L’accouchement n’a pas été de tout repos et j’ai eu sacrément peur pour les jumelles. Malgré tout, elles viennent au monde en santé malgré leur venue prématurée et se retrouve rapidement dans des incubateurs alors que moi je sombre dans le sommeil, complètement épuisé. La naissance de mes enfants a, malgré tout, été une chose magnifique, mais là? J’ai besoin de dormir.

Lorsque je me réveille, c’est parce qu’une petite main –ta petite main- me secoue en prononçant mon nom. « Liz... » J’ouvre les yeux et met quelques secondes à m’orienter. Lorsque je vois enfin ton visage, je crains immédiatement le pire et me redresse d’un coup, grimaçant à cause de ma clavicule. « Ariana? Qu’est-ce qui se passe? »

Il est normal que tu prévois le pire. Après tout, je te réveille en plein milieu de ton repos, les yeux rouges et les lèvres salées par les larmes. Tu te redresses, tirant une drôle de tête. Ta clavicule doit vraiment te faire mal... je m'en veux d'avoir provoqué tout ça. Mais d'un sens... sans cette accident... Timéo naîtrait potentiellement paralysé. Tu me demandes ce qu'il se passe et j'installe mes petites fesses à côté de toi, sur le matelas. Je vais avoir une césarienne... dans une heure. Je me pince les lèvres à nouveau, en retenant mes nouvelles larmes de s'échouer aussi sur ma bouche. Tim... il a un cancer foetal... et la tumeur est situé trop près de la colonne vertébral... En tant que Neurochirurgienne, tu es mieux placé que moi pour comprendre la suite de cette phrase. Tu as sans doute déjà assistée à des cas comme celui-là. Je n'ai probablement pas besoin de t'expliquer les risques et ses chances de survie : tu sais déjà tout. Et cette fois-ci, c'est à toi de me rassurer. Nos bébés vont naître le même jour... Est-ce qu'il y a bien quelque chose qu'on ne fait pas pareil toutes les deux ? Je me met à rire, à travers mes larmes et lève les yeux au plafond. Quoi qu'il est techniquement "demain", comme il est dépassé minuit.

Tu t’assoies et je ne te quitte plus des yeux, inquiète et attentive. « Je vais avoir une césarienne... dans une heure. » Je fronce les sourcils, perplexe cette fois. Si je n’étais qu’à 31 semaines, alors tu n’en es qu’à quoi 30? 29? C’est pas possible… si tôt? « Tim... il a un cancer foetal... et la tumeur est situé trop près de la colonne vertébral... » J’entre ouvre la bouche pour dire quelque chose, mais rien ne sort. À la place, je trouve rapidement ta main de la mienne qui soit encore valide et la sers fort. Je sais ce que ça implique et j’ai du mal à respirer en pensant que tu étais toute seule pour apprendre cette nouvelle. « Oh Su… » dis-je finalement parce que peu importe ce que je dirai ensuite, rien ne pourra réellement te remonter le moral et je ne veux pas te servir de phrase toute faites. « Tu sais qui dois faire l’opération? » Oui, c’est mon côté neurochirurgienne qui prend le dessus. Je veux que ce soit le meilleur du département qui s’en occupe.

« Nos bébés vont naître le même jour... Est-ce qu'il y a bien quelque chose qu'on ne fait pas pareil toutes les deux ? » J’essaie de rire un peu moi aussi, ne m’étant même pas aperçu que des larmes s’étaient échappées de mes yeux. « Quoi qu'il est techniquement "demain", comme il est dépassé minuit. » Je ris un peu encore en hochant la tête. « Eh bien, moi j’suis contente qu’on fasse ça ensemble… malgré les circonstances. » Parce que j’aurais pas voulu être avec qui que ce soit d’autre –sauf peut-être Lenny- pour traverser cette épreuve. « Je pourrai être avec toi..? » Tu étais à mes côtés lorsqu’ils m’ont accouché, alors j’aimerais pouvoir faire de même pour toi.

Je te transmet la nouvelle et tu n'as besoin d'aucune explication pour comprendre, pour te mettre à la recherche de ma main. Après tout, t'es neurochirurgienne... Tu me demandes si je sais qui dois faire l'opération et j'hausse les épaules. Côme ne m'a pas dit. Mais je sais que lui, il sera là pour assister l'obstétricien pour la césarienne... Et c'est probablement lui qui va tenir le scalpel, aussi. Après, concernant Timéo, je n'ai pas la moindre idée de s'ils vont l'opérer aujourd'hui ou attendre 24h, pour qu'il soit plus fort. J'en sais rien. Une étape à la fois, comme on dit... Je te fais mes blagues pourris pour essayer de détendre l'atmosphère et ça semble bien fonctionner pour toi puisque t'arrive à rire... Moi aussi... Ma main se referme sur la tienne et je me pince les lèvres. Je crois... oui. À moins qu'on te refuse l'accès parce que c'est un accouchement prématuré et donc... risqué. Bien que tu sois chirurgienne, t'es surtout là en tant que famille et soutien pour moi. Quelques minutes plus tard, une infirmière passe la tête entre la porte et le cadre, pour me faire signe qu'il est l'heure d'y aller...

« Côme ne m'a pas dit. Mais je sais que lui, il sera là pour assister l'obstétricien pour la césarienne... » J’hoche la tête et passe rapidement en revue les personnes qui pourraient être appelé à faire une opération pareille. Il me semble que tu n’aies rien à craindre et puis, j’veux pas en rajouter une couche. « J’suis contente de savoir que Côme sera là. » Au final, tu blagues un peu et je sais que c’est une façon pour toi de ne pas trop penser à tout ça, de détendre l’atmosphère autant pour toi que pour moi. J’suis contente qu’on fasse ça ensemble Suzy, toi et moi, always. « Moi aussi... » J’esquisse un faible, mais sincère sourire et demande si je pourrai être présente pour la césarienne même si je doute fortement. « Je crois... oui. » J’hoche à nouveau la tête et l’infirmière arrive pour te cherche. Je poses quelques questions et, comme je le croyais, je ne pourrai pas être là puisqu’il s’agit d’une opération et malgré ma formation, je ne suis pas en gynécologie, mais en neuro. C’est pas mon départ’. « J’serai dans ta chambre à ton réveil… promis. » Je t’embrasse rapidement sur le front et te laisse partir.

FIN DU RP