retour au bercail forcé, le début de ta nouvelle vie, la fin de tes études désormais ; passée interne à l’hôpital pour mener à bien te dernières années afin de pouvoir ensuite te spécialiser. le summer camp derrière vous, c’est aussi le moment pour toi de te retrouver ton double, theo. trop de temps passé un peu trop éloignés alors même que vous vous êtes vus un nombre incalculable de fois durant l’été, c’en est pas moins différent qu’en habitant ensemble ici, à boston. un texto envoyé par ses soins pour te signifier qu’il vient te chercher, ton sale caractère toujours au goût du jour, tu t’es pourtant apprêtée sans trop savoir où il compte t’emmener. dans votre appartement, t’es allée t’installer dans le canapé pour l’attendre sans grande patience, à l’affût du moindre bruit dans l’entrée.

ce soir, t’as misé sur une robe noire moulante, certainement trop courte pour certains, ceux-là mêmes qui s’affoleraient à te voir ainsi vêtue. t’as aucune idée de ce que theo compte faire avec toi, d’où il va t’emmener, de ce qu’il attend en te cherchant ici ; mais tu finis toujours par te plier en dix pour lui. parce que theo, il a une place qu’aucun autre ne pourra jamais avoir dans ta vie ; au-dessus de tous ceux qui ont tenté d’y mettre les pieds et de loin. sa voix s’élève et tu roules des yeux en entendant le surnom affreux qu’il te balance. « princesse ? tu m’prends pour l’une de tes putes ? » t’es une reine, pas moins que ça ; et t’as besoin de personne pour le savoir. mais te reléguer au rang de princesse, ça passe pas. tu te redresses en l’observant de la tête aux pieds, tes billes s’arrêtant finalement sur le casque. « t’aurais pu m’prévenir. » t’aurais évité la robe. t’aurais probablement misé sur un pantalon enduit, un truc suffisamment sexy pour lui et pour les autres, pour attiser sa jalousie, pour le voir s’enrager face à leurs regards insistants. son corps se presse contre le tien et t’es incapable de le repousser ; parce que c’est plus fort que toi, que t’en redemandes à chaque fois, que t’es droguée à ses lèvres, à son corps, à chaque partie de lui. sans aucun doute la raison pour laquelle t’as toujours fini dans ses bras. « j’espère qu’t’es prêt à c’que les mecs viennent à moi. » le sourire narquois sur les pulpeuses, sa main sur tes fesses que tu notes même pas tant l’habitude est installée, enroulant tes doigts autour de la poignée de la porte pour l’enclencher et t’en extirper en direction de sa moto.

si vous avez arrêté de vivre ensemble y a un an et demi, si t’as décidé d’arrêter tout ça quand tu sortais encore avec marlon, t’avais toutes les raisons du monde ; parce que tu voulais te tenir correctement, que tu voulais être sérieuse dans cette relation qui avait fini par devenir plus importante que les autres. pourtant, ça t’a pas empêchée de fauter ; une salle à l’hôpital où vous travailliez tous les deux, une nuit de garde, personne à l’horizon. aucun regret pourtant, vérité balancée au visage de marlon y a quelques mois de ça, après lui avoir annoncé ta grossesse pour le voir s’enjouer avant de se mettre à chialer sous ton regard de sorcière dès que tu lui as avoué que tu venais tout juste d’avorter. t’as aucune idée de qui il pouvait bien être, marlon ou theo, theo ou marlon. pas un autre, tu le sais. mais tu le sauras jamais. et t’es bien contente comme ça. pour autant, depuis cet été, t’as décidé de te réinstaller avec lui, attirée à jamais dans ses filets. « ferme-la. » t’as horreur qu’il mette le doigt sur cette jalousie inassumée ; définitivement pas prête à l’avouer. vos corps comme des aimants, de ses lèvres tu te délectes avant de le piquer à ton tour sur sa jalousie. « d’tous ceux qui s’foutront d’me voir avec toi. » de tous ceux qui viendront te voir alors même qu’il sera juste à côté, de ceux qui te glisseront leur numéro dans la main, de ceux qui trouveront n’importe quelle astuce pour t’aborder. ton sac attrapé, tu lui emboîtes le pas jusqu’à monter sur sa moto, les bras enroulés autour de sa taille pour te tenir. le casque par ses soins retiré, t’esquisses un sourire à son idée, incapable pourtant de pas le piquer. « c’serait dommage qu’un autre l’fasse à ta place. » le jeu est dangereux, aussi bien pour lui que pour toi, tu le sais ; pourtant, y a qu’avec lui que t’as envie de finir la soirée. mais t’as envie de l’énerver, de le rendre dingue, qu’il en puisse plus.

t’es une sorcière, anja ; des plus grandes traitresses, de celles qui plantent mille couteaux dans le même dos avec le sourire. toujours cette volonté d’arriver à tes fins et d’obtenir ce qui te convient, qu’importe combien le monde autour pourrait s’en retrouver blessé ; y a que toi qui t’importes – pratiquement du moins. a moto jusqu’à la destination, c’est theo qui a les cartes en main ce soir ; et tu te laisses porter parce que c’est certainement l’un des seuls hommes en qui tu peux bien avoir confiance. pourtant, une fois sur place, tu peux pas t’empêcher de le faire bouillonner intérieurement en le piquant une fois de plus ; jalousie réciproque mais jamais assumée, vous avez ce jeu entre vous et vous finirez un jour par tout cramer. « fais. » fais-le, theo, je t’en prie. pas un mot de plus ; le ton est sec, le regard est froid, l’attitude est toujours aussi hautaine. et tu la regardes avec dédain, les billes qui pourraient instantanément l’envoyer en enfer, dans ton royaume à toi, si seulement tu le voulais. le sourire narquois qui se glisse sur tes lippes lorsqu’il s’approche d’elle pour lui signifier que vous n’êtes pas ensemble. t’observes ton meilleur ami dès qu’il se tourne vers toi, visiblement fier de ce qu’il vient de faire. « il est libre c’soir aussi, j’vous file l’adresse. » tu te feras un plaisir de l’accueillir ; mais tu promets pas qu’elle ressorte de chez vous un jour ou, en tout cas, pas en un seul morceau. la serveuse bousculée d’un coup d’épaule qui la fait flancher tandis que tu bouges pas d’un centimètre, ta silhouette qui se retrouve bien vite installée sur la chaise. pas d’excuse, aucune ; autant qu’elle sache ce qui l’attend avec toi ce soir.