Philippe passa une main dans ses cheveux blonds, l'air brièvement hagard. Il était arrivé sur le campus depuis quelques semaines déjà mais il se perdait encore comme c'était le cas aujourd'hui. Pour sa défense, il avait passé des années sur le même campus et de ce fait, il devait désormais se ré-habituer à un tout nouveau cadre. Bien sûr, ça n'avait rien de dramatique en soit. Il avait tout simplement besoin d'un temps d'adaptation comme cela était toujours le cas en pleine période de changement, mais il se sentait crispé et vaguement à bout de patience. Philippe poussa un gros soupire et fit demi-tour pour regagner le hall d'un pas vif histoire de récupérer le plan qu'on lui avait refilé lors de son inscription à la fac durant l'été, plan dont il essayait sûrement un peu trop vite de se passer par pure fierté. C'était comme souvent plus fort que lui, il ne pouvait s'empêcher de vouloir bruler des étapes et était frustré de se rendre compte qu'il se sur-estimait un peu trop. Philippe déboucha dans le hall et alla chercher son plan, l'air très irrité. Une fois ce dernier en main, il s'appuya contre la portière de son casier, l'air toujours aussi perdu et agacé, le plan ouvert entre ses mains.

La routine revient pour Margot, progressivement. Trois semaines se sont écoulées depuis son retour, et elle reprend doucement ses marques, ses habitudes, chemine tranquillement entre la Lowell House et la Widener Library, pancake dans la bouche, café à la main. Le temps de rendre quelques livres, de finir son café, et la belle repart vers le Yard pour aller poser des affaires dans son casier histoire d'alléger un peu son sac devenu bien trop lourd sous le poids des nouveaux livres qu'elle a été emprunter à la bibliothèque. Voilà ce qui arrive à être trop gourmande en littérature, trop curieuse aussi, mais elle ne serait pas une bonne étudiante en journalisme si elle ne l'était pas. Elle soupire d'aise en sentant la légèreté de son sac en le remettant sur son épaule, et c'est en claquant doucement la porte de son casier qu'elle le remarque. Elle n'est pas comportementalisme, la rouquine, mais elle sait reconnaître quelqu'un de perdu et de visiblement piqué à vif. Bon, il faut dire que le plan d'Harvard qu'il a entre les mains aide un peu, aussi. Doucement, Margot s'approche alors de l'inconnu, et hausse doucement le ton : « Une des plus belles universités du monde, mais aussi une des plus vastes. La légende dit que certains n'ont pas pu trouver leur première salle de cours avant une semaine. » Qu'elle dit le plus sérieusement du monde, avant d'esquisser un petit sourire, penchant la tête dans l'espoir de ne pas embêter le jeune homme. « Nouveau sur le campus? Je ... peux peut-être aider ? » Qu'elle se risque finalement à demander, son regard vert cherchant celui du jeune homme.

Philippe était plongé dans la contemplation du plan du campus quand une voix l'en tira. « Une des plus belles universités du monde, mais aussi une des plus vastes. La légende dit que certains n'ont pas pu trouver leur première salle de cours avant une semaine. » Philippe leva les yeux de son plan pour croiser le regard d'une jeune femme rousse qui, de toute évidence, n'avait pas manqué de remarquer sa détresse passagère. Il lui rendit son sourire en acquiesçant de la tête avant de désigner le plan de cette dernière. « J'ai pas grand mal à croire. » Dit-il simplement. « Nouveau sur le campus? Je ... peux peut-être aider ? » Fierté mal placée oblige, Philippe n'aimait pas franchement accepter l'aide des autres. Il aurait aimé pouvoir esquiver cette proposition d'un geste désinvolte de la main et feindre qu'il s'en sortait très bien, mais tout dans sa posture laissait clairement voir le contraire, alors à quoi bon ? Triturant encore son plan entre ses deux mains, il finit par acquiescer en se parant d'un beau sourire vaguement vaincu et penaud. « Oui, je veux bien, merci. Je m'appelle Philippe au fait » sur ces mots, il lui tendit sa main en guise de salutation avant d'ajouter quelques mots pour justifier son statut d'étudiant perdu sur l'imposant campus d'Harvard. « J'étais à la Sorbonne avant, je viens d'être transféré ici. »

Un avantage à cette année et demie passée à l'étranger, elle est beaucoup moins sauvage, la rouquine, et ça se voit surtout quand elle approche ce parfait inconnu aux allures d'homme parfait. Le genre de gars, en somme, que Margot approche pas en principe, un peu comme Adriel. Si le mec ne s'évertuait pas à l'enquiquiner depuis sa première année ici, jamais elle ne lui aurait adressé la parole, et voilà qu'avec cet étudiant, elle se permet même de blaguer. « J'ai pas grand mal à croire. » Qu'il dit en lui rendant son sourire, avant que la jeune fille ne se risque à lui proposer son aide. Elle vient peut-être de revenir, mais Harvard, elle en connaissait déjà les rues à l'âge de dix ans, un des avantages à vivre tout près d'ici depuis l'enfance. Il sembla néanmoins résister, un bref instant, avant de capituler. « Oui, je veux bien, merci. Je m'appelle Philippe au fait » Margot fait un sourire léger, contente de voir qu'elle ne s'est pas fait jeter, et n'hésite pas bien longtemps à prendre la main du blond dans la sienne. « Margot, enchantée Philippe. »A son nom et son accent, elle croit déceler des origines françaises, ce que le nouvel arrivant ne tarde pas à confirmer. « J'étais à la Sorbonne avant, je viens d'être transféré ici. Hochant la tête, la demoiselle entrepris de reprendre doucement le plan d'Harvard des mains de Philippe pour le replier. « Il me semblait bien que tu avais un accent français. Tu as donc vécu à Paris? Ça doit être magnifique. »» Elle soupire, rêveuse, avant de se reprendre, relevant les yeux vers lui avec un sourire gêné. « Désolé, j'étais censée t'aider, par blablater. Tu cherches à atteindre quel bâtiment ? Et bienvenue à Harvard, du coup. »