Ils prévoyaient vraiment une tempête de neige. Ici, à Boston. Sean avait découvert ça aux infos et par ses coachs, qui avaient annulé les entraînements. Après coup, le jeune homme regrettait de pas être resté avec sa famille adoptive, à la Nouvelle-Orléans. Pas de tempête, pas de neige ou de blizzard là-bas. Seulement ses parents, son petit frère et sa petite soeur. Les seuls qui ne l'avaient jamais laissé tomber. Alors finalement, être coincé dans le Massachusetts sans même pouvoir jouer au football, c'était vraiment plus que pénible pour lui. Il ne lui restait plus qu'à prendre son mal en patience et se préparer pour les prochains jours, qui s'annonçaient compliqués.

Se rendant au magasin, le joueur savait qu'il devait faire quelques provisions. Rien de fou, parce que cette histoire n'allait sans doute pas non plus durer des mois. Mais une petite réserve, au cas où. De la nourriture pour les chats, aussi. Et surtout, éviter l'alcool. Tout seul à la maison, il se surprenait parfois à être tenté de prendre un verre, lui qui ne buvait pas autrefois. S'il n'avait pas craqué depuis plusieurs semaines, il n'empêchait qu'il valait mieux éviter. Après tout, quitte à faire quelque chose, autant que ça reste utile.

Il parcourait les rayons, le caddie déjà partiellement rempli; lorsqu'il la vit. DeSean s'arrêta net. Clignant des yeux plusieurs fois pour être certain qu'il n'hallucinait pas, son coeur se serra. Ses pensées se mirent à tourner dans sa tête, tandis qu'un sentiment étrange, partagé entre la joie et la tristesse, le parcourait. @Nadia A-Sherwood. Son premier amour. Sa première fois. Jolie blonde portant ce jour-là un bonnet bleu, qui semblait s'adonner à la même activité que lui. Demoiselle qu'il pensait encore à New-York. Petite blonde pourtant présente ici, à quelques mètres seulement de lui. Déçu qu'elle n'ait pas cherché à reprendre contact avec lui, forcément. Souvenirs qui remontent, d'un couple heureux, d'un amour réciproque. Sentiments encore présents, cachés en lui, qu'il tentait d'oublier. - Nadia ? C'est vraiment toi ? qu'il demande, s'approchant de la jeune femme. Paroles qu'il avait déjà prononcées, quelques mois plus tôt. Elle avait été contente de le voir, à ce moment-là. Allait-il en être de même, dans ce magasin ?

Sean ne s'attendait pas à ce qu'elle lui saute dans les bras. Surtout en se rappelant comment s'était terminée leur histoire. Coeur blessé par la sensation de ne pas avoir réellement compté. Coeur brisé après lui avoir offert ce qu'il n'avait jamais donné avant. Tout ça pour qu'elle parte, presque comme si de rien était. Le footballeur était pourtant prêt à la suivre à New-York. Cette ville qu'il connaissait très bien, pour y avoir joué pendant quatre ans. La grande pomme l'aurait accepté sans problème, il en était certain. Mais ce n'était pas le cas de Nadia, qui préférait faire cavalier seul.

La revoir au magasin, dans un décor des plus banals, c'était tellement étrange. DeSean avait tant espéré recevoir un message de sa part. Un truc, n'importe quoi. Un signe de vie. Une proposition pour discuter. Pour qu'il comprenne. Peut-être avait-il fait quelque chose de mal ? Peut-être qu'il était allé trop vite ? Les réponses, c'est la blonde qui les détenaient. Un supermarché n'était pas vraiment le lieu approprié pour discuter, mais c'était pas comme s'ils avaient le choix. Leurs rencontres avaient toujours été dues au hasard de toute façon. Que ce soit le poteau dans la tête ou la course au parc, rien n'avait jamais été prévu.

C'était douloureux de la revoir, sans pouvoir l'approcher. S'imposer une distance avec une personne qu'il avait un jour serrée contre lui, embrassée.. Oui, Sean avait envie d'aller vers elle, de pouvoir lui prendre la main. Un contact lui aurait fait tellement de bien.. Mais tout ça était devenu impossible, et il le savait. Du moins, pas si tôt. Pas maintenant. - Je savais pas que tu étais revenue.. dit-il en esquissant un léger sourire. Logique puisqu'elle ne lui avait rien dis. - Comment tu vas ? une conversation bateau qui n'en est pas vraiment une, puisque le jeune homme appréhende simplement de poser des questions qui "fâchent". Il faudra pourtant en parler. A moins que la jolie blonde ne le sorte une nouvelle fois de sa vie.

Comment ont-ils fait pour en arriver la ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Avoir l'air de deux étrangers qui se croisent au supermarché, ça craint. Parce qu'ils étaient mignons ensembles. Sean apprenait doucement mais sûrement les principes de l'amour avec elle. Il commençait à comprendre tout ce que ça impliquait lorsqu'elle est partie. Mais peut-être que c'est justement son innocence en la matière qui l'a fait fuir, allez savoir... Quoi qu'il en soit, elle l'a laissé mal en point. Noirceur installée en lui qu'il parvient à ne pas montrer au grand jour. Parce qu'il y a des caméras, des gens qui veulent des photos.. Toujours quelqu'un dans le coin qui pourrait apporter une preuve que son état de santé est déviant depuis quelques temps.

La blonde est toujours aussi belle. Ces traits de visage qu'il a un jour admirés sont de nouveau là, près de lui. Sans qu'il puisse les caresser. Sans qu'il puisse la ramener contre son corps et apprécier la sensation de protection qu'il lui offrait. Léger hochement de tête à sa réponse. Mais ça rime à quoi sérieux, de parler de la pluie et du beau temps ? Ils peuvent pas faire mieux que ça, sans déconner ?

- T'as de quoi te mettre à l'abri ? qu'il demande, espérant secrètement pouvoir lui proposer de rentrer avec lui. Mais non, bien sur que non. On est pas dans un mauvais film à l'eau de rose. Cette histoire ne terminera sans doute pas sur un matelas, au coin de la cheminée. Elle doit déjà avoir des trucs de prévu, faut pas être stupide. - Je.. me contente de vivre. regard baissé une seconde, petit soupir qu'il espère silencieux. Rien n'a jamais été pareil depuis son départ. Que ce soit sur le terrain, ou en dehors. Il y a eu l'alcool. Il y a eu cette entorse qu'il s'est faite à l'épaule; avec laquelle il a quand même joué. Tant de choses, qui sont parties d'une rupture amoureuse. Mais Nadia est son premier amour et il parait que celui-ci, on ne l'oublie jamais.

Ils ont l'air de deux andouilles dans ce magasin. Maintenant qu'elle est là, Sean a peur de la laisser partir. De ne plus la revoir ensuite. Va-t-elle disparaitre à nouveau s'il la laisse franchir les portes sans rien dire ? Il a pas vraiment envie d'essayer pour savoir. Compliqué de rompre la distance avec celle qui est partie. Pourtant, il en a foutrement envie. Le reste n'importe plus, ou presque. Nadia a toujours eu le pouvoir de faire disparaitre le monde autour de lui, quand elle apparait dans son champ de vision. Aujourd'hui n'échappe pas à la règle. Le regard posé sur la jolie blonde, DeSean ne voit plus qu'elle. Une sensation qu'il a connue dans de meilleures circonstances; à savoir lorsqu'elle n'avait d'yeux que pour lui aussi. - Faites attention à vous, tout les trois. répond-t-il simplement, expression relativement neutre sur le visage. C'est pas ça qu'il devrait dire. Pourquoi n'ose-t-il pas lui proposer de venir ? Parce que ce serait bizarre. - J'vais leur amener le nécessaire pour quelques jours, oui. Après ça va, ils devraient même pas se rendre compte qu'il y a une tempête dehors. avec l'envergure de la maison, ils devraient tous être tranquilles. En fait, cette histoire de blizzard ne l'inquiète pas vraiment. Maintenant qu'il l'a revue, c'est même le cadet de ses soucis.

Sans vraiment y faire attention, il ose un pas, puis un deuxième dans sa direction. Pas trop près, mais déjà moins loin. Il pourrait presque lui prendre la main. Et ça le démange réellement de pas le faire. - Est-ce que tu voudrais... Qu'on repasse du temps ensembles ? qu'il demande, l'air un peu gêné. C'est la seule manière qu'il a trouvée pour demander si elle acceptera de le revoir. Si c'est pas le cas, il sera tout de suite fixé.
Peut-être s'accroche-t-il à de faux-espoirs. Mais c'est toujours d'amour qu'on parle et dans ce domaine, l'apprentissage est un très long voyage. Bourré d'embûches, qui plus est.

Cette situation ne leur va ni à l'un, ni à l'autre. Sean n'aime pas parler pour parler, s'il n'y a rien d'intéressant à dire. Ca sert à quoi de combler du vide par des trucs sans intérêt ? Après tout, ils ont quand même été plus que proches.. En arriver à ne même plus être capable d'aligner deux phrases est presque ridicule. Ils sont adultes, oui ou non ? Pourquoi ne pourraient-ils pas parler de ce qui fâche ? Pourquoi n'auraient-ils pas enfin cette conversation qu'ils n'ont jamais eue ? Parce qu'ils préfèrent parler de chats -pas qu'il s'en fiche pour autant- mais ça lui semble un peu secondaire par rapport à eux. - T'en fais pas, ça va aller. La cheminée va fonctionner, le parquet chauffant aussi. Ils manqueront de rien. elle le sait qu'il possède tout ça. Elle était la première à apprécier d'avoir les petons au chaud quand elle venait chez lui. Les chatons ne verront pas la différence, à ceci prêt qu'ils n'iront pas dehors.
C'est un petit sourire qui vient éclaircir les lèvres du joueur, même si la réponse de la blonde n'est pas totalement celle qu'il attendait. Enfin.. Que pouvait-il attendre de plus de toute façon? Il était évident qu'elle n'allait pas chercher à recoller les morceaux. Sauf que visiblement, comme il aurait sans doute dû le voir avant, elle-même n'est pas totalement en paix avec ces propres démons. Ces blessures, son passé, il y a encore des plaies ouvertes qui n'ont pas sû guérir. Sans réellement savoir s'il peut se le permettre, il vient poser sa main sur son épaule. DeSean est et sera toujours réconfortant. C'est sa nature. Qu'on lui fasse du mal ou pas, il voudra prendre soin des autres. - Ca ira Nadia. Prends le temps de te retrouver. souffle-t-il dans un sourire, bien que son coeur soit encore plus meurtri. C'est comme une triste mélodie qui résonne dans sa poitrine, qu'il arrive à transformer en chanson douce lorsque les mots sortent de sa bouche. C'est le sentiment de vouloir la prendre contre lui, exactement comme il le faisait avant pour la rassurer. - Tu sais... Nous deux, c'est quand même l'une des meilleures choses qui me soit arrivé. elle l'a fait tomber amoureux, ce qui n'est pas rien. Ca valait tout l'or du monde à ses yeux, être capable d'aimer. Et même s'il a mal aujourd'hui, l'expérience en valait la peine.