Encore quelques jours avant que je ne m'en aille pour mes vacances d'été, une semaine et je suis à Seoul. Une semaine à tenir dans ce fameux bar où je travaille depuis un peu plus de cinq ans, désormais. Je regarde mon patron, ce-dernier m'octroie une petite pause et je m'en vais devant le bar afin de prendre l'air. Je commence à moins en moins supporter la chaleur et la température extrême à l'intérieur du bar, mais je dois continuer de ramener de l'argent pour payer mes besoins quotidiens. On me propose une cigarette que je décline poliment, portant simplement mon verre d'eau à mes lèvres pour me désaltérer.

A peine rentrée qu'Eris ne sait déjà plus pourquoi où elle en est. Elle a convaincu Ted de rentrer de ses vacances pour l'accompagner à l'hôpital, Lana ne va pas tarder à rentrer non plus alors qu'elle ne sait encore rien de l'état de santé de sa meilleure amie... et elle, noyée au milieu de tout ça. Tant de ses propres émotions que du fait d'épargner celles des autres. Et son coeur qui explosait pour ce foutu Superman et qui semblait ne pas finir de souffrir et de battre pour lui. Bref. Impossible de rester chez elle, dans un appartement en manque de vivres alcoolisées, et de laisser ses pensées tournoyer. C'était sûr qu'elle en deviendrait folle avant même d'avoir mis un pied à l'hôpital. C'est pour ça qu'elle va au premier bar venu pour se changer les idées. Un verre bien chargé et elle sort immédiatement la belle, pour s'allumer une cigarette et laisser son regard vagabonder. Ses yeux sont dans un état perpétuel de bord de larmes et elle en essuie machinalement les coins alors qu'elle tente de s'anesthésier à coup d'alcool et de nicotine. Mais c'est dur. La tête tourne en rond sur les pensées, les doutes, les peurs qui concernent son avenir, ses relations, et puis sa santé évidemment. Son regard finalement se pose sur un des barmans qui est sorti avec un verre d'eau. Il est beau, ses tripes le lui confirment immédiatement. On ne perd pas les instincts que l'hypersexualité à ancré au fond d'elle du jour au lendemain. D'habitude, elle l'aurait dragué, aurait rêvé qu'il la soulève contre un mur... Bizarrement là, elle aurait voulu un câlin, de lui ou d'un autre d'ailleurs. Quelqu'un qui lui dise que tout va bien. Que tout ira bien au moins. Son regard traîne sur lui, peut-être trop longtemps, elle n'en sait rien...

Mes yeux se tournent vers une jeune femme qui vient d'arriver dans le bar où je travaille. Cinq années que je travaille ici, je suis du genre physionomiste mais cette femme-là, je ne l'ai jamais vu dans le passé. Je continue de te regarder, mais je me décide à aller vers toi. Ton visage me dit que ça ne va pas fort ? Je le vois, je ne suis pas aveugle et j'ai un don pour détecter la tristesse dans le regard d'une personne. Je regarde un de mes collègues, lui faisant signe de ramener un verre. Quelque chose de fort. J'imagine que tu es là pour te changer les idées ? Allez, je t'offre le premier verre, c'est pour moi. Je te fais un clin d'oeil. Le people's republik est réputé pour faire changer les idées.

Eris relève les yeux vers le serveur qui lui adresse la parole. Son désir et sa détresse se lisaient-ils sur son visage ? Au vu de sa question, c’était d’ailleurs plutôt la détresse qui se lisait. « Pas vraiment non… » répondit-elle, avec un petit sourire triste. Elle n’avait pas forcément envie d’étaler toute sa vie devant cet homme mais les barmans avaient quelque chose qui invitait à la confidence… « Carrément ouais, j’ai besoin de quelque chose qui me fasse me sentir vivante… » dit-elle. Quitte à ce que ça lui brûle les entrailles. « Merci… » sourit-elle, un peu plus sincèrement à la proposition de lui offrir un verre qu’elle accepta en demandant une vodka avec des glaçons. « Je m’appelle Eris… et toi ? » demanda-t-elle alors que son visage se détendait progressivement.