Allez Effie, c'pas si grave, c'est pas comme si tu venais de perdre quelqu'un de si proche que ça au final, reprends toi merde, ça fait déjà deux ans qu'il a disparu, parti, remets-toi, deux ans c'est rien... Alors pourquoi est ce que t'as autant mal au coeur quand tu penses à lui ? T'étais quand même pas accro à lui, il était seulement...ton pote d'enfance, ouais, le seul et l'unique, le seul que tu as permis de s'approcher trop de toi. Le seul qui t'as toujours compris, depuis que t'es gamine, mais c'est pas grave, tu vas t'en remettre hein ?
T'as comme un vide dans ton coeur pourtant, tu ne saurais pas expliquer pourquoi, mais c'est comme ça, t'as plus vraiment l'goût de faire quoi que ce soit d'intéressant, tu suis les cours et encore, t'as toujours autant de mal à vraiment te concentrer. C'est long, tu regardes l'heure sur ton portable, encore quelques minutes et c'est la fin des cours, enfin pour toi, cet aprèm t'as pas cours, alors tu vas aller traîner près de ton banc préféré du campus.

Les étudiants quittent l'amphi, tu les suis d'un pas nonchalant, quelques "bye à plus tard" et "on s'voit ce soir à la fête de X !" cet aprèm t'as du bol il fait beau, alors tu comptes bien rester à glander sur le banc, t'en griller une, profiter d'la vie quoi, ouais, mais sans lui. T'es en dehors du bâtiment où t'avais cours, c'est le grand ciel bleu, soleil, tu sors tes lunettes de soleil que tu met sur ton nez avec une certaine flemme, et voilà tu peux te la péter maintenant. Ah le voilà ton banc préféré, tu lâches ton sac de cours qui s'écrase par terre, et tu poses ensuite tes fesses sur le banc, le casque sur les oreilles, ouais ça fait du bien de glander. Sans lui, encore une fois. Encore une croix à mettre sur calendrier.

Mon dieu. Je n'arrivais pas à croire que j'étais de nouveau à Harvard. Je marchais dans les couloirs de cette grande université où j'avais passé déjà tellement de temps. Mais cela faisait deux ans que je n'étais pas revenu ici. Deux putain d'années. Je ne savais pas trop comment réagir, je ne savais pas trop comment me comporter aux milieux de tout ces étudiants. Après tout, cela faisait deux ans que j'étais mort. Deux ans que j'allais de pays en pays, de villes en villes, que je dormais à la belle étoile, dans des hôtels miteux, que je faisais des boulots de merde. Deux ans que je vivais une vie de merde avec le risque de me faire tuer à tout moment. Mais maintenant, c'était terminé. Maintenant, j'étais libre. Je pouvais revenir à ma vie d'avant, je pouvais recommencer mes études, je pouvais retrouver ma soeur, Shae, Leevy et tout les autres. Mais je me demandais comment les retrouvailles allaient avoir lieu. Cela risquait d'être.. complexe. Enfin, pour l'instant je marchais dans l'université. Je sors du bâtiment où j'étais et je commençais à marcher dans l'espèce de parc. Il y avait des bancs et de la verdure partout à Harvard, ça m'avait manqué. Mais je m'arrêtais nette en voyant un visage familier, une petite tête blonde que je connaissais mieux que quiconque. Merde, je savais pas quoi faire. Je soufflais un bon coup et je prenais mon courage à deux mains, m'approchant d'elle. « Effie ? N'hurle pas s'il te plait, je sais que j'suis censé être mort mais.. » Je m'arrêtais. Je ne savais pas quoi dire de plus, je ne savais pas comment elle allait réagir, je ne savais même pas comment justifier tout ça. Mon histoire était dingue, ma vie était dingue. Mais putain, cela faisait un bien fou de voir un visage familier et j'avais juste envie de la serrer très fort contre moi. Mais j'attendais de voir d'abord sa réaction, j'espérais qu'elle allait pas tomber dans les pommes ou quelque chose comme cela.

Ta vie en c'moment c'est de la merde, ouais clairement. T'as plus vraiment le goût de vivre depuis qu'il a disparu, mort qu'ils ont dit... T'as pas voulu y croire, t'as continué de penser qu'il était vivant, que tout ça c'était un mensonge et qu'il reviendrait avec son sourire d'idiot et que ça serait comme avant. Adriel...t'oses pas l'avouer mais il te manque, pas que tu le considérais comme un frère ou quoi, mais ça s'en rapprochait. Le seul pote d'enfance que t'aies jamais eu. Le seul qui a su t'adopter. Ouais ça fait bizarre de te dire ça, t'accordes difficilement ta confiance aux autres mais avec lui c'était pas pareil. Il t'manque. Tu pensais que t'y arriverais sans lui à Harvard mais non. Tu comprends pas pourquoi tu t'sens pas bien, ça fait deux ans depuis quelques jours. T'as encore ce pincement au cœur comme quand il a disparu, t'as envie d'pleurer mais c'est comme si t'avais une rupture de stock de larmes. Tu veux plus le pleurer, c'est pas ça qui le fera revenir.

T'es posée sur ton banc, perdue dans tes pensées quand une voix te fais presque sursauter. Tu la connais cette voix, par cœur même, tu saurais la reconnaître dans un endroit bondé. Et tu deviens pâle quand il se pointe devant toi. Adriel. Ton cœur rate un battement. "Oh putain...que...qu'est ce que tu fous là ? Attends...j'suis en train de rêver c'est ça ? " t'es en train de trembler, c'est bien réel là non ? T'en fais tomber ta clope, qui s'écrase sur le bitume, tu t'redresses à la limite de te casser la gueule, tes jambes te supportent à peine. "Adriel !!" t'as pas la force de lui mettre une claque, t'as juste envie de le prendre dans tes bras. Et tu le sera contre toi, t'as plus envie d'le lâcher. "Idiot...t'étais où merde ?!" et tu sens tes larmes qui coulent sur tes joues, ta vue se brouille presque.

Il fallait reprendre une vie normale. J'avais été mort pendant deux ans et là, je devais retrouver une vie comme avant. Je devais reprendre mes habitudes, recommencer à vivre tout à fait normalement. Comment est-ce que j'étais censé faire ça exactement ? Je ne savais même pas par où commencer. Alors j'avais commencé par retourner à Harvard. Le lieu de ma fausse mort, le lieu où j'ai vécu autant de bons que de mauvais souvenirs. C'était dingue tout ça, clairement. Alors je traversais les couloirs de cette université, légèrement perdu. C'était étrange de revenir ici après tout ce temps. J'avais l'impression d'être de nouveau à ma place, ici, à Harvard. Et je devais avouer que cela faisait un bien fou. Je sortais du bâtiment où j'étais et je marchais à l'extérieur, essayant de réaliser que tout cela était bien fini. Même si c'était.. étrange. Mais je m'arrêtais net quand je reconnaissais ce visage familier assise sur un banc. Effie. Une amie d'enfance. Fuir ou affronter ? J'avais fuis beaucoup trop souvent ses deux dernières années et toute ma vie en fait, alors cette fois, j'affrontais. Je m'approchais d'elle et sortait la technique d'approche la plus pourrie de la planète quand on est censé être mort. Elle se mettais à trembler et je ne savais absolument pas quoi faire, je restais immobile, l'observant. Elle me prenait dans ses bras et je perdais comme un énorme poids. Je la serais aussi fort que je le pouvais contre moi. « Je suis tellement désolé, si tu savais.. » disais-je en la gardant dans mes bras. Cela me faisait tellement bien, j'avais comme l'impression de revivre. « C'est une longue histoire mais tu me connais, tu sais que j'ai le don de réussir à me foutre dans des situations de merde. » lâchais-je avec un léger rire nerveux alors que je relâchais un peu mon étreinte d'elle, l'observant. C'était dingue ce sentiment de bonheur, de bien-être.

Deux ans qu'il était censé avoir disparu, mort, ouais t'y a cru quand il ne s'est plus pointé à vos rendez-vous habituels près de ce banc. Il prenait toujours au sérieux ces moments passés avec toi à cet endroit, c'était votre banc à vous. Tu l'as attendu pendant plusieurs jours, plusieurs semaines, quelques mois... Et tu t'es enfin rendue compte qu'il ne viendrait plus, même si tu espérais au fond qu'il réapparaisse un jour.

Ne plus le voir près de votre banc, ça t'avais fait quelque chose, tes autres amis (pour le peu que tu en avais) se rendaient bien compte que tu n'avais pas le moral, mais Adriel n'avait rien à voir avec eux, il était différent, il te connaissait mieux que quiconque.

Alors le voir là de nouveau, pouvoir le prendre dans tes bras comme avant, ça te faisait clairement un choc, tu n'aurais jamais cru le revoir, tu te demandes même si t'es pas tout simplement en plein mauvais trip. Non tu n'as pas encore fumé de joint aujourd'hui, c'est seulement quand il te serre dans ses bras à son tour que tu sais que c'est vrai. C'est toujours le même parfum qu'il porte, toujours les mêmes bras rassurants.

"C'est pas la peine de t'excuser, j'suis prête à tout te pardonner tellement j'suis heureuse de te revoir..." Il a changé merde, tu le trouves plus séduisant qu'avant, mais y'a aussi son regard qui a changé... "J'te connais que trop bien, si tu veux pas en parler je respecte ça, mais t'es obligé de passer le reste de la journée avec moi."

Je me sentais étrange. Je me sentais bien et mal en même temps. Cette double sensation la plus étrange du monde. Mais bon, ça allait passer, j'allais finir par m'habituer et reprendre une vie normale en oubliant tout ça, non ? Je soupirais, sortant des bâtiments et je marchais dehors, observant un peu tout. Et voilà que je tombais sur Effie, toujours au même endroit, sur notre banc. Je n'en revenais pas, j'avais l'impression de faire un bond dans le passé quand on passait tout notre temps ici dès que l'on avait des pauses tout les deux à fumer et parler de tout et de rien. On se connaissait depuis toujours, on se connaissait par coeur et ça, rien ne pourra jamais l'empêcher. Alors je m'approchais d'elle, heureux de la voir et en même temps effrayé de sa réaction. Mais elle finissait par me prendre dans ses bras et je me sentais tellement mieux, la serrant fort contre moi, m'excusant. Pourtant je ne m'excusais pas facilement mais là, c'était mon erreur. « T'es vraiment la meilleure ! » m'exclamais-je en lui souriant quand elle me disait être prête à me pardonner. Je ne pensais pas que ce serait aussi facile avec tout les autres, mais avec elle, ça l'avait toujours été. On ne pouvait pas vivre l'un sans l'autre, au fond. « Je te promets de te raconter dans quelques jours mais là, je ne suis revenue que depuis quelques heures, tu es la première que je revois et je veux juste profiter de ce moment. » disais-je en lui souriant. Ouais, juste profiter et arrêter de penser à ses deux ans où j'ai galéré, je ne voulais plus penser à cela pour le moment, ça me bouffait déjà assez de l'intérieur.

"La première ? C'est trop d'honneur, sérieux ça fait du bien de te revoir, tu peux pas savoir à quel point j'étais pas bien sans toi..." tu ressens un petit pincement au cœur comme quand il avait disparu, mais là il était de retour, bien vivant en chair et en os. Alors pas question d'le laisser disparaître de nouveau, ou alors si jamais il repart, tu pars avec lui, de toute façon y'a pas grand monde qui t'en empêchera. "C'est moi ou tu as changé ? J'veux dire...t'as pas le même regard qu'avant...sérieux qu'est ce qui t'es arrivé, tu m'connais j'peux pas m'empêcher de m'inquiéter pour les personnes que j'aime..." Tu rougis un peu, tu lui avais encore jamais dit ça, t'es plus du genre à ne rien dire, enfouir tes sentiments, tout ça. Ouais Adriel tu l'aimes, mais pas d'la façon comme quand on aime quelqu'un avec qui on est. Avec lui c'est pas pareil quoi.

Au fond, j'étais surpris de sa réaction. Je m'attendais à ce qu'elle me frappe, qu'elle hurle, qu'elle dise que je n'étais qu'un connard. Et elle en aurait eu le droit. Mais non, elle faisait tout l'inverse et ça me rassurait énormément. « Je suis vraiment heureux de te retrouver. Tout ira bien maintenant, s'il y a bien une chose que je peux te promettre, c'est que je ne recommencerais pas ça une deuxième fois. » disais-je en lui souriant. Je m'asseyais à côté d'elle sur le banc, sur notre banc. Parce qu'on avait passé de très longues heures ici. On pourrait le privatiser juste pour nous en vrai, c'était le notre. J'avais l'impression de faire un bond dans le passé en étant ici, à cet endroit précis, avec elle. Comme si rien n'était jamais arrivé et rien n'avait changé. Même si ça, c'était totalement faux. Et je le savais. « T'es adorable.. Et tu me connais, j'ai merdé. J'ai fait une connerie qui aurait pu me coûter la vie alors je devais me faire passer pour mort le temps de tout régler. Je ne pensais pas que cela prendrait deux ans mais.. Voilà, j'ai payé mes dettes. » répondais-je en haussant les épaules, d'un air totalement détaché.

"Attends j'espère bien, j'me suis sentie abandonnée, j'avais besoin d'ma dose d'Adriel, tu m'connais, t'es le seul que j'ai laissé m'approcher quand on était plus jeunes..." T'as pas aimé de t'être sentie abandonnée, c'était pas pareil sans lui et ça s'est clairement ressenti, autour de toi les autres ils s'éloignaient parce que t'étais devenue invivable, une vraie peste, et t'avais clairement fait aucun effort pour être plus sympa. T'aurais pu en faire des efforts, sauf que c'était quelque chose que tu n'arrivais pas à faire toute seule, c'était Adriel en général qui t'remontais les bretelles quand tu allais trop loin dans tes paroles, c'était lui ton pilier à Harvard. Et maintenant il est là, t'as pas l'intention d'le laisser filer, vous avez tellement de temps à rattraper. Vous êtes là tous les deux de nouveau assis sur votre banc, tu ne pensais pas qu'un jour ça se referait alors t'as le smile jusqu'aux oreilles, c'est un truc qu'on ne t'enlèvera plus, pas question.

"Ouais j'te connais, mais t'aurais pu m'en parler, on est potes depuis qu'on est gosses, jamais je ne t'aurais laissé galérer tout seul, tu m'connais... Mais le principal c'est que t'es de retour, t'as plus intérêt à t'barrer comme ça sans prévenir...tu m'as manqué idiot." Tu lui met un coup d'épaule puis passe une main dans ses cheveux, ça aussi ça t'as manqué.