depuis le temps – recherché par les autorités ?
Tout ceci, ça peut se changer et je l’ai déjà une fois prouvé, capable de me réinventer une vie même si aujourd’hui les choses vont pour le mieux, le destin m’ayant enfin souri. « Puis un peu de retard ça ne veut rien dire, » si telle est ta plus grande hantise. « Le stress… » peut tout expliquer et graviter au milieu de toutes ces femmes la nuit t’a peut-être un peu déréglée si on en croit le mythe selon lequel vous avez toutes entre vous tendance à vous synchroniser.
Chez Joey
06 avril
« Puis un peu de retard ça ne veut rien dire, » alors la langue de Joey va humidifier ses lèvres, gênée. « Le stress… » De quoi ? Si elle le fait, c’est depuis quelques jours seulement, mais il ne le sait pas, alors elle sonne une bonne fois pour toute, le glas. « Apparemment, je stresse depuis deux mois. »
ft. @Joséphine Porter |
Il n’y a rien d’impossible à celui qui s’en donne les moyens et je sais être en mesure de pouvoir me débrouiller suffisamment pour assurer de ce côté, si jamais il le fallait. Trouver une autre identité, la dernière et cette fois l’endosser sans jamais rebrousser chemin, couper les ponts avec tous ceux qui m’ont permis de me faire un nom, une réputation et de tout quitter du jour au lendemain. « Et ce que je fais. » Travailler la nuit au Sidh ? Il n’en serait plus question, forcément, son visage pris pour cible afin de m’atteindre dans les premiers temps. Elle devrait, si tel est le cas, quitter ses fonctions pour gagner elle aussi l’anonymat. Pourquoi pas la France...
« Apparemment, je stresse depuis deux mois. » Les jours qui se transforment en semaines et qui deviennent des mois, « grosse synchronisation » tout de même qui met davantage en lumière la théorie tant appréhendée, me laissant à ma réflexion avant de venir subitement m’assoir à ses côtés. « D'abord fais ton test, » chaque chose en son temps « et après j’aviserais… » des choses une fois le moment venu, de cette multitude de détails à régler avant sa venue et ma main dans la sienne, doigts noués, ne laisse en rien présager du contraire, ajoutant d’un regard décidé. « Pour nous. »
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