Je venais de m'échapper, et j'ignorais encore comment. J'en sais rien, je me souviens plus, les souvenirs deviennent encore flou, trop flou même. J'avais réussir à partir, à m'en aller de cette pièce qui devenait de plus en plus étroite et j'avais encore du mal à respirer. Je pouvais pas rentrer chez moi, je pouvais pas être seule, j'avais besoin d'en parler et je saurais dire comment je suis arrivée devant sa porte, devant chez elle. J'ai déjà voulu lui en parler, et si je suis là ça doit être à cause de la panique parce qu'on est même pas si proches. Je frappe, de plus en plus fort. Je pleure pas, pas encore, j'ai réussi à me contenir, à tout retenir. Elle ouvre la porte, et je craque. Tout lâche, rien qu'à voir sa tête, rien qu'à la savoir présente, rien qu'à ses yeux sur moi.
 

C'est la première soirée que je passe chez moi, à Cambridge depuis la rentrée. Depuis septembre, je dors dans la chambre que j'occupe à la Eliot House dans le but de m'imprégner de la vie de la maison. J'ai retrouvé mon petit chez moi et je décide de passer la soirée à travailler un peu. Lunettes sur le nez, habillée d'un bas de survêtement et d'un gros pull, je suis assise dans le salon, travaillant sur la table basse devant la cheminée allumée de mon appartement. Nous sommes début octobre et forcément, il commence à faire bien frais ici. Je suis tellement concentrée sur mon ordinateur que j'entends à peine la personne qui toque à ma porte. Les coups se font de plus en plus rapides et forts et je me lève, un peu soucieuse. Je regarde dans le judas de la porte pour reconnaître Reagan. Fronçant les sourcils, j'ouvre immédiatement la porte et elle s'effondre. Immédiatement, je pose mes mains sur ses épaules pour la tirer contre moi, bien que je ne comprends pas ce qui se passe. « Reagan.. », que je dis dans un murmure, la gardant contre moi en me reculant pour que nous puissions entrer dans mon appartement. Je me recule alors et j'attrape son visage entre mes mains. « Qu'est-ce qui se passe ? » que je demande, inquiète.
 

Je sais pas si me tirer contre elle est le bon reflex, parce que je suis tellement dégoûtée de moi-même, je me sens tellement sale que même rien qu'être touchée par quelqu'un me rends mal. Pas pour moi, mais pour la personne en face. « Reagan.. » on recule dans son appartement et je la laisse faire, je suis juste un légume ambulant, j'ai envie de pleurer de plus belle et de vomir en même temps. « Qu'est-ce qui se passe ? » entre deux reniflements, entre deux respirations intenses, j'essaie de répondre. "Il allait recommencer." au début, ça veut rien dire, et je le répète, "Il allait l'refaire." j'articule mal, je sens mon nez couler et c'est ma manche qui vient essayer d'arrêter le tout. "j'avais tellement peur, j'ai peur.." elle doit rien comprendre, mais en même temps, je ne sais pas si j'ai envie qu'elle comprenne non plus. "Il va le refaire..." j'en suis persuadée, avec tout ce qu'il a dit. Je suis presque sûre de ne plus avoir ma place ici, de toute façon.
 

Tout va très vite, j'ai du mal à comprendre et comment pourrais-je comprendre ? Elle ne m'explique rien, elle a juste l'air d'aller mal, comme si quelque chose d'horrible venait de se passer et ça me fait un peu peur, parce que j'imagine tous les scénarios possibles et inimaginable dans ma tête. "Il allait recommencer." Je la regarde, fronce les sourcils en essayant de comprendre. "Il allait l'refaire." Je secoue la tête, je ne comprends rien et ça me fait presque autant paniquer qu'elle. « Qui allait refaire quoi Regean ? » Elle a l'air complètement déboussolée et je me rends bien compte qu'une de nous deux doit garder son calme. "j'avais tellement peur, j'ai peur..Il va le refaire..." Je secoue la tête à nouveau et je pose ma main sur son bras, « Hey, personne va rien te faire, pas tant que je suis là avec toi d'accord ? » Je la regarde, l'air grave. « T'es en sécurité ici... dis moi ce qui se passe, tu m'inquiètes.. »


 

« Qui allait refaire quoi Regean ? » Je suis tellement paniquée que je me rends à peine compte de ce que je dis, je ne l'entends même pas parler quand sa bouche s'ouvre, je suis juste tellement encore appeurée par tout ce qui vient se passer que je reste enfermée dans cette bulle de terreur sans réussir à m'en sortir. « Hey, personne va rien te faire, pas tant que je suis là avec toi d'accord ? » Je la regarde enfin, prends une respiration et hoche la tête. « T'es en sécurité ici... dis moi ce qui se passe, tu m'inquiètes.. » les mains sont encore tremblantes, "J'ai revu un.. une mauvaise personne." telle une enfant que je suis. Je m'assois sur le canapé, parce que ça me paraît plus facile à dire une fois assise. "J'ai été.. au Summer Camp j'ai été.." les mots ne sortent pas, ou alors difficilement. Un murmure, très bas, "J'ai été violée.." puis enchaîne, "et j'l'ai revu là, à cette soirée." et il a menacé de recommencer, et il m'a dit ô combien j'étais inutile sur cette terre.


 

J'essaie de la calmer, mais elle est dans un état qui est difficile d'être canalisé. Elle parle de quelqu'un qui visiblement, lui aurait fait du mal et qu'elle a vu ce soir. Elle a dit qu'il a faillit recommencer : son discours est confus et je ne comprends pas tout. Mais si elle veut que je comprenne ce qui se passe, si elle a besoin d'aide, je dois connaître toute l'histoire. Du coup, je la rassure, je lui dis qu'elle est en sécurité ici et je lui demande ce qui s'est passé avec ce gars. "J'ai été.. au Summer Camp j'ai été.. J'ai été violée.." J'avale ma salive et instinctivement, je viens attraper sa main pour la serrer fort dans la mienne, "et j'l'ai revu là, à cette soirée." Mes sourcils se froncent, j'essaie de me concentrer pour ne pas avoir la voix tremblante. Je sais que ça ne sert à rien de lui dire que je suis désolée : elle doit le savoir, elle doit détester l'entendre et on sait toutes les deux que ça n'est pas de ma faute. Je l'attire alors contre moi pour la prendre un court instant dans mes bras. « Tu veux dormir ici ce soir ? » Je lui lance un sourire et je passe ma main sur sa joue doucement. J'ai envie de savoir qui est ce mec mais je ne pense pas que ça soit le moment. Elle a plus besoin de réconfort qu'autre chose. « J'peux te faire un chocolat chaud si tu veux ? Un comme tes parents nous faisaient quand je venais passer des vacances chez vous ? » Le fameux chocolat chaud avec de la chantilly et des chamallow dessus.