sourire qui accapare mes lippes tout au long des explications. le visage bien trop souvent tourné vers toi. ignorant délibérément le responsable du jet-ski. j'pensais vraiment pas que tu viendrais jusqu'ici. jusqu'en floride. et au fond de moi, j'ai envie de penser que tu l'as fait en partie pour moi. pour être avec moi. regard attendri posé sur tes bouclettes. n'obtenant aucun répit, bousculées par ce vent impétueux. mise en garde à ce sujet. on était supposés ne pas trop s'éloigner. rester à proximité de cette surveillance indésirée. c'était pas dans mes projets. j'voulais juste fuir. avec toi. échapper à cette routine pour reprendre cet air respirable et bienveillant que tu m'octroies à chaque fois que t'es dans les parages. je m'y suis habituée. à ta gentillesse. à ta douceur. j'suis incapable de m'en passer. et ça me fait peur, honnêtement. j'sais que ce sera pas éternel. que tu finiras par t'en lasser. de cette âme déplorable qui essaie tant bien que mal de se lier à la tienne. les explications enfin terminées, j'me jette la première sur l'engin. pour avoir le contrôle. et décider de notre destin. — oublie pas si tu tombes à l'eau, tu devras faire un truc pour moi je t'annonce, attendant impatiemment que tu me rejoignes. jauge d'essence suffisante pour l'après-midi. ne désirant pas revivre deux fois la même expérience que la dernière fois. m'étant retrouvée coincée au beau milieu de l'océan avec deux inconnus. surtout que détail qui avait son importance. j'avais menti. j'ne sais pas nager. mais c'est qu'un détail n'est-ce pas ?

Moi j’veux tester, tout, n’importe quoi. J’sais que j’suis en pause de tout un tas de trucs qui m’faisaient planer, j’ai plus de solutions toutes faites, au fonds de mes poches. Alors j’les invente encore davantage, j’prends le planning des vacances et je coche tout, même ce qui a l’air chiant. Quand c’est ennuyeux, j’prends 3-4 cocktails avant. Quand c’est comme ça, quand c’est avec toi, n’importe où, j’ai besoin de rien d’autre que ta présence. T’as déjà dû faire ça plein de fois, mais moi, c’est ma première. Et, j’ai plus beaucoup de premières fois, dans ma vie décousue. Alors j’ai ce sourire d’idiot heureux, pendant que le mec parle et que personne écoute ; j’m’auto persuade que tu gères, et j’trouve que te lancer des regards dès qu’il essaye de nous expliquer des trucs, c’est bien plus palpitant. Deux gosses dissipés. Il avorte le blabla. Ou peut-être a-t-il déjà tout déblatéré, aucune idée j’ai rien écouté j’vous dis. C’est encore plus facile ici, d’oublier qu’il faut être un adulte. Moi tout ce que j’ai envie, c’est d’allumer ce truc et de me barrer avec toi, loin du mec ultra chiant qui parle sécurité. La sécurité, c’est pour ceux qui ont peur de vivre. Et nous on a pas peur, on s’lance droit dans la gueule du loup ; surtout quand le loup te ressemble. Imprudent avec tout, surtout quand l’âme est si belle. “Ca tombe bien, j’ai pas du tout prévu de tomber.” Réplique balancée avec un rictus amusé, un brin effronté. Tu prends les devants et j’crois que ça m’arrange, j’sais d’avance que la conduite c’est pas pour moi. Mon corps qui s’colle au tien ; ça c’est pour moi. Mes bras te ceinturent, et j’viens souffler à ton oreille - que mes boucles viennent déjà chatouiller : “Ca va être compliqué de tomber sans t’emmener avec moi.” On chutera ensemble, ou pas du tout. “Y a quoi d’prévu, si on perd tous les deux ?” Dans les méandres, je t’entrainerai. Alors que déjà, le bruit du moteur annonce le début de cette nouvelle aventure.

ça a toujours été facile avec toi. de se laisser aller. de se laisser porter par ton sourire contagieux. t'as ce don horace. de me faire rêver. de me faire espérer. qu'un avenir m'attend. voile qui se disperse dès que t'es présent. je te le dis pas assez peut-être. ou peut-être que tu le sauras jamais. mais t'es devenu une raison pour laquelle j'continue de respirer. lancés à pleine vitesse, j'sens tes mains se refermer autour de ma taille. et ça me fait sourire. bêtement. frisson qui m'échappe quand tu viens murmurer à mon oreille. par l'effet que tu me procures. tu triches. — tu feras un effort. j'ai pas prévu de toucher à mon brushing. et pour te défier, j'accélère encore plus. sans penser aux conséquences. on s'en fiche, toi et moi. on est de vrais casse-cou. des gamins qui s'éveillent pour des choses futiles. j'le suis devenue depuis que je t'ai rencontré en réalité. danger ignoré. volontairement. — j'suppose qu'on aura chacun un gage. ou alors c'est celui qui cause la chute de l'autre qui sera considéré comme perdant. j'aimerais pouvoir tourner mon visage dans ta direction. plonger un regard sournois dans tes opales nébuleuses. ce besoin d'avoir un contact prolongé. alors j'libère ma main droite pour attraper la tienne. la porter à mes lèvres. quelques secondes. pour te rappeler notre dépendance mutuelle. l'engin qui commence à dévier de sa trajectoire. sans que je m'en rende compte. dans quelques secondes, on sombrera. ensemble.  

J’ai pas écouté, j’écoute jamais rien, t’façon. Les règles, de manière générale. Celles concernant cet engin de l’enfer, et celles concernant les relations. Les règles qui font qu’on survit dans un monde où tout doit rentrer dans une case. J’étouffe dès qu’on tente de me capturer. J’étouffe, à peine je croise une fenêtre qui s’ferme. J’étouffe, si on m’lie les poignets et que j’peux pas m’échapper dans cette étendue bleue, mes bras refermés autour de toi. J’étouffe, si tu m’dis qu’on peut pas faire tout c’qui traverse nos esprits flingués. Que j’ai pas le droit de souffler dans ta nuque, d’en avoir plus grand chose à foutre, un instant, des secousses du jet ski, de combien on s’était éloignés de la rive, et surtout, d’à quel point on sait pas ce qu’on fait. Pour l’instant, là, tout ce qui m’importe, c’est d’répliquer avec un rictus amusé : “Moi j’ai le droit, alors ?” De toucher à ton brushing, de lâcher un peu ta peau pour capter une de tes mèches que j’enroule autour de mon doigt, le tout dans un geste maîtrisé ; jusqu’à ton accélération qui m’fait marrer. Qui m’fait surtout basculer un peu en arrière, mes mains qui reviennent rapidement à leur place, me cramponnant à toi. Y a un juron qui passe au milieu du rire, et j’plaque rageusement un baiser dans ta nuque. “Fait moi tomber et tu verras.” Sur les fils, je suis doué, funambule adroit. Sauf que l’attention, elle, saute dès que tu provoques, dès que tu respires, j’en perds pas mal de capacités. J’sais pas gérer deux choses à la fois. Et, là, toute mon attention est sur mes phalanges que j’fais glisser sur ta bouche, le métal de mes bagues accroche l’inférieure, à défaut de mes dents. Métronome animé, n’saurait alimenter les nerfs et l’instinct de survie. Préfère l’envie, les doigts sur ta mâchoire qui la dévie pour capter tes lèvres ; dévorer avant de sombrer. Quelques secondes ? Je précipite le décompte.