Je t'explique comment je vois les choses. J'reste franc dans mes propos et j'crois bien que ça t'enlève un poids de sur les épaules. Tu commences à rire. Je te regarde du coin de l'oeil, un sourire amusé sur les lèvres. Des larmes coulent sur tes joues et je te laisse évacuer la pression. J'trouve ça carrément dommage que tu puisses pas être toi-même, tout simplement. Si y'a bien un truc important dans la vie, c'est d'être qui on est et de dire fuck au reste. Faut croire que ce n'est pas ton quotidien. Tu me sors une remarque sur le fait que je ne m'attendais probablement pas à finir ma soirée ainsi. Je ris à mon tour. "C'est le moins qu'on puisse dire." On est allongé, là, à fixer le plafond et à rire. Effectivement, j'avais prévu une toute autre soirée. Tu reprends la parole et je tourne la tête dans ta direction. "Non, pas du tout. J'sais pas qui t'es, mais j'ai l'impression que c'est une bonne chose." Pas que ça aurait changé quoi que ce soit. Loin de là. Ici, maintenant, tu peux être qui tu veux. Tu peux arrêter de faire semblant. La chambre est payée... Qu'est-ce que t'as envie de faire? "  

Maintenant que j'ai commencé à rire, il semble que je ne puisse plus me reconcentrer, retrouver mon air froid et sérieux qui fait - m'a t'on dit - tout mon charme. Non, à la place, je ricane encore quand Hyde confirme que sa soirée avait bien prise une tournure inattendue. Je devrais peut être me sentir coupable mais ma soirée m'a elle aussi prise par surprise. J'avais juste prévu de boire un verre avec mes amies, après tout... On reste pourtant allongé là, sur le lit, ensemble, à regarder le plafond comme le ferait deux gamins, et cette idée me fait sourire, plus que je ne souhaiterais l'admettre. A quand remonte la dernière fois que je me suis laissée allé sans me soucier de mon image, des conséquences de mes actions, ou de ce que pourrait dire mes parents ? "En temps normal je te dirais que c'est la pire des choses," je plaisante - qu'à moitié. Ce n'est un secret pour personne, j'ai une haute opinion de moi et au fond, je pense réellement que je gagne à être connue. Cela ne veut pas pour autant dire que je pense être la nouvelle Madone. "Mais en effet, ce soir, je suis soulagée que tu ne saches pas qui je suis." Tu peux être qui tu veux, il me dit. Cette phrase me prend totalement au dépourvu. Qui je veux être ? J'en ai pas vraiment la moindre idée. C'est pas comme si on m'avait déjà laissé le choix. Bien sûr, j'ai des objectifs dans la vie. Je sais que j'ai envie de devenir une journaliste de renom, quelqu'un avec de l'influence à la tête de son propre talkshow. Mais je sais que c'est pas ce que Hyde veut dire. "Dis moi un secret. Sur toi. Quelque chose que t'a jamais dit à personne," je lui dit alors. Après tout, je ne vois pas pourquoi je devrais être la seule à me reveler ce soir.

Ton sourire résonne à mes oreilles. J’suis content de t’entendre relâcher la pression. J’devrais probablement en avoir rien à foutre que tu te sentes bien ou pas en ma présence, me foutre de savoir que tu es terrifiée à l’idée de dire aux autres qui tu es réellement. Après tout, on ne se connaît pas. Étonnement, c’est le contraire qui se passe. Du coin de l’œil, je te vois sourire et je me détends. Tu m’avoues que, dans des circonstances différentes, le fait que je ne te connaisse pas t’aurais déplu. J’en conclu que tu dois probablement venir d’une famille fortunée… la réputation… tout ça. Je suis loin d’être en mesure de comprendre ce que c’est, entre ma toxico de mère et mon motard de père. Puis, je réfléchis et je me dis que, moi, au moins, je peux être qui je veux sans me soucier du regard des autres. C’est là que je te propose qu’on fasse ce que tu veux, d’être qui tu veux. Ce soir, tout t’es permis. J’te laisse réfléchir et je hausse les sourcils en entendant ta réponse : « Dis-moi un secret. Sur toi. Quelque chose que t’as jamais dit à personne.» Je ne croyais pas que la conversation allait dériver vers mes propres secrets. Je passe ma main dans mes cheveux. Un secret, mh? Je ricane. « J’te donne l’opportunité d’être qui tu veux et de faire ce que tu veux ce soir et… c'que tu veux, c'est en apprendre davantage sur moi? » Ouais, je sais exactement quel secret me brûle les lèvres, mais j’suis pas prêt à le dire à voix haute. Pas prêt du tout. Je soupire. « J’suis obligé? » Je ricane une nouvelle fois, presque nerveusement, et je te regarde du coin de l’œil.