Tu ne sais pas ce qui s'est passé. T'as aucune idée de ce qui t'a traversé l'esprit pour que là, en quelques secondes, tout bascule. Un mot, deux syllabes, six lettres. Et cela suffit à tout pulvériser. Tous ces efforts déployés à masquer la vérité réduits à néant. Tu te demandes si t'es toujours en train de respirer. T'as oublié comment faire. Tout ce qui te reste, c'est ce prénom qui résonne dans ta tête. Tu ne bouges pas d'un cil, mortifié par ce son qui s'est échappé de tes lèvres à ton insu. Ou peut-être que tu l'as voulu, t'es totalement perdu. T'as cette impression de t'être débarrassé d'un poids pour t'en mettre un autre sur les épaules, tout en ayant l'horrible sensation d'avoir tout raté. Cette porte que t'as refermée t'a brisé. Comme si ton coeur s'était noyé au fond d'un gouffre sans fin, comme si ton âme avait été écartelée au milieu du vide. T'as pas pu le supporter. Tu te pensais fort, capable d'encaisser mais c'était faux, tu t'es simplement bercé d'illusions. Et maintenant elle se retourne vers toi, le visage encore ruisselant de ces larmes que tu voudrais ne jamais revoir. T'es pas certain de ce que t'es censé faire maintenant. Tu t'es toujours refusé à imaginer cette possibilité durant ces innombrables heures passées à te torturer l'esprit avec toutes tes questions et tes scénarios. « pourquoi tu mens ? » Pourquoi t'as dit la vérité ? T'avais mille et une raisons de ne pas la dire, une seule de tout avouer. Ça ne s'est pas fini comme tu l'avais espéré. « J'crois pas que tu réalises tout ce que ça veut dire. » Ta voix est étonnamment calme, posée, alors que tout ton être hurle à la mort. Non elle ne se rend pas compte, mais tu ne peux pas lui en vouloir pour ça. « J'suis désolé, j'voulais pas détruire ta vie. » Parce que c'est exactement ce que tu viens de faire. T'aurais jamais dû la rencontrer.

j’étais pas prête. et en fait, j’étais prête à aucune réponse sur cette situation. on aurait pu me dire n’importe quoi que j’avais pas la force pour l’affronter. mais là, il prouvait que j’avais raison. que j’étais pas dingue et que mes rêves étaient des souvenirs enfouis. j’étais meghan et il venait de m’appeler par ce prénom. il était mon frère. mon grand frère et j’avais été arrachée à lui et la vie que j’aurais du avoir quinze ans plus tôt. je savais pas ce que je devais faire, ce que je devais dire parce que personne ne pourrait imaginer un jour dans sa vie vivre un truc pareil. pourtant, c’était bel et bien le cas. j’étais meghan et les circonstances avaient fait que j’avais fini sur son chemin, que les doutes s’étaient immiscés petit à petit et maintenant, on tombait de très haut. pire, on dégringolait. « je crois qu’au contraire je réaliste très bien. » j’étais pas bête comme fille. je savais tout ce que ça pouvait impliquer. si j’étais réellement cette « meghan », philip allait le dire à ses parents -à mes parents- et là, la spirale infernale serait enclenchée. l’enquête réouverte, mes « parents » arrêtés, toute ma vie remise en question. ouais, je savais très bien ce que ça pouvait impliquer à partir du moment où j’avais commencé à douter d’être ziggy atkinson. « est-ce que tu détruis ma vie ou est-ce que je détruis la tienne ? est-ce que t’es réellement fautif ou est-ce que les fautifs sont ceux qui m’élèvent depuis maintenant quinze ans ? est-ce qu’ils sont réellement coupable ou est-ce qu’ils ont cru m’adopter et n’ont rien à voir là dedans ? » y en avait des tonnes de question comme ça et moi, je ne savais pas y répondre. je ne savais pas quoi faire ou quoi dire. « qu’est-ce qu’on est censés faire maintenant ? » ouais, c’était surtout ça. parce que moi, j’avais besoin d’indication.

Tu ne réalises pas encore complètement ce que tu viens de faire. Comment là, en une fraction de seconde, vos deux vies viennent de basculer. Elles sont désormais liées à jamais, pour le meilleur et pour le pire. Sauf que là tout de suite, tu ne vois que le pire. « je crois qu’au contraire je réaliste très bien. » Tu ne doutes pas de son intelligence, Ziggy c'est le genre de fille très vive d'esprit. Et si elle s'est torturé l'esprit autant que toi durant ces derniers jours, elle a forcément réfléchi à ce que cela entraînerait si tu confirmais ses hypothèses. Elle te le prouve d'ailleurs avec toutes ses questions, auxquelles tu n'as pas de réponses à lui apporter. Quand bien même tu y penses depuis que tu as tes premiers doutes, tout arrive désormais si soudainement que t'es perdu. T'as pas les solutions, et la seule carte que tu avais en main, c'était de décider si oui ou non tu allais lui avouer la vérité. Tu viens de la révéler et maintenant t'as plus rien. « qu’est-ce qu’on est censés faire maintenant ? » finit-elle par te demander. Ton côté rationnel se manifeste alors à nouveau. T'as besoin d'être sûr à cent pour cent, d'une preuve concrète et irréfutable. Et pour ça il n'y a pas dix mille possibilités. « Tu vas faire un test ADN. Un vrai, cette fois-ci. » Parce qu'il reste encore une chance pour que tout cela soit véritablement une énorme coïncidence, comme tu le disais plus tôt sans y croire. « En attendant je pense que c'est mieux de faire comme si de rien n'était, jusqu'à ce qu'on soit certain. » Clairement plus facile à dire qu'à faire, mais tu ne vois pas d'autre choix.

j’avais besoin de savoir ce que l’on devait faire maintenant. ce que moi je devais faire. j’étais meghan.. et après ? qu’est-ce que ça signifiait ? est-ce qu’on le gardait pour nous pour faciliter la vie de tout le monde ? j’savais pas si je serais réellement capable de faire un truc pareil et d’un autre côté, j’avais peur de tous les changements que ça pourrait opérer dans ma vie. j’avais pas envie que ça soit le cas, que tout soit sens dessus dessous. mais n’étais-ce pas déjà le cas ? ouais, ma tête était un sacré foutoir, j’avais beaucoup trop de question en réserve et pas assez de réponse à mon goût. quand philip avait finalement réouvert cette porte, il avait choisit de tout bousculer. j’savais pas pourquoi il avait mentit en premier lieu et pourquoi est-ce qu’il avait finalement craché la vérité mais il l’avait fait. le problème étant que je ne me sentais pas du tout soulagée par tout ça. bien au contraire. « ouais, un test adn. » parce que même si l’on semblait tous les deux certains de la réponse dans tout ça, c’était sûrement mieux pour tout le monde d’avoir une preuve tangible dans tout ça. « ouais. on dit rien, on fait comme si de rien était. » mais est-ce que j’en étais capable ? parce que même dans le doute, j’avais été plus que mal alors maintenant? ouais, ça risquait d’être plus que compliqué pour moi. j’poussais un soupir détournant le regard pendant quelques instants avant de regarder philip une nouvelle fois. « t’es mon frère. » et putain, c’était tellement bizarre de dire ça. toute notre vie était en train de changer de la manière la plus brute qui soit.

T'essayes de rester maître de toi-même, de ne pas t'emballer au cas où tout s'effondrerait comme un château de cartes autour de vous. Tant que tu n'auras pas la certitude absolue que Ziggy est bien ta soeur, tu tiens à garder la tête froide. « ouais, un test adn. » C'est le seul moyen d'obtenir une preuve formelle et irréfutable. Tu penses déjà à contacter différents laboratoires pour leur envoyer vos échantillons dès ce soir et recevoir les résultats dans quelques jours. En attendant, tu suggères de prendre votre mal en patience, ce à quoi elle acquiesce sans grande conviction. « ouais. on dit rien, on fait comme si de rien était. » Malgré ses paroles, tu doutes qu'elle y parvienne. Sullivan et Hecate sont déjà dans la confidence et t'as aucun doute sur le fait qu'elle ira se confier à eux dès qu'elle quittera ton appartement. Dans le fond tu comprends qu'elle ait besoin d'en parler, bien que toi-même tu ne comptes parler de tout cela à personne pour le moment. Un silence s'installe durant quelques secondes, un léger malaise flottant dans l'air. Tu ne sais pas trop quoi dire mais c'est elle qui prend finalement la parole pour résumer toute la situation. « t’es mon frère. » La phrase la plus weird ever. Tu restes silencieux un bref instant, prenant conscience qu'elle peut désormais le dire, ou presque. « Ouais. » T'as rien de plus à rajouter, ça se passe de commentaire de toute façon. Tu t'avances lentement vers elle pour la serrer dans tes bras. Ouais, elle est ta soeur.