"Each time he took a walk, he felt as though he were leaving himself behind, and by giving himself up to the movement of the streets, by reducing himself to a seeing eye, he was able to escape the obligation to think, and this, more than anything else, brought him a measure of peace, a salutary emptiness within...By wandering aimlessly, all places became equal and it no longer mattered where he was. On his best walks he was able to feel that he was nowhere. And this, finally was all he ever asked of things: to be nowhere."
— Paul Auster


Il paraît que pour certain, la vie commence le jour où on a rencontré la personne de notre vie. Celle qui nous révélera qui on est. C'était le cas pour un type un peu bizarre qui traîne dans les couloirs de Columbia avec assez de bouquin pour remplir une bibliothèque sous le bras. Un peu bizarre par son physique si particulier, qui le rendait unique, à sa manière et de sa personnalité, unique en son genre. Sa longue tignasse bleu voulait en dire beaucoup. Solitaire, c'était le dernier qui aurait penser que sa vie allait changer grâce à une femme. Jusque-là sa vie n'était rien d'autre qu'une succession d'événements banals. Azraël avait grandit à Pasadena en Californie, mais après s'être émancipé de sa famille, pour des raisons qui lui sont propre (envie d'indépendance certainement) il a déménagé à New York. Parce que New York est au cœur de tout, là-bas, tu peux diriger le monde, tel un roi. Mais ce n'était pas les intentions de l'homme au cheveux bleus. Parce que s'il y en avait qui dirigeait, il voulait révéler la sombre strate qui se trouve toujours derrière le pouvoir. Tel était ses convictions.  Persuadé que rien ne vient au hasard et sans intention cachée, il a toujours eu le même discours. Il voulait comprendre pourquoi les politiques mentent. Il voulait mettre à jour, à la vue de tous la vérité qui fâche.

A Columbia, il y étudiait la politique, le journalisme et l'histoire. Isolé au possible, il ne faisait partie d'aucune confrérie, aucun groupe. Il avait quelques amis, les seuls sur qu'il pouvait réellement compter. C'est à Columbia, qui la rencontra. Une brune aux yeux incroyablement bleu. Elle l'avait tout simplement ébloui.

"When I saw you I fell in love, and you smiled because you knew."
— Arrigo Boito


Elle venait d'arriver à Columbia, en cours d'année, elle était allemande, elle parlait bien anglais. Elle était souriante et surtout, elle n'était pas comme les autres. De jours en jours, de semaines en semaines, les deux étaient devenu inséparable. Ils semblaient formé un duo particulièrement fusionnel.  Mais ils avaient vingt ans. Et qu'est ce qu'on est con à cet âge-là. De ça de là, un accident arriva, leur arriva sous le nez comme une grosse claque inattendue. Lana tomba enceinte. Et le temps qu'ils s'en rendent compte, il était bien trop tard pour y faire quelque chose, cet enfant allait naître. Lana, elle, elle voulait pas, elle refusait, ça lui donnait des sueurs froides la nuit. Il n'y avait que le père, qui semblait être heureux de cette arrivée future dans leur vie. Quel idiot.

Il était amoureux, aveugle. Il ne voyait rien, il ne voyait pas les mensonges que la belle lui jetait à la figure chaque jours. Et pourtant, c'était ce qu'il détestait le plus. Les neufs longs mois finirent par s'écouler. Et un petit bébé brun vint au monde. Ce qui était censé être un jour heureux pour un, était le cauchemar d'une autre. La brune avait pensé faire des choses effroyables pendant les derniers mois. Elle voulait accouché sous x, dans le dos de son amant, elle voulait l'abandonner devant une caserne. Mais elle y avait renoncé au dernier moment, trop lâche pour faire ça à celui qu'elle aimait pourtant toujours. Ce bébé était une malédiction, qu'elle se disait. Alors le petit bébé, qui pleurait dans ses bras, la laissait de marbre alors qu'il pleurait. Sans grand débat, le petit se fit nommé Ivan. Nathaniel, son deuxième prénom, lui, venait de son grand père. C'était la seule chose qui le rattachait à la famille d'Azraël qui avait quasiment coupé les ponts avec eux. Ivan n'avait jamais su pourquoi, c'est d'ailleurs une des seuls choses qu'il ignore sur lui.

Quelques heures après la naissance du petit, Azraël avait dû partir de la chambre, pour s'occuper de l'administration. Mais quel fut l'horrible surprise, quand il revint. La chambre était vide. Elle était parti, sans rien dire. Le bébé a la nursery venait de se faire abandonner par sa mère. L'étudiant se retrouva absolument seul avec un bébé. Et rien ne fut facile. Il ignorait tout, comment faire une couche, que faire quand le bébé pleure, toutes ces choses qui semblent bien banales, mais pourtant semblait hors de porté pour l'étudiant. Le pire, était surtout qu'il ne savait pas comment être père.  Devoir valser pour ce jeune père, entre études et bébés étaient quasiment impossible tout seul. Comme c'était une situation particulière, on lui autorisa à suivre les cours de chez lui. Ses quelques amis lui apportaient ce qu'il ratait et il venait uniquement à l'université pour passer les examens. N'ayant pas vraiment les moyens pour payer une nourrice, c'était souvent ses amis qui venaient lui garder le petit quand il n'avait pas d'autre choix. Malgré la difficulté que lui apportait Ivan, il l'aimait de toutes forces. Il n'avait plus un but dans la vie, mais deux. Il voulait voir son fils grandir correctement, lui offrir des bonnes valeurs, qu'il réalise ses rêves.

C'est ce qu'il tenta de faire, tout au long des années. Ivan était un enfant heureux avec son père, c'était les meilleurs amis du monde. Azraël avait réussi ses études et après quelques mois de galère il trouva un poste comme rédacteur junior dans un journal.

L'enfance d'Ivan était heureuse et normale, il eut la chance d'avoir toujours ce qu'il y avait de mieux pour lui, sans être gâté. Il connaissait la signification du mot non, et l'acceptait quand il lui arrivait aux oreilles.  Ivan grandissait à une vitesse folle, aussi vite que la carrière de son père montait. Quasiment redacteur en chef, ce dernier prenait très à coeur son travail. C'est là, que les choses se compliquèrent. Ivan  avait dans les 12 ans et vint enfin la question : "Mais elle est où maman ?".

"The truth is rarely pure and never simple."
— Oscar Wilde

Alors son père lui avait expliqué, qu'elle était partie et qu'il ne sait pas si elle reviendra un jour. Chose qu'il ignorait à ce moment-là, c'est que trois ans plus tard, elle pointa le bout de son nez, comme un cheveux sur la soupe alors qu'Ivan était en cours. Cette dernière exprimait des regrets face à son abandon. Mais Azraël eut du mal à accepter ce qu'elle lui disait. Il avait compris bien après qu'elle lui avait menti. Et une fois qu'on nous a menti une fois, on ne peut plus savoir si on nous dit la vérité ensuite. Alors il interdit Ivan  de la voir au début, y posant ses réserve. Mais il savait aussi que c'était égoïste de sa part de le priver de sa mère alors qu'elle était enfin rentré. Alors après une longue discussion avec son fils, avec qui jusque-là, il s'était toujours entendu à merveille, il organisa une rencontre entre la mère et son fils.

Mais ça ne se passa pas bien. Une lourde et longue dispute avait éclaté entre les deux protagonistes. Et depuis ce jour-là, Ivan changea du tout au tout. Son caractère changea, la crise d'adolescence montra le bout de son nez. Rejetant tout le monde, même son père. Pourtant il l'adorait son père, il l'admirait, depuis toujours. Pas une fois dans sa vie jusque-là, il n'avait pas répété qu'il ferait le même métier que lui.  Rebelle au possible, il commençait à sécher les cours, pour traîner dans un vieux parc dans Brooklyn avec ses potes. C'était jamais rien de bien vilain en soit, mais c'était juste assez pour briser le cœur de son paternel. Ce qu'il ignorait, était que le travail de son père était dur à ce moment-là. Et ce dernier avait tellement de pression sur les épaules qu'il finit par ne plus la supporter. Il avait commencé par de simple verre après le boulot et doucement, les verres se multipliaient, encore et encore. Les mois passaient, et pire l'état de son père était.

L'adolescent mit du temps à s'en rendre compte, trop égoïste pour le voir tout de suite. Voir son père sombrer de la sorte lui fit comme un électrochoc, les souvenirs de son enfance reprirent enfin le dessus sur ses hormones en ébullition. Qu'était-il en train de foutre sa vie ? Il se la posa, du haut de ses seize ans. Alors il se calma enfin et tentant de communiquer à nouveau avec son père, c'est un rejet qu'il se prit en pleine poire à son tour. Il était clair que rien n'allait être facile. Mais il n'abandonna pas, parce qu'il avait hérité d'un trait de caractère de son père, qui semblait l'avoir perdu,  Ivan était extrêmement tenace. Il lui fallut des mois, mais enfin, il eut à nouveau des conversations avec son père quand il était encore à peu près sobre. Ne supportant d'ailleurs pas cette idée, il se mit en tête de le soigner. Il refusait voir son père être détruit par l'alcoolisme. Persuadé que c'était sa faute,  Ivan prit vraiment à cœur cette tâche. Il voulait montré à son père qu'il était bien son fils. L'adolescent vira les bouteilles d'alcool de leur appartement, une à une. Mais rien n'y faisait, son père finissait toujours pas en avoir une sous la main, caché à un endroit que son gosse ne pourrait se douter.

Complètement dépourvu, c'est vers sa mère qu'il se tourna. Lui suppliant de l'aider, il essuya un rejet. Qu'il n'avalera certainement jamais. Sa relation avec sa mère se termina aussi vite qu'elle avait pu commencer.  Quelques mois plus tard, il avait fini par convaincre son père d'aller se soigner.  

Mais comme rien ne se passe comme on veut, c'est là que ça a dégénéré. Suivant une sorte de thérapie contre son addiction, son père semblait faire des  progrès. Mais un soir d'Août se passa un événement qu'aucun n'avait prévu. Azraël avait pris la voiture pour rentrer chez eux, il était très tard la nuit et il eut un très grave accident.

Where did I go wrong? I lost a friend. Somewhere along in the bitterness and I would have stayed up with you all night. Had I known how to save a life.

La nouvelle arriva aussi vite qu'un ouragan, le téléphone d'Ivan le réveilla en sursaut, c'était les urgences. Ni une ni deux, il partit pour l'hôpital. Le garçon avec dix huit ans. Et malheureusement pour lui, c'était le nombre d'année auquel il a pu vivre avec son père. Azraël était dans le coma, et selon les médecins, il y avait très peu de chance pour qu'il se réveille un jour. Mais le garçon refusait de prendre cette décision. Alors il gardait l'espoir un jour, que son père revienne. Quant aux circonstances de l'accident, c'était flou. Selon l'enquête, ils n'arrivaient pas à déterminer si c'était un suicide ou un accident à cause du peu d'éclairage de la route.

Se retrouvant seul, il refusait d'être sous la responsabilité de sa mère alors il fit comme son père, il demanda l'émancipation. Après ce choc, il eut énormément de mal à s'en remettre. C'est ce qui le décida à vraiment travailler comme un forcené, s'enfermant dans ses études, il passa de note moyenne à très haute. Mais il restait toujours un petit con qui fait des conneries, mais il savait simplement gérer son temps. Bien qu'au tout début il n'avait guère penser à s'amuser.

Finalement, il avait déposé sa candidature à Harvard sans d'autre au cas où. C'était ça ou rien. Et par on ne sait quel miracle il avait été accepté. Depuis, il est devenu un jeune homme comme tant d'autre. Ivan est un type tenace, très franc et borné. C'est un ami assez fidèle qui ne veut pas revivre ce qu'il a vécu avec son père, alors il se montre toujours très attentionné avec les autres, à leur sortir les vers du nez s'il le faut.