T’es franchement pas drôle. Que je souffle en riant rapidement, ton index contre mes lèvres. Je le mords rapidement histoire de t’enquiquiner jusqu’au bout. Tout ça, je le fais exprès pour t’ennuyer et je sais que t’en es conscient. Se pousser, c’est là tout le but de la vie non. C’est dommage en tout cas parce que je suis sûre que ton frère pourrait me reboiter après m’avoir déboité comme il faut. Et rien que d’y penser, je ris toute seule. Intenable, voilà ce que je suis. Les sujets changent aussi vite que deux professionnels valsent d’un bout à l’autre de la salle et mon sourire disparaît quand tu parles de te transformer en Roméo. Je suis ta seule Juliette, capiche ? C’est probablement le seul mot italien que je connais et il colle parfaitement à la situation. Avoues le Gaspard, je fais rêver. C’est la soirée de l’année où je mets tous mes atouts sur le tapis et le regard que je te lance veut en dire beaucoup sur l’importance de ce compliment. Un accent à en faire pâlir n’importe quel américain ! Faut dire que j’ai la pratique du Français grâce à mon petit mari. Les gens sont souvent choqués quand je leur dis que je m’appelle Desrosiers mais ne parlent pas français. Il faut dire qu’une rose comme moi, mariée, ça parait presque fou. C’est un truc d’un autre siècle ça mais aucun - pas même toi - ne connaît l’origine de cette union. Le coup de foudre ou plutôt le coup de la carte verte. Je te regarde et hausse les épaules. Se contrôler ? Comment peut-il se contrôler dans le monde dans lequel nous évoluons ? Le monde de la nuit, ce n’est pas facile pour tout le monde. Je lui souris et souffle J’en sais trop rien, je vis pas avec lui et il a un chaperon. Je finis mon cocktail et descends du bureau. Ce n’est pas moi qui pourrait dire l’étendue des dégâts. On se voit souvent, on discute souvent mais pas de ces choses. Un rail de temps en temps, rien de bien grave. J’te laisserai juger l'étendue de l’addiction avec son Roméo. Légèrement désintéressée de la question. Je fais assez confiance à mon cher et tendre mari pour se contrôler et ne pas aller trop loin. Surtout avec son dragon. Mais l’engueule pas quand on arrive, ça va foutre une salle ambiance. Et on y va pour faire la fête. Le manteau passé, j’écrase mes lèvres sur ta joue et dis Tu me promets ? On va danser, on va boire, on va se fariner la gueule et demain, au réveil, on sera les plus heureux parce que c’est nous et que je t’ai enfin retrouvé.

Je n’ai jamais trop été du genre possessive dans ma vie mais quand il s’agit de toi, j’aime être le centre de ton monde. Je ne sais pas expliquer pourquoi - surtout qu’on avait pour habitude de se tirer dans les pattes quand tu venais à Los Angeles - mais j’aime cela, encore plus quand tu me suis dans cette folie. C’est agréable et apaisant, relaxant même. Je sais que je peux te faire confiance et que ce soir, je n’aurais pas à m’inquiéter que tu me quittes pour aller papillonner à droite ou à gauche. Je suis la Reine de la ruche et tu es mon plus fidèle ouvrier. J’éviterai de te couper la tête quand il sera l’heure de faire du tri là-dedans. Mais nous n’y sommes pas encore. Je me laisse encore le temps de régner et il y a de la place pour tout le monde, si ce n’est pas merveilleux. Comme un grand… Tu lui fais un peu trop confiance ! Que je souffle en haussant les épaules. Je ne sais pas pourquoi j’ai ce sentiment que Raphaël ne va pas tarder à me demander de divorcer. Ou peut-être pas vu sa situation avec la poudreuse. C’est difficile d’arrêter quelque chose comme ça, c’est une habitude en plus d’une addiction et tant qu’il travaillera dans le monde de la nuit, je pense qu’il rechutera perpétuellement. Ce n’est pas que je n’ai pas confiance en lui c’est juste que c’est déjà dur d’arrêter mais quand on voit le monde - notre monde - le faire sans arrêt, c’est presque inhumain. Sois pas trop méchant quand même, le jour où vous discuterez. Que je souffle comme pour défendre celui dont je porte le nom. Je pense que je n’ai pas aidé, que ton départ n’a pas aidé et puis il y a la réalité de la vie. Avait-il vraiment envie d’arrêter en premier lieu ? Je ne peux pas parler pour lui - et je dois avouer que ces derniers mois, je n’ai pas trop cherché à comprendre - mais j’en doute. L’overdose - aussi terrible fut-elle - ne lui a pas donné envie d’arrêter. C’est triste mais… C’est ainsi. Si, beaucoup. Que je souffle en finissant mon verre avant de quitter mon bureau main dans la main avec toi. On pourrait vraiment nous croire en couple mais nous savons tous les deux que c’est quelque chose qui n’arrivera tout simplement jamais. Le trajet jusqu’au Lux est rapide, simple et efficace. Raphaël est rapidement de la partie avec nous pour faire la fête toute la nuit. Et quelle fête. Ou quelle nuit; je ne saurais dire.

rp terminé.