le corps est tremblant, encore secouée par les récents évènements. comme sortie tout droit d'un cauchemar (( d'un rêve ? elle n'en sait rien, nana )) automate passant la porte de la demeure familiale seule, avant de s'effondrer à même le sol. la réalisation qui frappe, trop fort. elle est vivante. elle est vivante mais cassée, yeji. poupée apeurée vers laquelle naeun avait tendu les doigts sans parvenir à l'attendre, animal acculé au fond de sa cage dans un sous sol si proche de chez elle. tout ce temps, elle était là. elle était là, et nana ne le savait pas. la police était arrivée, avait forcé l'évacuation. libéré les otages sans encombres. et pourtant, elle a encore ce poids sur le cœur, naeun. lorsque ses parents étaient arrivés, yeji n'avait toujours pas dit un mot, assise sur un brancard d'hôpital, interrogée par les infirmiers. et si naeun n'avait pas lâché sa main une seule seconde, elle n'avait pas non plus arrêté de pleurer. les nerfs qui retombent avec violence, et la mère shin qui avait forcé l'aînée à se détacher de sa jeune sœur. tu ne l'aide pas; elle sait, nana. mais elle arrive pas à s'arrêter, soulagée d'avoir retrouvé sa précieuse petite sœur. rentre nous attendre à la maison, chérie. conseil soufflé du paternel qui embrasse la tempe de la jeune femme, la contraint à se libérer de la jeune fille pour prendre un taxi jusqu'au centre ville. et elle est là, nana. au milieu du salon, silence pesant, allongée dans le sofa à tenter d'apaiser ses larmes. elle a pas besoin de ça yeji, tu le sais nana. elle prend le temps d'envoyer un message à minjae, dire qu'elle ne rentrera pas ce soir, qu'elle reste avec sa sœur. et le silence pour toute réponse, sans doute trop occupé, ou énervé. elle s'en fout. épuisée par les récents évènements, elle ne sait pas si elle est simplement absente, nana, ou si elle s'est endormie, mais aux premiers cliquetis de la porte, elle se redresse d'un bond maladroit, titube jusque l'entrée où ils sont là. tous les trois. voix du père qui s'élève sous le regard confus de nana. « qu'est-ce qui se passe ? elle va bien ? » pousse doucement les parents pour venir prendre délicatement la précieuse petite soeur dans ses bras. « t'es à la maison, bébé. t'es à la maison, t'es en sécurité. » elle ne cessera jamais de te le répéter.

@Yeji Shin

elle ne comprend pas. ne comprend pas ou peut-être est-ce la raison qui refuse de saisir ce que le coeur ressent déjà. poupée vide qu'elle serre entre ses bras. « yeji... » qu'elle souffle, nana. cherche à tirer un son, une expression du visage, n'importe quoi. au lieu de quoi elle s'évade, yeji. traverse la maison, disparaît à l'étage. l'incompréhension qui se tourne en direction des parents. « papa ? » qu'elle demande, nana. secoue la tête comme si rien n'avait de sens, tandis que sa mère s'écroule, fond en larmes dans les bras de son époux. physiquement... elle n'a rien. elle a seulement perdu beaucoup de poids et d'énergie. les bonnes nouvelles, d'abord. elle sent, nana. ça gronde dans sa tête, elle sent qu'il y a le pire qui vient. « mais ? » la voix tremble lorsqu'elle interroge, sourcils froncés. mais elle n'a pas décroché un mot. rien. les médecins disent que c'est probablement lié au traumatisme. psychologique. qu'ils ne savent pas... quand ça reviendra et c'est alors que les opales se gorgent de larmes qu'elle entend les pas dans les escaliers, poupée qui dégringole les marches, court jusque la salle à manger. panique de naeun qui s'élance à la poursuite de sa cadette. « YEJI » traverse le couloir jusqu'à la retrouver sous une table. réfugiée. prostrée. et le coeur s'effondre. ça brûle la cage thoracique de la voir anéantie. pousse les chaises jusqu'à la rejoindre, arrête ses parents d'un geste. « yeji.. yeji regarde moi. » elle tend les doigts pour caresser le visage patiente jusqu'à ce qu'elle ouvre les yeux, dégager les mèches qui obstruent son regard. « il ne reviendra pas. ok ? » elle embrasse son front, capture son regard. « j'vais rester avec toi. je laisserai personne te faire du mal. » elle te protégera, nana, au péril de sa vie s'il le faut. plus jamais ça.

le corps tremble, les opales s'agitent. oscillent nerveusement - droite, gauche - et yeji semble à nouveau captive. prise derrière les barreaux de cette cellule obscure, où naeun l'a trouvée un peu plus tôt. le regard est gorgé de larmes. les mains se promènent contre les traits délicats, tente d'insuffler sa chaleur à sa petite soeur tendrement. de lui faire comprendre qu'elle est là. qu'il ne reviendra pas. tente de chasser de la pulpe des pouces les larmes qui coulent sur le visage aminci, pâle. elle semble déconnectée, yeji. et si au loin elle entend les parents qui s'inquiètent, ce n'est qu'un bruit de fond : elle ne fera attention qu'à elle. « il est plus là... il sera plus jamais là... » les mots répétés comme une litanie douloureuse, quand finalement, les yeux de la petite soeur s'arrêtent sur son visage. les bras s'accrochent. à elle. à son cou. et nana l'enlace. elle l'enlace aussi fort qu'elle le peu, les doigts qui glissent dans les mèches. « respire... respire baby... » elle entend sa mère qui l'appelle. secoue la tête. « laissez là. laissez nous... juste un peu. s'il te plait maman. » elle tourne les yeux vers sa mère, la voit se faire entraîner à contre coeur dans la pièce voisine. et elle sait pas combien de temps elle reste là, nana. à bercer yeji en caressant ses cheveux, à embrasser son épaule, à lui souffler qu'elle est là. qu'elle est réelle. qu'elle ne s'en ira pas. « je vais rester avec toi cette nuit. » qu'elle lui indique dans un souffle. recule doucement pour venir poser son front contre le sien. aînée tendre, protectrice. « et toutes les nuits que tu voudras. » n'en déplaise à son époux. « et si on allait à l'étage...? toutes les deux. te faire couler un bon bain... puis on fera ce que tu veux. » dormir. manger. sortir. rester dans le noir. revenir sous cette table. elle est prête à tout pour toi nana. tout et n'importe quoi.