J'étais presque sûre qu'il était français, mais loupé. Je n'étais pas très loin, cela dit. Un Luxembourgeois... C'est aussi rare d'en rencontrer un que de trouver les numéros gagnants au loto. Plutôt classe, je dois avouer. Il gagnait en sex appeal, comme s'il n'en avait pas assez. Eh bien enchanté, monsieur le Luxembourgeois. Tout ce que j'espérais désormais, c'est qu'il n'ait pas été trop rebuté par mon côté glacial et un peu brute de décoffrage. Cette habitude d'être toujours sur la défensive a tendance à me jouer des tours, surtout auprès de certaines personnes qui interprètent ça comme de la suffisance. En gros on me prend pour une cold bitch. Mais qu'on puisse croire ça, je m'en lavais les mains. Le fait qu'il avait l'air d'être vraiment chou, et qu'il était tout désolé de ce qu'il avait pu dire. Nan vraiment t'inquiètes. J'ai tendance à me braquer parfois. En tout cas, le verre tenait toujours. Et comme si rencontrer un Luxembourgeois ne suffisait pas, il fallait en plus qu'il séjourne dans le même hôtel que moi. Il faut vraiment que joue au loto, pour le coup. J'ai tendance à croire au destin, et je crois que le destin a décidé que je devais me taper un européen. Merci destin. Le hasard fait bien les choses, on dirait. Je lui échange le même sourire malicieux. On commence notre route vers l'hôtel, en marchant cette fois. Tu peux venir prendre ta douche dans ma chambre, si tu veux ? On partira prendre un verre directement comme ça. Qu'est-ce qu'il faut pas trouver comme excuse. J'ai juste décidé que je voulais me le faire, là, maintenant.

J'aimais dégager cette impression de totale confiance en moi. Les hommes aiment les femmes sûres d'elles, qui prennent les devants. Le fait est que ce n'est qu'une image. C'est finalement dans sa chambre qu'on ira "prendre notre douche". J'étais pas du genre parano, mais j'étais pas sereine non plus. Je suis de nature méfiante, faut pas l'oublier. D'accord. On est parti ? Sac de sport sous le bras, bouteille à la main, on fait le trajet jusqu'à l'hôtel. Mes pas étaient lourds, chacun d'eux me nouait un peu plus l'estomac. C'est clair, j'étais angoissée. On venait de se rencontrer, et tout porte à croire qu'on est sur le point de coucher ensemble. Je sentais la moiteur s'inviter sur mes mains, et voir l'entrée de l'hôtel ne fait qu'accentuer cette sensation de stresse. Mais toujours donner l'impression d'être en contrôle, d'être en confiance. Je monte chercher quelques affaires, je te rejoins après. Dans la précipitation, je fonce dans le premier ascenseur sans me rendre nécessairement compte que je ne lui ai pas demandé son numéro de chambre. Je m'empresse de lui envoyer un texto. Passage éclair dans ma chambre, je respire. Je me regarde quelques secondes dans le miroir, et me rassure. Etais-je en train d'être complètement irresponsable ? Ou étais-je simplement en train de vivre ma vie ? L'un dans l'autre, je voulais et j'allais le faire. Remontée à bloc, je fonce vers le numéro de la chambre qu'il m'a donné par message. Let's get the party started.

Je me sentais en même temps niaise et femme fatale, très étrange comme sensation. Je cogne délicatement sa porte, me passe la main dans les cheveux histoire de pas avoir l'air de celle qui vient de courir d'étage en étage. La porte s'ouvre, et quel spectacle. J'ai rarement assisté à un aussi beau d'ailleurs. Un torse taillé dans la pierre, l'adrénaline m'était montée d'un seul coup. Je crois que mon sourire béat valait tous les mots du monde. Je passe le pas de la porte, et le spectacle continue. Une chambre qui pourrait illustrer la définition du mot luxe dans le dictionnaire, j'ai gagné le jackpot. Ah ouais… Bien surclassé, même ! Les yeux qui vagabondent, comme plus tôt dans la journée entre les buildings, pour finalement se poser au même endroit. Sur lui. Ce corps d'athlète était incroyable. Tu me montres la salle de bain ? Je ne pouvais pas être plus claire. L'angoisse d'être tombée sur un fou s'était dissipé, ne restait en que de l'envie. Beaucoup d'envie. On était définitivement sur la même longueur d'ondes, et j'appréciais ce langage codé comme pour faire semblant qu'on ne savait pas pertinemment ce qui allait se passer. Je n'attendais plus qu'une chose, profiter du spectacle.