J’ai toujours vécu dans des centres pour jeunes, ouais, les centres qui font en sorte d’éduquer vos enfants parce que vous n’êtes pas capable de les tenir sans les frapper ou bien de hurler à la mort. Je crois, que dans le fond ça peut fonctionner. Je sortais de là-bas changé, mais dès que je rentrais chez moi, vers ma très belle famille. Je commençais à nouveau à faire des conneries à devenir de moins en moins stable. Mes parents, s’en foutent de moi, ma mère c’est du style à rentrer tard dans la nuit, elle m’avait même confessée que j’étais pas désiré, et mon père, c’est un alcoolique qui baise à droite à gauche. Encore étonnant qu’il soit encore vivant. J’ai un petit frère, disparu. Il m’a juste écrit une fois en disant qu’il était parti en Australie vivre son rêve. Mais depuis, plus rien. Alors, je sais pas si je dois informer la police, ou pas, mais. J’ai plus aucun contact avec ma famille. Mais je m’en fou, dans le fond. J’ai jamais été aimé, on me donnait à peine à manger, j’ai dû me débrouiller dans la rue, j’ai dû vendre de la drogue, me faire fracasser la gueule depuis très jeune pour subvenir à mes propres besoins. Je crois, que c’est juste ça, la phase la plus triste de ma vie. Non ? Aller, je suis certain que quand vous allez lire ces phrases vous vous dites « encore un gars paumé qui veut revenir sur la bonne direction et blablabla » Et juste pour ça, je vous emmerde. Parce que c’est clairement pas ma vision de la chose. Je veux pas devenir riche, faire plusieurs boulots, c’est plutôt cool, et vendre me permet d’en avoir un peu. Je continu à boxer de temps en temps, même si c’est plus mon activité principal, en sachant que je suis en train de devenir vieux. Mon corps il assume plus les choses comme quand j’avais vingt ans. J’ai arrêté mes études, au passage. J’allais plus en cours, et surtout j’écoutais plus la prof, je crois même qu’elle est tombée en dépression à cause de moi, fin, je trouve ça totalement con. Tu fais ce métier pour aider les jeunes. Faut assumer que quelques gamins soient brisés non ?
Dans le fond, j’ai eu une enfance comme un orphelin. Mes parents m’ont jamais cherché quand je partais de la maison, c’est à peine si on me nourrissait, et surtout, je n’ai jamais reçu de l’amour de ma mère ou de mon père. Et je m’en porte très bien, enfin presque. J’ai des coups de colères, je pique des crises quand j’ai pas ce que je veux, et surtout quand je contrôle pas la situation. J’ai déjà vécu dans la rue, à dormir sur le sol, parce que je pouvais pas rentrer et que j’avais pas les moyens de me payer un appartement ou même d’aller dans une auberge de jeunesse.
Mais petit à petit, j’ai réalisé que j’avais un truc. Une femme m’avait vaguement parlée dans un bar en m’expliquant que mon corps était pas mal, que je devais juste fermer ma gueule et passer ma main sur la hanche d’une vieille riche pour me rendre dans des lieux. Ouais, avec mes tatouages. Je pense que ça fait racaille, ou mauvais garçon. Alors c’est le rôle que j’ai commencé à jouer, et petit à petit, et bien ça ce décolle plus de ma peau. Je suis pas… Enfin, ouais, je donne pas mon corps. Dans le sens, où je fais que d’accompagner. Même si j’avoue, quelques fois, dormir dans un hôtel de luxe, et coucher ça me semble être une bonne idée. Surtout que j’ai souvent pas envie de rentrer dans mon appartement de merde.

Qu’est-ce que je peux bien parler encore… J’ai jamais eu de relation. En couple, avec une femme ou un homme, c’est pas mon truc. J’enchaîne, et puis avec mon boulot, je pense pas qu’on veut réellement de moi. Et autant vous dire, que je m’en branle totalement. Je sais pas vraiment c’est quoi aimer, comment je dois agir. C’est le bordel pas possible, et j’ai déjà 40 ans. Vous aussi vous croyez que je vais finir seul ? Très certainement. J’ai pas un caractère facile, mais dans le fond, je suis loyale, si tu es un de mes potes, tu peux avoir confiance en moi. Par contre, si t’es un gamin hautain, avec une sale gueule, qui parle pour rien dire, mais qui se fait juger par les personnes avec qui il juge. Ou même une gamine qui tombe amoureuse de voir parce que je la raccompagne jusqu’à chez elle. Trace, vraiment. Je suis clairement pas une belle personne, je suis une sale bête. Je vis comme je le veux, si un jour je veux pas bosser, je le fais pas. Point.

Alors, si on parle de maintenant, et bien rien a changé. Pourquoi je devrais changer ? Je ne comprends pas. Si je suis comme ça, c’est pas pour rien non ? Y a quelques fois, je vois les gens heureux, pis je me demande si je le suis vraiment. Mais, après, je me dis que c’est comme ça, que je suis pas né avec la bonne culière. Que c’est ma faute, parce que j’ai pas fait des études. Que quand je regarde mon corps tatoué, je me dis seulement que je vais me faire enterrer, et qu’il y aura personne pour pleurer ma perte.