« Lettre d’adieu à X»

Il y a peu, tu m’as demandé qui j’étais vraiment, ce que je pouvais avoir de plus que ces hommes que tu fréquentais dans tes tourments les plus sombres. Tu m’as demandé, les yeux rivés dans les miens, qui j’étais pour être si différent. Je me suis contenté de te sourire, de t’offrir un clin d’œil face à cette question dont tu n’as pas eu de réponse. Aujourd’hui, tu dois savoir, tu dois comprendre. Qui je suis ? Personne. Cette réponse pourrait te surprendre, te déconcerter. Certes, mais qui suis-je pour affirmer que je suis mieux qu’un autre, meilleur que le prochain, que le précédent ? Je ne suis qu’un homme né dans une famille de roturiers, de personnes humbles qui n’ont pas d’argents, qui n’ont pas d’histoires. Des parents qui s’aiment assez pour fonder une famille, donner naissance à deux enfants. Des grands-parents restés ensemble jusqu’à la fin, dépassant les trente ans de mariage, n’est-ce pas beau ? Pas de tragédie évidente, pas de supplices, pas de conneries. J’ai grandis dans une semi-pauvreté, apprenant que l’argent ne tombe pas du ciel alors que toi, tu as grandi dans l’opulence. Nos mondes sont différents, pourtant, nos vies se sont croisées pour mieux nous faire grandir. Te souviens-tu de ce premier sourire ? De ce premier regard qui fait chavirer, qui fait frissonner ? Moi je m’en souviens comme si c’était hier. Tu n’étais qu’une enfant, je n’étais qu’un gosse, mais tu étais la lumière en confrontation avec l’ombre futile que j’avais pu être. Et seigneur, comme je remercie le ciel d’avoir marché à tes c ôtés autant de temps. Amis, amants, nos places n’on t jamais été définies, le temps laissant les ravages s’enchaîner. Tu m’en voulais de tomber amoureux d’autres, je t’en voulais de n’aimer que ta fortune…et pourtant, nos cœurs ne cessaient pas de se martyriser mutuellement. J’étais différent à tes yeux, tu l’étais aux miens. Familles qui ne pouvaient pas s’encadrer. Les tiens ne me trouvaient pas assez bien, les miens te trouvaient trop précieuse, trop capricieuse. Ils avaient raisons, probablement, mais l’interdit est merveilleux, délicieux comme le gout de tes lèvres sous une lune ronde. Nous évoluions dans des univers différents, mais jamais bien loin l’un de l’autre. Je vivais dans les rues, tu vivais dans des murs dorés. Je portais des vêtements choppés dans des magasins bons marchés, tu te vétissais de tes plus belles parures. Mais parfois, il faut apprendre à lâcher prise, à aimer plus que de raison pour mieux aimer la prochaine. Aujourd’hui, j’ai appris que j’étais accepté à Harvard. Moi, à Harvard…Tu imagines ? Un avenir m’attend, mais pour ça, nos chemins doivent se séparer et nos main s se délier. Je suris en écrivant ces quelques mots, parce que tu restes cette lumière qui m’a fait grandir et la peine sera probablement immense. Je n’ai pas la force de te murmurer quelques mots d’adieu, de t’offrir un dernier baiser. Mas à la place, je t’offre ces quelques mots : je t’aime.

Ombrage.

« Lettre d’amour à x »

J’ai bien reçu ta lettre, elle m’a fait sourire là où les lettres étaient pourtant tristes et éprouvantes. Deux mois que nos écris se dispersent sur des feuilles de papiers, sans jamais pourtant savoir le visage de l’autre, le sourire qui pourrait faire vibrer. Etrangement, ça ne me dérange pas, davantage que de te savoir non loin. C’est drôle d’entretenir une correspondance avec une autre étudiante qui se cache derrière les mots, qui sont souvent plus facile à écrire qu’à dire. Pour répondre à ta question, l’intégration se passe bien, mais les journées sont bien trop courtes. Entre les études, le travail, j’ai bien trop souvent l’impression de sombrer, de m’étouffer tout seul. As-tu déjà eu cette sensation, dis-moi, que le monde allait s’écrouler ? Nos lettres sont à quoi je m’accroche lors des moments difficiles, lorsque je sens que rien ne va plus. Je me dis que, parfois, ça serait bien de t’avoir en face de moi mais, après, je me reprends en me murmurant que ça gâcherait la magie de la chose. Je me suis fait quelques amies, quelques connaissances, mais plus le temps passe et plus cette importance que tu prends s’accroit, prends de l’ampleur. Suis-je fou ? Probablement. Fou d’aimer l’amour à ce point, fou de croire encore en celui-ci là où trop ont baissés les bras. C’est épuisant d’aimer, aussi con que ça puisse être, c’est fatiguant d’espérer. J’ai l’impression que beaucoup ne pourraient pas comprendre, ne pourraient pas réaliser. Dois-je jouer les vilains garçons pour entrer dans une case ? Non, ce n’est pas mon style, je pense que tu l’as compris…mais ça serait plus reposant tu crois, de jouer la comédie ? J’aimerais tellement avoir les réponses à mes questions…

Affectueusement, Ombrage.