En début d'année, il y a toujours plein de soirée. Comme si y en avait pas assez en été. Fêter le début des cours, intégrer les nouveaux aux confréries, fêter les anniversaire qu'on a loupé, toute excuse est bonne à prendre. Celle ci, je sais pas trop ce que c'est, je reconnais. L'un des trois, de toute façon, ça change rien. De l'alcool, de la nourriture, un toit sur la tête, de la bonne musique et surtout, des belles personnes. La soirée avance, milieu de soirée, j'ai un verre à la main, plusieurs dans le corps, posée sur le plan de travail, je discute avec un gars. Il est beau, il me plaît, et je me vois bien le ramener ce soir, ou qu'il me ramène, je suis pas difficile. Je joue le grand jeu, je rigole à des vannes à peine drôle, je passe mes cheveux derrière mes oreilles de temps en temps, je le regarde en me pinçant la lèvre, et je comprends toujours pas pourquoi ses lèvres sont pas sur les miennes. Une chose est sûre, ce soir, je termine avec lui.

fauve solitaire au milieu du troupeau festif. masque d'indifférence posté sur ses traits froids, contraste scindant l'effervescence de la soirée. spectre invisible, mais bien présent. iris noires percent la foule comme des projecteurs de vérité, s'immiscer dans la fosse pour désamorcer les réseaux, récupérer les futurs clients potentiels. à maudire le boss de l'avoir refourgué temporairement chez les marionnettistes, la faute d'avoir laissé baver les phalanges sur trop de missions. note dissonante dans la débauche étudiante, absorbe les secrets sous les rires, scrute les narines qui démangent, les pilules sous la manche. à presque effleurer le butin quand ta silhouette se dessine au comptoir. witchy cressi. sourire amusé, à t'regarder jouer les poupées sous les yeux brillants d'ton cavalier. distraction tentante; vos fêtes sont à chier. m'approcher doucement, retenir le rire quand j'te vois faussement glousser à ses blagues minables. menteuse. un bras pour séparer vos corps qui s'appellent, paume s'écrase sèchement contre la marbre du comptoir. billes de charbon scrutent les tiennes, brillent déjà de nos enfantillages passés. - tu d'vais pas être chez ta sœur ? volte face vers ta proie du soir, déterminé à la voir décamper. - qu'est-ce que tu fous avec ma meuf ? danse cressi, danse sur mes mensonges.

La surprise se lit sur mon visage quand je te vois arriver, toi et tes grands airs. A croire que ma soirée vient de prendre un tout autre tournant. Est-ce par jalousie, ta volonté à ce que je rentre ce soir ? Ou est-ce par tranquillité ? Ne pas m'entendre gémir sous ses reins pendant que t'essai de dormir ? Mon plan était clairement tracé et je voulais l'emmener. Lui. Regarde le, lui et ses mèches rebelles, lui et ses cheveux blonds, sa peau clair. On dirait un Justin Timberlake version Harvard. Il te plaît pas ? - tu d'vais pas être chez ta sœur ? vu le ton de la voix, je prends ça pour un non. Je me pince les lèvres, hausse les épaules. Tu te tournes vers Justin, - qu'est-ce que tu fous avec ma meuf ? les sourcils se haussent. Oh, si tu veux jouer, jouons, mais pas sûre que t'aimes la danse. Moooh bébé j'voulais te faire la surprise ! que je dis, glissant une main sur son torse, rapprochant mon corps du tiens. On parlait justement de... tu sais... me pince les lèvres, faussement gênée ; quand tu m'a dis que tu voulais qu'on essai à trois... et que tu m'as décris ton genre... tu le trouves pas parfait ? On dirait que ton partenaire idéal est devenu réalité ! jusqu'où tu vas, avec ça, Lorcan ? Parce que moi je peux aller loin, très très loin. Je voulais te faire la surprise mais à croire que t'es partout. Partout sur mon chemin, surtout.

dérouler le fil des histoires qu'on aimait s'raconter avant de fouler le sol du michigan, vestiges des années oubliées, encore libres d'être qui on voulait, à s'inventer, être n'importe qui derrière le comptoir, rarement ceux qu'on était vraiment. plus facile. m i r a g e. mes doigts arrachent ton verre des tiens, pour y enfermer l'sourire mesquin qui menace de s'y dessiner. le descendre d'une traite. comme ton copain. tricheuse qui voudrait m'faire tomber dans son piège. œil noir qui scrute l'étranger, visage qui penche, vient frôler mon épaule comme pour découvrir la vérité. - on avait parlé d'une jolie blonde, c'est vrai que c'est à s'y méprendre.. déjà oublié. lui et ses espoirs avortés, pion écarté d'la partie. le verre qui vient s'échouer sur le comptoir, lippes qui viennent murmurer à ton oreille feintent la discrétion. - mais j'crois que c'est un mec bébé.. moue factice des embarrassés, mains qui s'aventurent entre tes reins, te poussent un peu plus vers ta cible déjà refroidie. - j'peux toujours te laisser vérifier.. mais oublie pas d'lui parler d'ta p'tite infection. le médecin nous a bien dit que c'était contagieux.  sourire forcé, le bras se tend pour commander un autre verre.