Quand je l’entendais parler, évoquant la ‘corde au cou’ pour parler du fait d’être en couple, d’être engagé vis à vis de quelqu’un, je me disais que l’électron libre qu’elle était ne devait pas avoir changé. Mais est-ce qu’on pouvait être vraiment heureux comme ça ? Sans attache, sans lien, sans bases solides qui restent quoi qu’il se passe ? Ca m’intriguait. Elle ne répondait pas cash qu’elle était heureuse, mais elle affirmait qu’elle était bien, ajoutant ensuite qu’elle serait peut être mieux un jour, si elle essayait la corde au cou. Et quand elle me provoqua ensuite, avec son ‘peur de rien’, je répliquais en jouant à mon tour affirmant le contraire. Elle avait peur de tout. C’était une trouillarde. Je vis à son regard, à son expression, que j’avais réussi à la déboussoler un peu, à la piquer au vif, je compris qu’elle avait envie de répliquer mais mon ton joueur, mon regard amusé et ma main tendue effacèrent toute trace de colère sur son visage au final. Et c’est comme cela qu’elle me concéda la place que je réclamais dans sa vie, se questionnant sur le temps pendant lequel j’allais vouloir la tenir cette place. « C’est un challenge ? » rigolai-je en sentant le défi dans ces mots, dans ses yeux, dans sa voix. Et ses doigts attrapèrent finalement les miens, pas pour me suivre non, pour tirer doucement sur mon bras, me prendre de court, m’attirer contre elle. Son corps contre le mien, le contact de sa paume dans mon cou, la proximité soudaine entre nous, son souffle, là, à quelques centimètres de mes lèvres… Mon pouls s’emballait malgré moi, troublé, même si je m’appliquais à ne rien laisser entrevoir. « Dina… » Et ma bouche avança doucement jusqu’à sa joue pour y déposer à mon tour, comme elle l’avait fait juste après m’avoir entraîné ici, un doux baiser sur sa peau. Glissant ensuite jusqu’à son oreille, c’est aux creux de son oreille que je lui murmurais cette réponse : « Tu ne m’as jamais fait peur… » Ce qui m’avait fait peur c’était de te perdre, j’aurais tout fait pour te garder, parce que j’étais dingue de toi. Je m’étais ruiné pour cette bague, en grand gosse insouciant que j’étais, projetant du haut de mes 21 ans de te demander ta main. Mais je t’avais perdue quand même, t’étais partie, avant même que je ne la fasse, cette demande. Alors te garder dans ma vie ne me demandait aucun courage, en fait, ça me faisait sentir incroyablement léger et bien de te retrouver un peu. Ma main reprit le chemin de la tienne pour t’emmener avec moi… « Je connais un bar où ils servent des shooters enflammés, ça te tente ? » lançai-je en avançant alors dans la rue, direction un autre établissement…

Dina elle le provoque, elle te cherche un peu, balançant de subtiles mises en garde sur le fait de vouloir la garder dans ta vie. Que tu prends au vol, tu joues avec sans te soucier de ce qu'elle est capable de faire, de détruire juste par envie, par distraction ou par pire encore.. Par attachement. Parce que t'aurais pu l'avoir en fait, t'aurais pu la faire changer, elle aurait pu t'avoir dans la peau si elle n'aurait pas vu la bague à l'époque. Par habitude elle serait resté, et à force, elle aurait pu s'habituer à toi, à tout ce que tu lui donne sans même s'en rendre compte et aucun moyen pour elle de s'en sortir indemne comme elle le fait à chaque fois. Et maintenant le jeu prend une autre tournure, c'est elle qui veut t'attraper, c'est elle qui veut te mettre en cage comme t'as pu l'être a un moment donné. Les rôles s'inversent aujourd'hui, et Princesse elle adore ça, jouer. - C'est une question.. À laquelle je veux une réponse d'ici quelques jours. Exigeante Princesse, même si elle sait pertinemment comment tout ça va se terminer, tu finiras par la supplier de dégager de ta vie, de te laisser tranquille parce qu'elle aura trop foutu le bordel, parce que tu seras à deux doigts de tout perdre pour son sourire ravageur. Et elle le sent, là, que t'es faible face à elle, que tu te contrôles mais pas assez pour rester en laisse. Que la corde, elle finira par la découper en morceau un jour ou l'autre. Et ta voix qui vient murmurer son prénom, ça lui fait se rappeler.. De ce ton de voix presque suave, indécent que tu prenais si bien quand vous ne faisiez plus qu'un. Elle ferme les yeux, de laissant bercer par les chauds souvenirs jusqu'à ce que tes lèvres viennent briser ce voyage dans son subconscient. Princesse sourit d'abord, puis elle lâche un petit rire quand elle voit toute cette assurance. Elle rigole princesse, parce qu'elle se connaît et te connais que trop bien aussi. - Alors je veux bien te suivre jusqu'au bout du monde si tu veux. Invitation ? Oui. Complètement. Et ta main vient retrouver la sienne, qu'elle serre un peu plus fort et commence à marcher dans la même direction. - T'as oublié mon amour pour les shooters ? Ça me tente a une condition.. Elle laisse sa phrase en suspend un instant avant de reprendre. - Qu'on lèche le sel sur une partie du corps de l'autre que l'on aura décidé à chaque shooters !

Ma place dans sa vie je l’avais donc regagné, sauf que Dina et sa question sous entendaient que ce n’était qu’une question de temps avant que je n’en veuille plus. « Pas besoin d’attendre des jours, tu peux déjà l’avoir ma réponse : je suis pas du genre à me débarrasser des gens… Moi… » Le petit ‘moi’ ajouté en fin de phrases était une pique à son attention, un petit rappel de ce qui s’était passé quelques années plus tôt, de sa fuite, de ce vide qu’elle avait laissé en me lâchant du jour au lendemain. Et elle avait ce sourire, cette assurance, ce regard joueur. Dur de déceler ce qu’elle avait en tête, et ce n’était pas la proximité qu’elle instaura ensuite entre nous qui allait m’aider à y voir clair. Trop proche. Trop troublé… Mais je me repris, scellant d’un bisous contre sa joue nos retrouvailles et la promesses que ça m’effrayait pas. Je n’avais pas peur d’elle, encore moins de l’avoir retrouvée quand je m’étais plaint des mois durant de l’avoir perdue. « Au bout de la rue, ça sera déjà un début. » rigolai-je en l’entraînant avec moi. Direction un nouveau bar. Un autre établissement dont déjà je vantais les mérites, les shooters enflammés qu’ils proposaient là bas. Mais la brunette derrière moi émit alors une condition. Tournant un instant la tête vers elle, intrigué, je l’écoutais. Pensant qu’elle essayait juste de me déstabiliser, je répliquai : « Je savais que t’avais toujours fantasmé de me lécher les orteils. » Et je lui tirai la langue, taquin avant de l'attirer avec moi en riant à l’intérieur, vers le comptoir pour rapidement passer commande de notre mètre de shooters

Tu lances un pique blindé d'amertume, ce genre de pique qui veut tout dire, ou du moins le principal.. Que ça te touche encore, qu'elle te touche encore malgré toutes ces années passées sans toi, sans elle, sans ce vous auquel tu t'es assurément trop accroché. Et de quoi pourrait-elle t'en vouloir ? C'est bien elle qui a réveillé la flamme, qui a fait de toi son monde pendant un moment avant de le jeter au feu. Ce monde dans lequel elle a construit votre relation, dans lequel elle a pu te faire rêver, ou encore se faire rêver elle même de ces illusions d'attachement auxquels elle n'a jamais eu envie de croire vraiment. - J'me suis pas débarrassé de toi, la preuve.. J'suis encore là. Par le fruit du hasard, ou pas, peut-être bien qu'elle savait que tu étais venu te terrer ici et qu'elle avait une pointe envie de te revoir. - Même après trois ans. Par quoi elle termine. Elle, au moins, elle avait prit soin de revenir libre, de ne pas ressurgir avec des menottes aux poignets en guise de bracelet, pas comme toi. Qui est tombé amoureux pour la énième fois après elle, qui prétend ne rien avoir oublié alors, que si, le plus important s'est évaporé depuis. Et Princesse en subit amèrement les conséquences. Dina le suit, jusqu'au bout de la rue comme il lui a soigneusement demandé.. Pourquoi pas pour un début ! La porte poussée, elle rentre dans une atmosphère un peu plus intime, plus discrète aux lumières tamisées éclairées de parts et d'autres de la pièce. Elle avance encore, jusqu'au bar où tu commandes les premiers shooters. - T'es presque drôle tu sais ? Qu'elle lance taquine, haussant les sourcils. Et puis elle tourne la tête vers la commande enfin prête qui vient d'être servie devant elle. - Alors ? T'acceptes le marché ou tu commences déjà à te défiler ? Qu'elle demande en battant des cils, encerclant le petit verre entre ses doigts fins.

J’étais pas de ce genre là d’habitude. Aigri… Mais c’est malgré moi que la petite pique à son attention s’était échappée, pour lui rappeler qui de nous deux était le lâcheur, qui de nous deux était le lâché. Ce n’était donc pas moi qui allais l’abandonner, cette place qu’elle m’octroyait à nouveau j’allais la conserver… Jusqu’à ce qu’elle se lasse ? A nouveau ? Qu’est-ce qui s’était passé trois ans plus tôt ? La question me brûlait les lèvres mais à quoi bon la poser. A quoi bon rappeler cette fin amère ? Ou peut être que j’allais finir par la poser, cette question, d’ici quelques verres, quand je maitriserais moins mes mots. Et elle se jouait de moi, se jouait de la situation, faisant remarquer qu’elle était toujours là. « Parce que je suis venu te chercher ce soir. Sinon, tu jouerais encore les amnésiques pas vrai ? » Et je me rendis même pas compte, qu’avec ses paroles, je révélai être venu intentionnellement dans ce bar dans l’espoir de l’y trouver encore, dans l’espoir d’avoir cette confrontation, ces explications… Et on entrait ensuite dans la chaleur d’un nouveau bar, pour un nouveau jeu : shooters enflammés… Peut être que je ne devrais pas, jouer ainsi avec le feu. Mais je ne le voyais même pas, le danger, dans ses paroles, dans sa proposition, dans son défi, ne voyant que l’innocente envie de jouer dans son marché et reconnaissant bien là son petit côté défiant, ce côté challengeuse qui m’avait aussi fait craquer trois ans plus tôt. Et parce que j’étais joueur également, en guise de réponse, je saisis ses doigts, amenant doucement sa main vers moi, déposant quelques grammes de sel sur le dos de cette dernière avant de venir les lécher, sans lâcher ses prunelles, lueur malicieuse dans le regard. Saisissant ensuite l’un des petits verres que le barman avait déposé en nombre sur le comptoir devant nous, je le vidais d’une traite, et le reposai en grimaçant, laissant l’alcool brûler doucement mon œsophage avant de reprendre la parole : « Je ne me défile pas. Et toi la trouillarde, prête à jouer à ton tour ? » m’amusai-je à la taquiner également.

Tu voulais bien le suivre, n'importe où même mais est ce que lui, il arriverait à te suivre ? Tout le temps ? Là où t'auras envie de l'emmener, même si ça veut dire qu'il devra se perdre dans tout ce qu'il est. Tout ce qu'il représente. T'en es pas sure, pas du tout même mais tu restes joueuse jusqu'au bout. Capricieuse, tu lâcheras pas l'affaire, puisqu'il te l'as demandé, alors tu vas exaucé son vœu. Tu vas rester là, dans sa vie, dans sa tête, dans son esprit, un peu partout en fait pour qu'il ne puisse jamais oublier. Pour que les souvenirs deviennent trop présents, à lui couper le souffle. Pour que ses rêves portent ton nom. - Ouais sûrement.. J'aime ça te rendre dingue, alors ouais j'aurais continué à jouer. Et peut être que c'est ce que t'aurais dû faire. Faire comme s'il n'avait jamais existé, au moins t'aurais pas eu à vivre le supplice de savoir que tu ne comptes plus comme avant, qu'elle a prit ta place. Et t'aurais fini par croire à ton propre mensonge. - Mais tu m'as trouvé, j'étais pas assez bien caché faut croire.. La voix aux senteurs d'un léger regret. Ouais, tu regrettais déjà de l'avoir laissé t'attraper, mais ce qui est fait est fait, et t'as plus trop le choix que de te souvenir de tout. Les shooters enfin servis, le sel a porté de mains, et tu le juge incapable d'accepter ton défi. Tu l'fait parce que tu connais ses réactions par coeur, ses pensées, sa façon d'être et, tu savais qu'il ne pouvait pas te laisser avoir le dernier mot. Il joue, le sel éparpillé en rail sur le dos de ta main, sa langue qui vient lécher le tout. Tu le regardes, maintient son regard joueur, t'aimes la flamme qui vient briller au fond de ses yeux. Un petit signe de tête pour le féliciter, tu te retournes vers le bol, attrapant un peu de sel entre tes doigts et tu en met un peu sur sa clavicule. - J'adore jouer tu sais.. Que tu murmures sous sa mâchoire, passant ta langue sur l'assaisonnement que t'as pris soin de disposer, puis tu recules pour enfiler ton verre à ton tour. - T'as toujours aussi bon goût.

Je lui reprochais à nouveau doucement son petit numéro, reproches qui l’amusèrent plus qu’autre chose. Elle avoua qu’elle aimait me rendre dingue, qu’elle aurait donc probablement continué à jouer. « Je t’aurais emmené consulter un toubib, un neurologue ou je sais quoi pour amnésie. » racontai-je alors avec un rire avant d’ajouter : « Je suis content que t’aies arrêté ton manège et qu’on puisse se retrouver un peu. » Là autour de ces shooters, autour de ce jeu dont je ne décelais même pas le danger. Joueur, d’un baise main/léchouille je m’emparais du sel du bout de la langue avant de m’enfiler mon premier verre, la défiant du regard. Attendant son tour, curieux de la voir à son tour jouer, c’est au creux de mon cou que je la sentis déposer les grains salés, sensation suivie par celle de sa langue contre ma peau qui venait s’en emparer. « Je suis pas chatouilleux je te rappelle… » assurai-je avec un sourire. Parce que c’était pour essayer de me chatouiller qu’elle avait choisi cet endroit non ? Elle se recula pour boire le shooter de tequila à son tour, commentant alors mon bon goût. « Littéralement ou au deuxième degré ? » rigolai-je alors, comme si elle complimentait mon choix de bar et de boisson pour la soirée. « Parle moi un peu de toi Dina… T’es arrivée quand ici ? T’étudies quoi à Harvard ? T’habites où ? » Milles questions me brûlaient les lèvres, après tout on avait trois années à rattraper.
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