J'suis effectivement déçue que tu ne puisses pas venir me porter... c'était une excuse pour te revoir demain, avant que je prenne l'avion. Maintenant, ça ferait trop si je te demandais de m'accompagner quand même, alors je me tais et je laisse glisser. Je te dis que ça va me faire bizarre de rester à Boston pendant que tous mes amis sont loin et t'essaie quand même de me consoler... c'est mignon. J'hoche la tête, pour te donner raison. Je change complètement de sujet en allant m'asseoir sur ton lit et te demande si c'est le tien (même si bon, obviously) en plaisant sur le fait que ça doit pas être facile d'inviter des filles dedans. Ta réponse me surprend, me choque même un peu, probablement parce que ce n'est pas ce que je m'attendais ou aurait voulu entendre. Certes, après avoir vécu dans une voiture, le lit parait grand pour toi mais comme je ne parlais pas de toi, est-ce que tu parles de toi ? Puis maintenant, tu mentionnes la douche. Je me pince les lèvres et cache mon mécontentement en mimant mon air blasée naturel. Tu viens à peine d'emménager ici et j'suis pas la première fille que tu invites. Oui bah je ne crois que ce que je vois. Autre chose que je fais naturellement ? La compétition. J'recule pas devant les adversaires et encore moins quand je sais que j'peux facilement obtenir la première place ; Je l'ai toujours.

Pas de réaction. Pas d'amusement, pas de taquinerie, pas de mécontentement, pas de tic de haussement de sourcils. Est-ce que ça ne te faisait rien ? Non. Ça voulait seulement dire que tu ne voulais pas que je sache ce que tu pensais, et ça me donnait encore plus envie de continuer à te titiller. J'avais rien prévu quant à ta visite ici, je ne m'étais pas posé de questions... mais cet air de défi que tu prenais nous menait tout droit vers quelque chose qui ressemblait généralement à un point de non retour. Alors, va la voir... ? La douche. Je la préférais au lit dans l'immédiat. Je comptais pas te laisser y aller seule, j'allais pas reculer non plus, même si c'était un jeu dangereux... en tout cas pour moi, clairement. Je t'admirais déjà bien avant qu'on se parle, tu m'avais plu immédiatement et à chaque mot, chaque regard qu'on échangeait, tu me plaisais toujours davantage. S'il devait se passer quoique ce soit, c'était certain que tu ne me sortirais pas de la tête et si la réciproque ne valait pas, j'en ressortirais pas indemne. C'est le genre de dégâts qui peuvent survenir quand les émotions prennent le pas sur la raison.

Ne donner aucune réaction est probablement la plus grande réaction que tu puisses espérer avoir. Généralement quand je m'en fou, je réagis, je le fais savoir. Quand ça me fait rigoler bah, je rigole. Quand j'suis contente, j'le dis, j'remercie les gens, etc... Mais quand ça me fait chier, que ça m'embête ? Je ferme ma gueule et j'agis comme si tu ne m'avais rien dit d'anormal. Ça fait part de notre petit jeu de toute façon, non ? Je ne crois que ce que je vois, c'est ce que je t'ai dis avant que tu m'encourages à aller la voir. Je me lève, sans un mot, puis marche jusqu'à la deuxième pièce sans te lâcher du regard... du moins, pas avant que je te dépasse. J'arrive finalement dans la salle de bain presque trop petite pour nous deux, puis retiens mon souffle. La tension a monté d'un cran et je sais que c'est de ma faute, parce que je l'ai cherché. Je retire mes talons et me retrouve nu pied, dans le cabinet de douche. J'suis pas sure qu'il y ait de la place pour une deuxième personne. Déclarai-je, avant d'ajouter : Va falloir que tu viennes avec moi, pour vérifier. Je recule pour m'adosser au mur, en attendant que tu te joignes à moi dans la cabine. J'ai déjà ma petite idée de comment les choses vont se passer, mais mes fantasmes ne sont pas toujours la réalité.

A ma proposition, tu te levais du lit et te dirigeais vers la salle de bain sans me lâcher du regard, jusqu'à ce que tu m’aies dépassé. Je te regardai passer devant moi pour pénétrer dans la petite salle de bain en retirant tes chaussures et je me levai à mon tour, posant ma bière sur le petit meuble à côté de moi. Je m'arrêtai un instant dans l'embrasure de la porte en te voyant entrer dans la douche, puis tu te tournais vers moi, te collant dos au mur en m'invitant à te rejoindre. Je t'assure que ça rentre. Un petit sourire aux lèvres devant ton air de défi, je m'approchai  de toi pour pénétrer dans la douche à mon tour. C'était clair qu'elle était petite et qu'on n'avait pas la place de déplier les ailes tous les deux... Je te fixai un instant dans les yeux, sentant mon corps se presser un peu contre le tiens. Me penchant, je vins m'emparer de tes lèvres, le cœur battant. Je savais que c'était idiot, j'avais rien à t'offrir, on n'avait rien en commun... mais je n'avais pas envie de me poser de questions dans l'immédiat.

Pour le coup, cette rencontre était très différente des précédentes que l'on avait pu avoir. Il y avait eu un déclic depuis la dernière soirée... depuis qu'on s'était un peu ouverts sur qui on était, au-delà de la façade. Il restait encore plein de choses à dire, à découvrir, mais on prenait notre temps et plus on se revoyait, plus je me sentais perdre pieds en ta présence. A être aussi proche de toi, mon corps collé au tiens et nos souffles se mêlant, j'avais franchis le peu d'espace qui nous séparait pour t'embrasser... et tu avais répondu à ce baiser, tes mains s'étaient posées sur moi. Je rouvris les yeux quand tu rompis le contact, plongeant mon regard dans le tiens. Et ton sourire... je le voyais de plus en plus souvent et chaque fois, il me plaisait davantage. J'eus un bref instant d'hésitation avant d'échapper un léger rire à ta question, plus nerveux qu'autre chose. Je ne me le disais déjà pas en me regardant dans la glace, alors te le dire directement... c'était pas aisé. Hum... parce que je commence à t'apprécier. J'étais pas amoureux c'était trop tôt, mais bien sûr que coucher avec toi ne me laisserait pas indifférent... ça ne pouvait pas être qu'une histoire sans lendemain, c'était fair que tu me le demandes. Mais désormais, je redoutais un peu ta réaction maintenant que je m'étais un peu mis à nu concernant notre relation.

La seule réaction à laquelle j'eus droit, ce fut un sourire... mais c'était la meilleure que j'avais pu espérer, celle qui me disait que pour toi aussi, ça comptait. Qu'en passant le portillon du jardin, tu n'aurais pas déjà oublié ce baiser échangé. Tu m'embrasses d'ailleurs de nouveau alors que ma main caressait doucement ton dos. C'était court, tendre, mais surtout tellement agréable que je savais déjà que j'en serais accro. Aucun risque pour ça. Je jouais plus... pour l'instant, du moins. Tout comme je t'avais clairement dit que je voulais te revoir, je ne cachais pas que pendant tes longues semaines d'absence, je penserais à toi. A plus ou moins forte dose... mais tu aurais toujours une place dans mes pensées, à un moment ou un autre de la journée. Je te suivais du regard alors que tu te glissais à l'extérieur de la cabine de douche, prétextant devoir rentrer à cause de ton avion. Tu partais parce que tu ne voulais pas craquer ? J'aimais l'idée, aussi frustrante qu'elle puisse être pour nous, ça me plaisait. Encore désolé de pas pouvoir t'emmener à l'aéroport. J'aurais vraiment voulu, pour le coup... Même si tout compte fait, se dire au revoir dans un contexte plus intime ne me déplaisait pas non plus. Je sortais à mon tour de la cabine de douche puis de la salle de bain pour te rejoindre à l'entrée, où tu m'attendais. T'as mon adresse maintenant... Pense à m'envoyer une carte postale, ajoutai-je avec un sourire amusé. Plus que pour la carte postale, c'était surtout pour avoir un contact par lettre avec toi, à défaut d'avoir un téléphone... ça faisait vieux jeu mais j'aimais bien. Pour le coup, c'était plus personnel qu'un simple sms.