19 octobre 1992. Hôpital de Los Angeles. Une enfance heureuse avant le drame. L'air frais de la Californie comme point de départ pour commencer une vie, on ne pouvait difficilement rêver mieux. Surtout que j’avais la chance de grandir au sein d’une famille plus qu’unie. Après tout, j’avais mes deux parents qui s’aimaient comme au premier jour, des grands parents qui me choyaient comme une vraie petite princesse, des oncles, des tantes, des cousins, des cousines. Bref une famille unie et soudée dans n’importe quelles circonstances. En même temps, ma grand-mère était partie de rien, elle avait dû fuir son pays, la Russie avec mon père âgé seulement de deux ans, fuir son ex compagnon. Elle ne parlait pas un seul mot d’anglais et elle a rencontré mon grand-père, un vrai coup de foudre entre eux. Ce coup de foudre a donné naissance à une grande et belle famille recomposée. Pour ma mère, c’était un peu le même schéma, sauf qu’ils venaient de Chine mes grands-parents maternels. Du coup, j’ai grandi à la maison avec plusieurs langues, je suis donc devenue assez rapidement trilingue, je pouvais comprendre facilement le russe et le chinois, sans oublier l’anglais mais c’était ma langue maternelle. Mes parents, eux, se sont rencontrés sur les bancs du lycée, ils se sont aimés et s’aiment encore aujourd’hui d’un amour tellement pur que j’aime les voir heureux de mon petit œil d’enfant. N’importe quelle petite fille ne pouvait qu’être heureuse de voir ses parents heureux ensemble. Surtout que mes parents, ce sont des héros, ils sont policiers, ils arrêtent les méchants et sauvent les gentils comme aimaient me décrire son métier. J’avais l’impression d’être la fille de deux super héros et cela me faisait toujours sourire, cette idée. Je grandis donc sereinement comme une petite fille de son âge qui aime jouer avec ses amies, aller à l’école, se raconter des histoires, jouer avec ses poupées et passer du temps avec ses deux héros. Pourtant ce bonheur allait voler en morceaux, le temps d’un instant. C’était un jour où ma mère était sur une enquête dure, elle devait s’infiltrer, faire comme si elle n’était pas ma maman pour arrêter le méchant. Ce fut donc papa qui s’occupait de moi comme souvent quand l’un ne travaillait pas sur une enquête. Seulement le soir même, maman aurait dû rentrer et elle n’est jamais revenue. Papa a reçu un appel le lendemain matin et du haut de mes dix ans, j’avais compris que ma mère était partie au ciel. J’étais anéantie, elle n’allait pas pouvoir me voir grandir. Elle ne pourrait plus me voir danser, rire, m’amuser comme une adolescente de mon âge. Après l’enterrement de ma mère, mon père avait pris une décision radicale, on allait quitter Los Angeles direction Boston. Là-bas il avait des amis et puis la famille de maman ne vivait pas très loin, du côté de la Caroline du Nord je crois. Mes grands-parents paternels, eux, étaient en retraite alors ils ont décidé de partir vivre en Russie. Grand père avait toujours voulu connaitre le pays de grand-mère, c’était l’occasion.

2005. La descente aux enfers. Un an après le drame et avoir enterrés ma mère, nous venions d’emménager dans un appartement sur Cambridge mon père et moi. Je me suis jurée de ne jamais être séparés de lui et pourtant le destin allait en décider autrement. Et pour cause puisqu’il avait commencé à boire, il n’arrivait pas à faire son deuil. Il allait lui falloir du temps et à moi aussi. Sauf que je refusais de le laisser seul, je ne pouvais pas perdre le seul parent qu’il me restait. Par chance, mon père avait trouvé la solution, il avait décidé de me confier à des amis à lui, le temps qu’il aille mieux et me promettant qu’on se verrait les weekends. Je n’avais jamais été séparé de mon père plus d’une journée alors les débuts furent compliqués, je refusais de manger et c’est ainsi que je suis tombée dans l’anorexie. Une spirale infernale venait de s’enclencher, je mangeais, faisait comme si tout allait bien en apparence mais le soir venu je me faisais vomir à me faire mal au ventre. Je n’en parlais à personne, je ne me rendais même pas compte moi-même de ce que je devenais. Ce n’est que petit à petit que mon père s’est inquiété de me voir autant perdre du poids. Il m’a emmené chez un médecin et là le diagnostic venait de tomber. J’étais anorexique à 16 ans. Il comprit assez rapidement que c’était le fait de m’avoir séparé de lui alors il a décidé de remonter la pente pour moi, sa fille unique. J’ai donc quitté la maison des amis de mon père à l’entrée au lycée, je n’ai jamais perdu contact avec eux ni mon père d’ailleurs. Ils ont continué à nous soutenir, même si personne d’autre que mon père savait pour ma maladie. Pour compenser avec cette maladie, je me suis mise à fumer quelques joints par ci par là, je n’ai jamais touché aux drogues dures. Puis un an plus tard, j’ai fait un malaise au lycée, j’ai atterri à l’hôpital et j’ai eu le déclic, je devais arrêter les joints et de me faire autant de mal. Parce ce n’était pas ce qu’aurait voulu ma mère, que devait elle penser en me voyant de là-haut ? Je me suis reprise en main au lycée et j’ai obtenu mon diplôme de fin de lycée avec brio. Quelques mois avant, j’avais dit à mon père que je voulais entrer à Harvard en droit pour devenir avocate. Bien sûr je n’allais pas lui dire que je voulais entrer dans la police comme lui, il n’aurait jamais accepté. Surtout qu’il a décidé de reprendre sa vie en main, il n’avait connu que la police dans sa vie mais il avait toujours eu envie d’enseigner le droit. Au départ, j’ai mal réagi à l’idée d’avoir mon père comme professeur mais il y avait forcément plusieurs professeurs et puis on a toujours été proches tous les deux que je ne pouvais lui en vouloir de vouloir revivre.  

2018. Profiter de sa jeunesse et renaitre. Aujourd’hui, je suis déjà en septième année de droit et de sport, mon père y enseigne le droit. Et pour ainsi dire je vis très bien le fait d’avoir mon père professeur dans la même université que moi. il n’est pas trop sur mon dos alors forcément cela me convient. Certes je bosse en parallèle pour l’aider à payer mes études car ce n’est pas avec ma simple bourse et son salaire de professeur sans oublier la pension qu’il touche de la police pour le décès de ma mère qu’on va réussir à se faire plaisir. Oui j’ai eu la chance d’être boursière mais dans un sens, je n’ai plus que mon père dans ma vie et il ne peut pas payer tous mes frais tout seul. Du coup, je travaille au Starbucks en plus de mes cours. De toute manière, la notion de l’argent, il me l’a très vite apprise, même si je doute qu’il apprécie que mon argent de poche sert à payer des clopes mais cela reste mon petit secret pour le moment. Je suis entrée chez les Mathers depuis la rentrée dernière, j’ai beau être une élève studieuse, j’ai envie de retrouver cette jeunesse dont je me suis privée toute seule parce que je souffrais de l’absence de ma mère plus jeune. Certes elle continue de me manquer chaque jour et puis chez mon père, il y a toujours des photos d’elle alors on ne peut effacer la douleur. Mais j’aime bien sortir faire la fête, profiter de l’alcool ou de quelques clopes voire joints qui trainent par ci par là. L’avantage d’avoir sa chambre sur le campus, c’est qu’au moins ton père ne peut rien te dire car tu es rentrée trop tard et bourrée. Jusqu’à présent, je contrôle ma consommation lorsque je fais la fête, je connais mes limites, je sais que mes vieux démons peuvent refaire surface à tout moment. Mais cela ne m’empêche pas de vivre ni d’avoir d’excellentes notes en cours ni même de réussir à stopper les sorties en période d’examens. En dehors des cours, hormis mon boulot au Starbucks, j'aime aller faire rire les enfants malades ou m'occuper des animaux abandonnés. Ma mère me disait tout le temps qu'on aurait pu créer une arche de Noé avec mon immense cœur à vouloir sauver tous les animaux. J'ai d'autres passions en dehors de ceux là, le sport a une grande place dans ma vie aussi, la moto même si mon père refuse que je m'en achète une ou que j'en conduise une alors je reste toujours en passagère et je savoure cette soif de liberté. Et bien tant d'autres choses encore ...