C’est la dernière journée à cet hôtel du tonnerre. Ce soir, tu seras sûrement dans le bus qui vous ramènera vers Harvard. Ce week-end t’a clairement fait du bien, il t’a permis de respirer un autre air, moins pollué. Il t’a aussi permis de rencontrer des personnes que tu as probablement croisées dans un couloir de la faculté. C’était au top. T’as pu skier, chose que tu n’avais pas faite depuis que tu as quitté ta France pour les États-Unis. Les montagnes de ton pays te manquent, tout comme son littoral où tu as pu avoir tes premiers émois. Il faudrait que tu y retournes, mais qui dit voyage vers l’hexagone, dit retour vers ta mère. Tu pourrais aussi louer un petit appartement et ne rien lui dire. La capitale te manque, lieu de ta naissance. C’est à réfléchir. Peut-être cet été, ou au milieu du Spring Break. Les jambes fébriles après la recherche d’objet, tu rends ton snow-board à la boutique et tu remontes dans ta chambre. Le tour était dément. Tu t’es quand même mangé une branche en pleine poire. Tu gardes d’ailleurs une griffure sous l’oeil droit. La gifle de la nature. Elle t’a bien eu. Passant la baie vitrée, tu fumes une cigarette dans le froid et il te vient l’idée du siècle, un instant au sauna. C’est tout ce dont tu as besoin. Ça va dénouer tes muscles et calmer le flot de tes pensées. Dégagée de ta lourde tenue de ski, tu files vers l’étage inférieur où se trouve le coin spa. L’oreille qui traîne, t’entend qu’il faut une réservation pour se faufiler dans le sauna. Oh non, tu ne feras pas demi-tour, hors de question. T’accroupissant sous le comptoir, tu suis le panneau menant au cube de chaleur et pénètres à l’intérieur entourée de ta serviette. Un nuage de vapeur te barre la vue. T’aperçois une vague silhouette dans le fond. La voix s’élève. C’est un homme. Tu t’éclaircis alors la gorge pour répondre « La dame de l’accueil m’a dit qu’il y avait de la place. Je suis désolée si je brise votre moment de solitude » La vue toujours trouble, tu évolues au milieu des planches bouillantes et tu t’assois à deux mètres du jeune homme qui t’a interpellé. « Je vais me permettre de te tutoyer, t’es un étudiant d’Harvard ? Je crois qu’on a dû privatiser l’hôtel tellement on est beaucoup. » La sueur va pas tarder, tu respires du feu. Dragon Archambault. « Dis moi que je ne t'ai pas dérangé en train de faire des cochonneries, je peux partir si tu veux » @Rainier de Danemark

Ok, t’as triché. T’es pas la bienvenue dans cette pièce étouffante. Le jeune homme semble ne pas apprécier ton débarquement. Il aurait pu somnoler qu’il n’aurait pas remarqué ton arrivée, mais voilà, il est bel et bien conscient et il ronchonne. Qu’il ne dise pas le contraire, t’entends bien qu’il n’est pas ravi de ton arrivée. Tu le distingues tout juste de ta position. Il est pas mal, il a tout ce qu’il faut où il faut, mais t’es pas là pour draguer. Tu veux simplement profiter de ce week-end et fermer les yeux. Mais c’est impossible. Il t’a interpellé et t’as tué son instant de solitude. Tu dois lui faire la conversation et t’es pas mécontente non plus, t’aimes bien te faire de nouvelles connaissances. Peut-être qu’il deviendra un bon ami ou peut-être qu’il te chassera tel que les gens le faisaient autrefois avec les « sorcières ». « Oh un Adams, je le suis aussi, mais je te reconnais pas » Bien que tu portes des lunettes lorsque tu travailles, tu ne détectes pas une familiarité en ce jeune homme. Tu ne l’as effectivement jamais croisé sur le campus, il aura fallu que tu viennes jusqu’ici pour faire sa connaissance. Oops. Il te tombe dessus. Enfin, pas au sens propre, mais au figuré. Il sait que t’as pas respecté la règle. T’es déjà rouge comme une pivoine, mais là, ça empire de ouf. Il faut que tu déclines ton identité comme s’il s’agissait de la police. C’est un peu l’effet qu’il te fait. Il te casse en une fraction d’seconde pendant que tu fonds comme un boule de glace au four. « Hey, toutes mes excuses, ne t’énerve pas » Tu te sens mal à l’aise maintenant. Il te fait même peur. T’es plus du tout sereine. Si ça se trouve, c’est un psychopathe qui s’fait passer pour un étudiant. Mais alors qu’est-ce qu’il ferait ici ? Il attendait qu’une nouille comme toi fasse son entrée ? Il a planqué un couteau sous sa serviette ? « Je m’appelle Margault Archambault. Je suis ni plus ni moins qu’une idiote qui n’a pas eu le temps de réserver son créneau. J’avais besoin de cet instant rien que pour moi, parce que d’habitude, je cours partout en permanence, je voulais juste faire une pause » T’es limite en train de chialer. Non, mais, tu vas pas partir en sanglots parce qu’il t’a affiché. C’est rien du tout, ressaisis toi. « Je suis encore désolée, je vais remonter dans ma chambre et te laisser tranquille » @Rainier de Danemark

Tu fais ton mea culpa. Tu lui avoues que tu as triché. La vérité sort de ta bouche. C’est incontrôlable. Tu ne sais pas mentir. Tes lèvres tremblent. L’émotion s’enroule autour de tes cordes vocales. Il est mécontent. Il ne perçoit pas ta présence comme agréable. Il voulait se retrouver seul et tu viens tout juste de ruiner son moment. Ton identité franchit la barrière de tes lippes. Tu accouches de sincérité et tu l’entends subitement répéter ton prénom. Il plante totalement. Il bégaie et révèle son prénom. Il y en a pas cent mille des Rainier. C’est le type avec qui tu as accroché sur Meets. Le prince d’un pays nordique. Du Danemark, ou un truc pas loin. Ce sont les Adams qui vous ont réuni. Tu étais si impatiente de le rencontrer, mais pas forcément dans une tenue aussi légère. Il est mal à l’aise. Il panique dans son coin et ça te fait rire. Il n’a pas à avoir honte, il est plutôt bien roulé. Et bien que tu sois intéressé par sa personne, tu ne bondiras pas sur lui. Il a une petite-amie, tu peux pas le dérouter de son chemin. Contente-toi d’être amicale Margault. Ne le soumet pas à la tentation. « Tu n’as pas à te vêtir pour moi, j’en ai déjà vu des hommes nus et toi, c’est pas le cas. T’es une espèce de fajita humaine avec ta serviette » Tu pouffes de rire et croises les jambes alors que le feu règne toujours dans ce cube de bois. T’arrives pas encore à y croire, tu partages un sauna avec l’héritier au trône d’une monarchie. C’est comme ça que ça s’appelle non ? T’y connais rien. T’as pas la culture de cet homme. Rainier est un étudiant qui croule sous les connaissances. Lui parler par le biais d’un téléphone était impressionnant, l’avoir à côté, c’est encore pire. Rainier a plus vécu qu’un octogénaire. Il est renversant. « Comment tu vas cher prince ? Tu ne profites pas des pistes ? En tout cas, j’attendais qu’on se rencontre avec impatience » Tes mains sur tes genoux, tu le regardes intensément, mais il ne doit pas remarquer à quel point tu es subjuguée par sa personne. Casse-cou, tu te lèves et te rapproches de lui afin de capter ses prunelles. Tu lui taperais bien la bise, mais en sachant qu’il n’est pas le plus fan du contact physique, tu t’abstiens « Ne t’enfuis pas, je ne te toucherai pas, promis. T’es pas heureux de me voir en vrai ? On avait bien discuté tous les deux … »  @Rainier de Danemark