Dans la nuit une nouvelle patiente était arrivée, une jeune femme de vingt trois, qui venait d'avoir un accident de kart. Visage ensanglanté, totalement inconsciente, elle avait été prise vite fait en urgence. Stabilisée, ça allait mieux pour la jeune femme. Elle avait passé la nuit, la matinée également. Mais aux alentours des onze heures, on avait pu voir quelques médecins se ruer vers sa chambre, interpellés par les bip qui provenaient de l'électrocardioscope, signalant que le coeur ne battait plus. Ca s'agitait autour de la blondinette pour essayer de la réanimer. Les voix ne cessaient de s'élevaient, lui demandant de se battre, de ne pas lâcher prise, mais en vain... Après quelques minutes, c'était fini... Le médecin chargea la secrétaire de prévenir la famille de l'anglaise. Un appel qu'elle avait l'habitude d'effectuer mais qui n'était jamais le même, jamais facile pour autant. C'était un moment pénible de devoir annoncer aux proches d'une personne, qu'ils ne la verront plus, qu'elle est partie, à tout jamais. Cherchant le contact dans son ordinateur, elle composait ainsi le numéro d'Aymalyne Strauss, la secrétaire attendait, au bout du fil, écoutant chaque sonnerie retentirent... Un bruit comme quoi la ligne était décrochée, puis une voix. Féminine. Interrogative, se demandant sûrement qui était ce numéro qu'elle ne reconnaissait pas. Bonjour Mademoiselle Strauss, je suis la secrétaire de l'hôpital de Boston et là déjà, à travers le combiné, la secrétaire sentait l'angoisse qui s'imprégnait de son interlocutrice. Pouvez vous m'accorder quelques minutes s'il vous plaît ? Que faites vous actuellement ? demanda t-elle pour s'assurer que la jeune femme était assise, ou surtout pas au volant d'une voiture ou dans une situation qui risquait de la mettre en danger avec cette annonce... La réponse obtenue, elle avala sa salive et continua : Je vous appel pour vous informer qu'il y a eut des complications avec votre soeur. Elle a dû être réanimé mais... nos médecins n'ont malheureusement rien pu faire... Un silence. Lourd. Pesant. Qui laissait comprendre la suite des paroles de la secrétaire : je suis désolée Mademoiselle, toutes mes condoléances... Elle ne raccrochait pas pour autant.

Elle avait décroché. La sœur de la patiente était en ligne, et pas très disponible. Elle était aussi dans le milieu médicale de ce qu'elle disait et la secrétaire sut à ce moment là, qu'elle allait comprendre. Encore plus vite que les autres personnes. Elle allait reconnaître ce ton de voix, ces questions. Ces mots qui sont adressés pour annoncer des mauvaises nouvelles aux proches. Parce qu'en pédiatrie ça arrivait aussi. La secrétaire annonce donc en douceur, comme elle le peut, la triste nouvelle. Cette perte, déchirante, bouleversante, qu'il faudra affronter. Quant à l'interlocutrice, elle ne répond plus. Silence total. Mademoiselle vous êtes toujours là ? qu'elle s'inquiète, se retrouvant finalement raccrochée au nez. Déposant le téléphone sur son habitacle, tentant de reprendre son travail, c'est quelques minutes plus tard qu'elle voit une jeune femme, une blonde, débarquer. Ignorant totalement que c'est la demoiselle qu'elle a eut au téléphone juste avant, la secrétaire lui adresse un sourire aimable. Puis je vo... vous aider ? Pas le temps de proposer. Elle se retrouve insultée, incendiée. Subjuguée, elle comprend pas, jusqu'à voir ce badge sur la blouse de cette blonde. Strauss. Le même nom de famille que la patiente décédée. Se levant en douceur, la secrétaire est habituée aux proches qui vrillent, qui perdent tout contrôle. Entre ceux qui refusent d'y croire, ceux qui s'effondrent, ceux qui hurlent. Elle en a vu passé de toutes les couleurs. C'est pas possible mademoiselle... Je suis désolée, elle est... partie... Faisant le contour du bureau, tentant de se rapprocher de la blondinette, elle reprend : voulez vous de l'eau ? Que j'appelle quelqu'un ? Qui viendra la chercher, la soutenir peut être. Si seulement elle savait qu'elle parlait à Aymalyne Strauss, et que là elle allait juste subir les foudres de cette nouvelle déchirante.

La secrétaire a beau dire ce qu'elle veut, c'est comme parler à un mur. Elle a beau essayé d'être calme, de prendre la blondinette avec des pincettes, rien n'y fait. Rien ne change à la colère et douleur qu'elle ressent. Elle le voit bien, entre les lignes, même si elle ne dit rien, ne montre rien. Je ne peux pas vous montrer son dossier, ceci est confidentiel. Et même si elle travaille dans cet hôpital, dans ce milieu médical, elle ne peut pas y avoir accès. Elle n'est pas médecin de ce secteur là. Son aile, à elle, c'est la pédiatrie. Alors non, elle n'a pas le droit d'avoir accès au dossier médical. Et cette nouvelle va forcément la rendre encore plus méchante, plus désagréable. Elle le sait la secrétaire, mais pas le choix. Et tant bien même elle prend sur elle, ignorant les remarques de la sœur de la défunte, cette dernière continue. Refusant toute eau, toute aide. Défoulant juste sa rage, ses nerfs, sur cette pauvre secrétaire. Je viens de vous le dire, il m'est impossible de vous donner son dossier, je peux seulement vous dire qu'il y a eut des complications. Son cœur a arrêté de battre, les médecins l'ont emmené en réanimation, et ils ont rien pu faire... Répéter les choses étaient difficiles, mais le meilleur moyen pour qu'elle comprenne. Ils avaient rien pu faire. Ils avaient envoyé plusieurs secousses, à différentes intervalles, injecter même de quoi stimuler son cœur, mais rien. Elle avait baissé les bras. Refusé de se battre plus longtemps. En quelques minutes elle était partie. Pour toujours.