in oculis, veritas @Scott Guerin —  Julia, tu devrais tout arrêter. Tu devrais tout stopper. Tu devrais le laisser disparaître de tes opales. Tu devrais ne conserver que le souvenir de votre baiser. T'en contenter pour le reste de ta vie. Tu devrais faire ce que tu fais tout le temps lorsque la situation te file entre les doigts. Ne plus donner signe de vie. C'est ce que tu devrais faire avant que la toile ne se referme sur ton corps. T'as pas le droit de ressentir tout ça. T'entends. Tu n'as pas le droit Julia. Reste comme tu es, cette reine de glace qui n'éprouve aucune émotion. Scott. C'est le danger. Ce sont des années de résistances réduitent à néant. Ta raison te crie de partir et pourtant, tu fais toujours l'inverse. Tu l'attires dans ta toile, pour le plaisir de sentir la fermeté et la chaleur de son corps. Mine de rien, le froid te mord quand même la peau. Tu soupires, fascinée par la façon dont le jeu d’ombre et de lumière fait ressortir les traits fins et harmonieux du garçon. Agacée, parce qu'il t'attire. Il te choppe le poignet, stoppe tes pulsions. Déballe tes envies. Les tiennes ou les siennes ? Ou les vôtres tout simplement ? — Tais-toi. Murmure dans un souffle presque coupé. Il est aussi fort que toi pour nier toute vérité. Mais dans ses yeux, comme dans les tiennes, cette vérité ne peut être clandestine. Alors tu le laisses faire, tu le laisses dire. Sourire qui prend forme sur tes lippes. Ton poignet libéré, il s'éloigne. Il le fait à chaque fois qu'il sent la situation lui échapper. Comme toi. Tu le connais bien plus que tu ne le penses Julia. Tu t'élances comme un oiseau sur sa proie. Le stoppe en patinant autour de lui, mains croisées dans le dos. — Tout ça, tout ce que t'as dit, c'est ce que t'as envie de me faire. Mh, Scott ? Laissant les mots en suspens, tu accuses ses propres envies. Retourne la situation. Veux le rendre dingue. Provocation. Tu veux créer le feu d'artifice. Que son corps explose en mille couleurs contre le tien. — Tu sais ce qui est pathétique ? Tu calles à nouveau tes patins, lèves la tête vers le ciel. — C'est le fait de te mentir à toi-même. Tu as débarqué comme une tornade dans sa vie. La tornade Julia. Et tu es en train de foutre la merde dans sa tête. — Petit à petit, l'oiseau fait son nid, il paraît... Il n'y a pas de halte. Tu vas t'immiscer doucement et sûrement dans sa tête, lui voler toutes ses pensées, ses rêves d'une autre, ce garçon, tu ne comptes pas le laisser t'échapper. Baisses la tête, la tournes, puis plonges tes iris clairs dans les siens. — Tu ne m'as toujours pas répondu ? Tu veux qu'on aille quelque part après ? Pour la peine, je te laisserai m'emmener où tu le souhaites. Le diable et sa diablesse errant sous cette nuit noire. Tu te hisses à sa hauteur et ponctues tes louanges d’un baiser picoré sur sa joue.

Patineuse de l’enfer. Tourne autour comme un vautour. Démon à la croisée des chemins. C’est à ça qu’elle lui fait penser. Etrangement, ça le ferait presque sourire. Malgré la situation. Malgré le fait qu’elle est en train de foutre le bordel dans ce qu’il pensait de sûr. S’arrêtant enfin, elle lui bloque le passage. Le bleu de ses iris renvoyés à la voie lactée, elle rétorque. Reprends ses mots pour en créer un nouveau sens. Se mentir à lui-même ? Elle l’a perçue. Le doute. L’instabilité qui le hante. Les prunelles rivées sur sa gorge, son menton. Il laisse un rictus éclairer son visage. Rictus qui s’élargit quand elle l’observe à nouveau. Que sa noirceur se mélange à ses azurs. Elle réclame. Encore. Ne baisse pas les bras. Il le sait. Elle ira jusqu’à user la corde. Etiole la tresse pour la briser. Exactement comme il l’aurait fait. Et il ne saurait dire si ça l’attire ou si ça le rend fou. Avec elle, il est comme sur un fil en équilibre. Est-ce qu’il va tenir bon ou est-ce qu’il va se laisser plonger ? Ravager ce qu’il a construit pour un instant. Brûlure sur le derme. Ses pulpeuses pleines, laissent une trace. Du genre à s’infiltrer sous votre peau. A attiser un feu jusqu’à vous donner envie de l’étouffer. « C’était plutôt clair. » Pluie fine. Elle descend des cieux. « J’irais nulle part avec toi. »

in oculis, veritas @Scott Guerin — Borné, têtu. Un vrai phénomène. Il reste sur sa position ô combien, il est tout aussi perdu dans les abysses. Tu vois bien qu'il résiste, mais tu ignores pourquoi à ce point. À cette soirée, tu avais appris qu'il était en couple, puis quelques jours plus tard, il ne l'était plus. Alors pourquoi te résister de cette façon ? Avait-il réitéré la même bêtise ? Elle ne lui correspond pas. Ça ne durera pas. Deux mondes différents ne sont pas faits pour cohabiter. Ne sont pas faites pour se comprendre. Bien vite, il s'en rendra compte. T'es là pour accélérer le compteur. Plus vite, il réalisera, mieux tu pourras le condamner à errer avec toi dans les enfers. Soupire danse, la veuve noire. Secouant la tête, à la limite de t'infliger une claque. Tes pas réduisent la distance entre vos deux corps déjà embrasés. Fermes les paupières, front contre son torse. Laissant planer le moindre doute sur ta décision. — T'iras nulle part. Mais tes pensées elles, iront avec moi. Tu restes un moment comme ça, sans chercher le moindre contact, juste front contre le torse. — Ne le regrette pas. De ne pas t'accompagner. Même pas en rêve. — Je vais errer, je ne sais où. Je prétexterais une urgence. Tu peux rejoindre tes potes. Quittes son torse, penches ton corps pour retirer tes patins. En vrai, tu n'es pas si loin de chez-toi. Tu peux parcourir le chemin pieds nus, mais bon, par ce froid, tu vas vite te les geler. Finalement, tu plonges dans tes bottines noires, saisissant ton sac au passage. — Je ne te savais pas si dégonflé Guerin... Argument de taille. Tu provoques son ego. Le cherche. Torture mentale. Hausse les épaules, lui tourne le dos pour entamer une marche. Portable en main, tu appelles ton patron pour t'excuser d'une fausse urgence. Mensongère, mais qu'importe.

S’avance vers lui. Frêle silhouette à ses côtés. Le front apposé sur son torse, ses mots transpercent le tissu de son t-shirt. Devient écho dans son esprit. Ne le regrette pas. Une part de lui, si. Il le sent . Elle fait vibrer une ombre dans son âme. Détache un fragment qui ne demande qu’à s’exprimer. Silencieuse est sa bouche. Une fois de plus. Elle lui coupe la voix Julia. Lui qui d’ordinaire l’ouvre souvent. Pour combler les vides. Les blancs qui angoissent. Donne corps à une pression abdominale. Les émeraudes, elles, la suivent du regard. Ne perds aucuns mouvements. S’échappe la malicieuse. Spectre dans la ruelle. Se mêle à la noirceur des rues. Et il se demande Scott, qu’est-ce qui peut bien avoir provoqué cette errance. Elle qui s’y attache. Qu’est-ce qui a fait d’elle, ce qu’elle est ? Suffisamment solitaire pour ne réclamer aucune autre présence, mais assez désireuse pour éprouver le besoin de se nourrir d’un contact. L’être en action. Narquois est le sourire sur ses lèvres, quand il s’avance derrière elle. « Et après, c’est moi le dégonflé ? » Railleur garçon. « Regarde toi. » Flirte sa voix avec la nuit. « A t’casser de ton taff, parce que je t’ai pas baisé. » Il arrive presque à sa hauteur.

in oculis, veritas @Scott Guerin —  Non, tu ne pars pas parce qu'il ne t'a pas baisé, tu pars parce que sa présence ici est d'une torture pour toi. Tu sais que tu ne peux pas bosser quand il est là, alors tu préfères partir ailleurs, ou d'un Scott, tu ne verras pas. Tu n'entendras pas. Ses mots s'abattent sur toi comme une pluie de météorites. Lèvre que tu pinces assez fort pour en ressentir la douleur. Tu entends ses pas derrière toi, comme le vent qui fouette le feuillage des arbres. La colère et l'impatience plissent ton front. Tu t'arrêtes. Serre les poings. Soupires. Tu essaies de garder ton calme. Tu pivotes. Te retourne avec ce sourire. Ce faux sourire, mais bien éclatant. Suffisamment pour lui faire croire que ses mots ne t'ont pas touché. — Pense ce que tu veux, Scott. S'il te plaît de penser que c'est parce que tu ne m'as pas baisé que je disparais dans la nuit, et bien soit. Pense-le. Je m'en fiche, tu sais. Hausse les épaules. Ce self-contrôle de malade, parfois, tu te demandes comment tu fais. — J'ai changé d'avis. J'veux plus que tu viennes. Je préfère encore aller danser contre un autre corps que le tien. Voix haute, vibrante, et qui résonna sous une colère inaperçue. — Et le seul dégonflé ici, c'est toi. Moi, j'ai déjà prouvé que je ne l'étais pas. Tu n'es même pas fichu de m'embrasser alors que tu en as certainement plus envie que moi. Alors te baiser ? Incapable. Petit malaise passa inaperçu, grâce à l'habitude de dissimuler. Tu lui tournes à nouveau le dos pour reprendre la route.

Menteuse au sourire d’ange. Ses poings serrés l’appellent. Lui décroche un énième sourire goguenard. Et dans la noirceur, la divine aux cheveux argent, bave d’une justification. Se contredit. Dévoile sa propre envie. Une envie qui pourrait faire écho à la sienne, s’il ne sentait pas le poids de la conscience derrière lui. Son filament qui continue de briller dans la noirceur. De tirer un peu plus fort pour le ramener auprès d’elle. Se détourne la silhouette devant lui. Reprend sa procession comme une âme errante au milieu des ruelles. « J’espère qu’tu l’trouvera. » Elle ne le voit pas. L’éclat provocateur qui danse dans ses iris. « Qu’il t’feras oublier le mien. » Le sourire s’efface. Devenu soudainement plus sérieux, il l’observe encore quelques secondes. Il sait d’avance qu’il va trop loin, mais il y a quelque chose chez elle qui le fait parler quand il ne devrait pas. Qu’il le fait agir quand il ne devrait pas. Subconscient agité. Il peut presque en percevoir les idées folles. Seulement, à la place, il donne raison à la conscience. Fait taire le diable sur son épaule. Lui qui plante ses griffes dans sa clavicule. Enfin, il lui tourne le dos. Se fait violence pour ne pas écouter sa folie.

in oculis, veritas @Scott Guerin —  Pas qui stoppent, main qui s'appuie contre le mur. Tu ne te retournes pas pour autant. Pas le courage d'y planter les yeux, parce que tu sais que tu pourrais flancher. Parce que tu sais qu'il a ce pouvoir sur toi, qu'aucun homme sur terre n'a encore eu droit d'en posséder. Tu le détestes. Tu le hais. Pour ce qu'il te fait ressentir. Pour la noirceur qu'il dégage et qui s'enveloppe tout autour de ton corps. Comme un lion qui rôde autour de sa proie, pendant des heures, sous ce silence, sous ce suspense. — Je t'ai trouvé. Alors je trouverai bien quelqu'un d'autre. Mensonge. Tu ne veux point d'égale à lui. Tu le veux lui. Scott. Tu veux le déposséder de toute conscience. Y laisser une trace indélébile. Le marquer au fer rouge. — Essaye de ne pas penser à la surface de ma langue sucrée qui se mélange au salé de la tienne. Ce soir. Va-t'en Julia. Fuis pendant qu'il est encore temps. — À mes doigts qui caressent ton âme... Et tu pousses le vice plus loin. Tu le sais, tu n'as plus le contrôle. — À la simple idée que j'accorde à ta bouche l'antre de mes cuisses pour que tes lèvres m'offrent mille délices... Palpitant qui s'accélère, qui pulse tes veines. La voix rauque. Cours. Cours loin de ce diable avant d'y laisser ton âme. Et c'est ce que tu fais. Tu cours. Tu cours jusqu'à en perdre le souffle. Jusqu'à disparaître sous cette couverture noire, qu'est ce ciel.

Glisse les mots. Jusqu’à lui. Imprègne son âme. S’y accroche. Le cœur battant, il ne peut se détacher d’elle. De son aura obscurcie qui l’entoure. Elle qui lui parle. Le corps tendu, il tient bon. Ne bouge pas. Ne s’approche pas de celle qui fou déjà le bordel dans sa tête. L’emmène dans ses profondeurs. Loin de tout. Loin de la raison. Sursaut interne. Fuit la veuve noire. Cours dans la nocturne. Le bruit ses pas continue de claquer contre son ouïe, alors que depuis longtemps, la divine à disparue. Les secondes s’écoulent lorsqu’enfin, il se remet en mouvement. Disparait dans le lieu déserté par la brune.

in oculis, veritas @Scott Guerin —  Dans ses yeux qui reflètent son âme, il t'a rapporté tous tes tourments Julia. Tout ce que tu t'obliges à éviter. Tout ce qui te rend dingue, il les possède. Dans ce simple être qui fout la merde dans ta tête. Dans tes pensées. Qui est-il pour t'infliger ces supplices ? Délicieux supplices. Le sentiment de dégoût de ta propre personne. De ressentir toutes ces envies à son égard. Toute cette passion déchirante. Mais qu'est-ce qu'il est beau putain... Qu'on lui coupe la tête. Les cris de ton cœur volent aussi rapidement que tes pas qui s'éloignent de sa silhouette. Tu n'as rien à faire là. Tu ne lui dois rien, il ne te doit rien. Tu n'as pas besoin de lui, de ses bras, de sa chaleur, de ses lèvres si bonnes, de son parfum si volatile. Tu n'as pas besoin de lui Julia. Risque-toi à le penser. Envite de penser. À lui. À ce mâle qui te rend zinzin. Tes pas te mènent à ta porte. Que tu claques. Balance les clés, tu ne sais où et te réfugies dans ta chambre où tu te libères de tout vêtement où son parfum s'y est heurté. Nue. Tu t'allonges sous les draps, recouvrant ta fine peau douce et rougie par le froid mordant. Ferme les yeux pour oublier son visage. Mais déjà certainement en manque. De lui...

THE END   (à suivre  )