La rentrée, ça y'est, t'as pas profité des vacances, à réviser tout l'été, ou à faire la fête, puis les sous sont partis trop vite, t'as pas vraiment fait gaffe à tes dépenses, parce que quand t'es bourrée, t'es toujours extrêmement riche, tu fais pas attention à c'que tu bois, tu prends toujours les cocktails les plus chers, ou les alcools les plus chers. Alors le deuxième mois d'été, t'as fait que bosser, t'as donné des cours privés aux jeunes collégiens avant qu'ils ne reprennent les cours de leur côté, t'as bossé dans une petite supérette du coin, enfin voilà rien de bien palpitant en résumé.

Ah, la rentrée, tous ces étudiants stressés de savoir dans quelle confrérie ils iront, quels cours ils suivront, avec qui ils se retrouveront, puis y'a les petits nouveaux, trop timides pour aller demander des renseignements aux anciens. Tout ça, ça t'fais un peu sourire, t'es passée par là toi aussi, mais t'étais le contraire d'eux, aucunement timide, plus à t'faire remarquer, à être hyper-active, limite chiante. Y'a quelque chose qui a changé pour la rentrée cette année, finalement tu quittes le dortoir des étudiants, pour aller faire une coloc avec ta pote Anna, Adaline et un autre gars, tu sais pas encore de qui il s'agit, mais comme on dit Yolo.

Cette année t'as repris les mêmes cours que les années précédentes, informatique et chimie, et c'matin t'as pas cours, alors t'as décidé de traîner un peu dans les couloirs de la fac, observant les nouvelles têtes qui passent, alors que t'es installée sur les marches.

Lennox aurait aimé dire qu'il était ravi, joyeux, heureux de retourner au campus, mais mentir c'est mal. Il avait encore le mal des vacances le pauvre, et redonnerait sûrement n'importe quoi pour retourner sur Cape Breton, cette île dont il était légèrement tombé amoureux pendant l'été. Et Lennox n'utilisait jamais le mot "amoureux" pour désigner quelconque chose ou personne, alors c'était dire. D'autant plus que son année scolaire s'annonçait rude avec le début de son statut d'interne à l'hôpital de Boston donc autant vous dire qu'il n'était réellement pas enchanté. Quand bien même il aimait son domaine, la médecine et tout ce qui en suivait et voulait absolument suivre les pas de sa mère, il sentait cette année comme une des pires, et ne savait pas s'il était réellement prêt à sauter le cap. Mais le choix ne lui était plus permis à présent, la rentrée était belle et bien présente et le recul en arrière n'était plus possible. Le retour à la réalité était brutale, bien que prévue, et il y a plus d'autres choix que de porter ses couilles - excusez le langage. La semaine prochaine, il commençait à l'hôpital de Boston, il avait encore le temps de se ré-habituer à la vie sur le campus. Il déambulait dans Harvard à l'heure où j'vous parle, après avoir fini ses cours de la matinée et avait son après-midi de libre, comme d'habitude. Enfin, ces après-midis étaient censés être destinés à la révision, mais Lennox se permettait de les passer un jour sur deux, à son rythme, il ne pressait jamais rien et s'en sortait toujours bien. Il avait pour principal but cet après-midi de le passer au loft avec Maxine ou Elias, et était passé devant les marches qui plombaient l'entrée de la fac, et aurait pu très bien passer son chemin aussi vite que dire bonjour si une silhouette désespéramment seule et assise sur ces mêmes marches n'avaient pas attiré son regard. Il la reconnaissait aisément. Aileen. Une fraîche Mather avec qu'il s'entendait plus ou moins auparavant, mais depuis qu'elle était devenue Mather et lui Eliot, le "plus ou moins" penchait plus vers le "moins". Lennox hésita deux secondes avant de venir vers elle et lui lancer une pique, et perdre son temps, mais la tentation était bien trop grande avec elle, seule, sur le sol. « Fais gaffe, à force de traînasser sur le sol, je vais finir par croire que c'est ton milieu d'habitat naturel. » Sa façon de saluer la Mather.

@Aileen S. Walker

Tu t'ennuies, t'as bien envie d'emmerder les petits nouveaux, ceux qui sont tout frais, qui débarquent et qui sont paumés, les titiller un peu, leur faire un peu peur quoi, qu'ils passeront forcément par l'étape du bizutage et qu'ils n'y échapperont pas. T'as déjà leur profils sur ton portable, ouais t'as cette application depuis peu, un peu comme dans le jeu vidéo que t'as kiffé, puis pour toi c'est facile, tu hackes depuis que t'es gamine. Mais chut, ça, les autres sont pas censés le savoir. Tu pianotes sur ton portable, tu fais pas vraiment attention aux anciens qui passent dans le couloir, y'a tellement de monde qu'au final ça t'ennuie de tous les observer, t'irais bien t'en griller une, mais feignasse comme tu es, tu restes sur ces marches.

Puis y'a cette voix que tu connais un peu, ce type, Lennox, tu l'appréciais au début, avant de savoir qu'il entrait à la EH cette année, alors tu sais pas trop comment vous en êtes arrivés à là, à vous envoyer des piques dès que vous vous croisez. C'est devenu votre truc, un jeu qui s'est installé, mais un jeu mauvais. Tu écoutes la pique qu'il te balance, mouais il aurait pu faire mieux en fait, du coup t'es un peu blasée.

"Sérieux, c'est tout c'que tu as ? J'suis un peu déçue j'dois l'avouer." Qu'est ce que c'est ridicule cette éternelle gueguerre entre vos deux confréries, mais toi t'en joues, ouais au final ça t'amuse que Lennox s'en prenne à toi. Mais tu ne vas pas le laisser remporter la première bataille, certainement pas. "Bah alors ? Ils sont où ceux qui font office d'amis ? T'as pas pu t'en racheter cette année ?" tu lui balances, entrant dans la cage aux lions, prête pour le premier round.