Je ne pense pas que cela ait quoi que ce soit à voir avec une quelconque vengeance de nos augustes parents. Nous avons pour la plus part atteints, ou dépassés, le quart de siècle, et aucun de nous n'a trouvé chaussure à son pied. Estimant qu'ils nous ont suffisamment laissé notre chance et de temps pour cela : ils prennent les choses en mains et décident d’accélérer le mouvement en jouant les marieuses. Nous entendre dire oui, c'est la garantie pour eux de sceller des alliances politiques, économiques et financières avec les autres grandes familles européennes. Nous sommes des pions qu'ils disposent selon leur bon vouloir, pour avoir une assise au quatre coins de l'Europe. Rassure-toi, je n'échappe pas non plus à la grande valse des mariages de raison.  

La génétique ne m'a pas fait la grâce du gène de la rébellion, la sédition et de l'insurrection dont vous êtes affublés. Il y a bien longtemps que je me suis résigné à accepter à le revers de la médaille qui incombe aux membres au sang bleu. Je n'aurais pas d'emprise sur les poussiéreux us et coutumes ancestraux pesant sur notre famille, et je suis prêt à m'acquitter du prix à payer. Alors je ne vais rien faire. Je m'avancerais vers l'autel, dirais "oui" et poursuivrais ma vie de Traumatologue ponctuée de-ci de-là d'obligations princières.

Beth, il n'y a que dans les contes de fée que les princes et princesses se marient par amour. Dans la réalité, seule la raison dicte la vie des têtes couronnées. Je vais me marier, et n'aurais aucun scrupule à avoir une double vie à côté. Depuis que le monde est monde, les nobles fonctionnent ainsi. Oncle Charles ne s'en est d'ailleurs pas privé avec Tante Diana, qui le lui a d'ailleurs bien rendu. Et puis il y aura toujours moyen de divorcer, comme l'on fait Oncle Andrew et Tante Sarah. Ce n'est pas la fin. Juste un rite de passage auquel nous ne pouvons nous soustraire.

Non. Ta conception est pleine de bon sens. Elle devrait être universelle. Hélas, tu es pour ton malheur trop bien née pour elle. C'est l'un des avantages qu'on ceux vivant au pied de la tour d'ivoire : choisir de s'unir à celui ou celle qu'ils aiment.