Si Saoirse et Taylor étaient très complices, les jeunes femmes n’avaient pas autant de temps à se consacrer l’une à l’autre qu’elles l’auraient désiré. Elles étaient toutes les deux très occupées, l’une par ses études, l’autre par sa famille. Parfois, Saoirse avait l’impression de passer le temps qu’elle consacrait à la jeune femme à rattraper le temps perdu, faire le point sur sa vie pour s’assurer qu’elle n’avait rien manqué de notable puis déjà, il était l’heure de se séparer. Quasiment à chaque fois, la mécanicienne quittait Taylor en sachant qu’il faudrait recommencer cette mise au point avant de pouvoir discuter normalement. Cela ne lui plaisait pas particulièrement et elle essayait sincèrement de mieux garder contact avec la jeune femme mais ce n’était pas chose aisée, malheureusement. Un large sourire se dessina sur les lèvres de Saoirse quand elle entendit Taylor avouer qu’elle aimait son soldat. Elle se souvenait des nombreuses discussions que les jeunes femmes avaient pu avoir sur la vie et l’amour, et sur comment Taylor était convaincue que ce n’était pas pour elle, que c’était une perte de temps et que sa carrière était bien plus importante. Peu carriériste, Saoirse avait plus ou moins tenu le même discours, mais mettant en avant sa famille. Et voilà que maintenant, Taylor avait été convertie… ou plutôt, avait-elle trouvé quelqu’un à la hauteur de ses espérances. Car Saoirse n’était pas dupe et savait que sur ce point, Taylor lui ressemblait : quand elles disaient cela, elles disaient surtout que trouver l’amour n’était pas la priorité, cela ne voulait pas dire qu’elles étaient contre… Fronçant légèrement les sourcils en l’entendant dire que l’amour ne suffisait pas, Saoirse se tourna vers son amie. “Qu’est-ce que tu veux dire exactement ?” C’était le genre de phrases banales que l’on disait quand on était triste et si Saoirse était surtout présente aujourd’hui pour aider son amie à trouver une voiture, il était hors de question qu’elle la laisse repartir dans cet état d’esprit sans avoir approfondi ce qui n’allait pas. Si en prime elle parvenait à lui remonter le moral… alors ce serait parfait.
Elle comprenait que la distance soit compliquée à gérer, surtout face à un métier comme celui de son petit-ami. Etre un soldat impliquait nécessairement de se retrouver dans des situations dangereuses et Saoirse n’osait pas imaginer ce que la jeune femme devait ressentir quand elle se retrouvait sans nouvelle pendant plusieurs jours… “Je suis sûre qu’il revient pour toi aussi, Taylor…” Saoirse n’avait sincèrement aucun doute dessus. Ses études, il aurait tout à fait pu les abandonner et la jeune femme était d’ailleurs intimement convaincue, même si elle ne connaissait absolument pas Joshua, qu’il devait parfois oublier qu’il était étudiant quand il se retrouvait à faire la guerre, la vraie, pas celle comme les enfants qui jouent mais qu’il n’oubliait jamais Taylor. Elle n’était de toute façon pas le genre de femmes que l’on oubliait, bien au contraire. Elle avait cette aura qui marquait tout le monde de près ou de loin et Saoirse était vraiment flattée de pouvoir la compter parmi ses amies.
Pouffant doucement en entendant Taylor lui dire qu’elle était indépendante et sans attache. Ce n’était pas vraiment le cas et elle s’apprêtait à corriger son amie quand cette dernière continua en lui disant qu’elle l’était jusqu’à ce que… Evidemment. Et si elle était honnête, c’était quelque chose que Saoirse espérait atteindre à un moment ou un autre de sa vie mais elle savait que maintenant ce n’était pas le bon moment. Et puis… c’était tellement amusant de recommencer le jeu de la séduction régulièrement et de s’arrêter juste avant les prises de tête. “Je te rappelle que j’ai trois attaches à la maison qui comptent sur moi…” Et même si Wakeema aurait bien évidemment été capable de vivre seule, elle n’en restait pas moins sa soeur et la mécanicienne ferait tout son possible pour qu’elle soit heureuse et qu’elle puisse mener ses études à terme. Elle savait que cela l’agaçait parfois que Saoirse la considère comme quelqu’un dont elle devait en prendre soin mais Wakeema aurait pu avoir cinq ans de plus qu’elle, cela n’aurait pas changé son avis sur la question. C’était son rôle de soeur de permettre à la jeune femme de réaliser ses rêves - même si sa petite soeur n’avait, en effet, pas vraiment besoin d’elle pour le faire. “Mais oui, ça viendra un jour ou l’autre. Mais pourquoi ne pas m’amuser en attendant ?” lui répondit-elle malicieuse avant de glisser d’un air coquin : “Et comme ça, je serai le meilleur coup que mon futur mari/ma future femme aura jamais eu.” Elle lui donna un petit coup de coude d’un air entendu. Ce n’était pas du tout pour ses raisons que Saoirse souhaitait s’amuser mais si cela pouvait lier l’utile à l’agréable… Elle avait hâte de lier l’utile à l’agréable et d'éblouir la personne qui partagerait le reste de ses nuits. “Ok parfait. Tu veux garder la couleur ou non ?” dit-elle en s’avançant pour vérifier ce qui n’allait pas avec la voiture. La décharge avait normalement les infos mais Saoirse voulait s’en faire une petite idée avant de leur parler.